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Le Déchu | 14/11/07 18:11

Quelqu'un lui avait dit un jour : « La réalité, c'est la somme des points de vues de tous les êtres conscients. ».

Sur le moment, il avait volontiers adhéré au concept. Mais à présent il lui pesait. Etait-il bien réel, lui, si personne ne pouvait en témoigner ? Non, personne n'avait croisé sa route depuis des années, et la solitude effaçait inexorablement ses propres souvenirs, les noms, les visages. Personne ne savait qu'il se trouvait à cet endroit, comme s'il vivait depuis trois ans dans un espace clos, séparé du reste de l'univers dans une inexistence sèche et froide, alors même qu'il avait traversé, seul, mille obstacles qui l'avaient abattu autant qu'il les avait abattus.
Qu'était-ce donc qui l'avait poussé à avancer en dépit de son désespoir inhumain ? Le souvenir flou d'anciennes convictions, d'anciennes vies ? Un sens du devoir exacerbé et irraisonné ? Si lui l'ignorait, personne ne pourrait lui répondre. « Personne », un mot qui flottait dans son esprit du soir au matin, depuis...si longtemps...

La solitude avait tout détruit, et il avait découvert que quand on n'a plus rien, on marche. Et quand on est tombé aussi bas, la moindre poussière est un signe qui vous indique votre route. Une mouche l'avait conduit vers l'orient, une brise vers l'occident, un soleil vers le Sud, vers le Nord un Dragon, un étourneau vers les cieux...et vers le bas...
« Nous y voilà ... », grinça-t-il d'une voix desséchée, contemplant le panorama désolé.

Il se laissa glisser jusqu'au bas de la dune, atteignant la partie voilée par une ombre opaque. Devant lui émergeait du sable l'extrémité d'une vieille idole de pierre. Il se laissa tomber sur son postérieur et rejeta la capuche miteuse qui le protégeait du soleil impitoyable, découvrant un visage imberbe, squelettique et livide.
De la statue on ne voyait qu'une petite partie, qui aurait à peine attiré l'attention d'un infidèle au culte de Yog. Mais pour lui ces trois doigts étaient si familiers qu'il se trouva ému par l'apparition pourtant si pauvre en soi. Ils faisaient partie d'une oeuvre plus grande qu'il savait juste là, enfouie où nul mortel ne peut aller, pas s'il a besoin de boire ou manger.

Morrdred commençait à gratter le sable brûlant de ses mains bandées.

L'effigie oubliée naquit lentement, et même le soleil préféra s'en retourner derrière l'horizon, cédant son temps à une nuit glaciale aux mille étoiles.

Grelottant sous la Lune, Morrdred lança un oeil craintif à la statue au pied de laquelle il se trouvait à présent. C'était une représentation du Dieu Yog, sous son avatar nommé « Le Grand Masturbateur », ses huit bras étreignant un appendice d'une virilité toute divine, représentant à la perfection le symbole de création maléfique. Yog, « Abominable Père de toute Création » selon ses fidèles, parla à son disciple par cette nuit glaciale. Paradoxalement, c'est cette expérience pour le moins surnaturelle qui l'éveilla au monde réel, comme un enfant coupable qui aurait enfin reçu l'autorisation de quitter son coin pour retourner à sa place, abandonnant du même coup ses fantasmes vengeurs.

Oui, depuis ces années, malgré ses doutes, il n'avait pas erré en vain. Lui qui s'était questionné sur sa propre réalité, qui s'était demandé si après tout il existait bel et bien. Dans son tourment, il avait ignoré que même dans la désolation de ses voyages solitaires, il accomplissait toujours son Destin, aussi sagement que le pion d'un jeu d'échecs. Loin de s'interroger sur le libre arbitre, il y trouva le brûlant réconfort que seul offre l'amour d'un Dieu.
Yog lui enseigna son nom Yoggite, qui était son Symbole Religieux, son Grade au sein de l'Armée Divine du Grand Masturbateur. Ce nom était Déchéance.

Son pèlerinage étant achevé, Morrdred Syphonn laissa l'idole derrière lui et prit de nuit la direction du Nord, saisi d'une effroyable appréhension à l'idée de devoir bientôt retrouver un comportement social. Il se souvint, presque avec humour, qu'en des temps éloignés il avait arboré jour et nuit un uniforme cintré et un chignon sophistiqué, qu'il avait autrefois maîtrisé les arts de la courtoisie et de la diplomatie.

Il marcha huit jours sans rencontre, puis les collines terreuses qui se dessinaient à la limite Nord du désert furent remplacées par une forêt de hauts pins clairsemés. Rapidement, il trouva le sentier et l'arpenta.

Lui qui avait été un fameux bretteur et fin stratège se fit surprendre comme un novice : des gens étaient tout près. Pas de cachette à proximité, oublié le don de se métamorphoser en forme brumeuse, Morrdred s'allongea au milieu du chemin, mimant un cadavre à la perfection, sans besoin d'aucun artifice.

On aurait cru qu'un mendiant en guenilles était mort là, bien des jours auparavant. Il retint son souffle en regardant du coin de l'oeil les étrangers approcher. L'un d'entre eux était vraisemblablement un chevalier vétéran, un second avait l'allure d'un vieux mage, un troisième homme, humain comme les deux autres, était habillé en tenue classique de voyageur, et avait le sourcil fourbe du mécréant des villes.
L'appétit vampirique s'éveilla furieusement dans le coeur du Déchu à la vue des sept jeunes femmes qu'apparemment l'équipée escortait. Sept vierges vêtues de blanc. Etait-ce là un cadeau de Yog ou une coïncidence ?
Les vieux réflexes d'autodéfense surgirent alors : « Attendons d'en savoir plus ! », lui disait son cerveau.

L'une des vierges pointa le doigt vers lui en poussant un petit cri, et les trois hommes approchèrent du faux cadavre, sur le qui-vive, les jeunes femmes succombant à l'horreur et se mettant à pleurnicher. Prudent, le larron tâta Morrdred du pied, puis, ne doutant pas qu'il était bel et bien décédé et décomposé, entreprit de le fouiller. Il tâta les haillons et en tira d'abord un parchemin. Intrigué par son contenu, il le lut.

Le Déchu | 14/11/07 18:12

« Le vacarme, l'orgie, rouge foudre pétrifiante de flammes rageuses se jetant contre les colonnes et la coupole, trop vite pour ne serait-ce qu'esquisser l'once d'un geste salvateur. En un instant terrifiant leurs existences furent enlevées par un triste tourment, les prêtres brûlés d'un sort issu de l'encens de leur propre messe sanglante, magiques élans maudits d'une inhumaine action. Libre était le Démon », lut-il tout haut.

« Ouais c'est bizarre! », précisa-t-il, comme si un quelconque commentaire eut été bienvenu alors que les sept soeurs devaient refouler les pleurs affleurant à leurs yeux doux et blancs.
« Ta gueule, dugland ! » dit le guerrier.
« Toi tu captes à chaque fois que dalle », ajouta-t-il encore en s'approchant l'air menaçant, le doigt pointé au corps du jeune larron imprudent se croyant protégé.
« Je capte mieux que toi, eh ! » fit celui-ci, gardant de même l'oeil sur la main agile de la belliqueuse sentinelle, caressant déjà le fil de l'arme mortelle qu'il avait dégainée. Une intrépide lame, mille fois baptisée : dans le sang des vaincus tournoyant parmi les mille blancs flocons, occis d'une main sans défaut par fils de Ganir, Thysmic le Héros.

L'autre l'ayant ainsi provoqué, faisant fi de la menace, lui fit complètement face, les poings sur ses cuisses écartées, prêt à l'attaque, novice affamé de prestige et trop sûr de ses insignifiantes années d'exercices aux sports de combat au corps à corps.
Mais il y avait l'Epée. Lame Divine s'il en est, portée par le redoutable mais dépourvu d'esprit chevalier sans finesse, sans finalement d'attrait, à part pour le prestige de son grade. Lame Divine portant en son coeur métallique le secret d'une vie propre à l'acier de magie dont elle était faite. Thysmic se nomma bien fort et nomma son arme après lui mais d'un cri tout aussi haut, comme une trompe ou un cor annonçant la venue de la mort.

A ce moment le troisième personnage s'interposa, haut en couleurs et broderies savamment tracées par d'antiques artisans provenant de secrètes provinces dédiées à la magie, coiffé d'une crinière de cheveux gris, Gurlam le mage les stoppa d'un hurlement.
« VOS GUEULES MAINTENANT ! Vous arrêtez pas de vous chauffer depuis l'autre jour, vous êtes trop pas professionnels ! »
« Qu'est-ce qu'il veut lui ? », répliqua aussitôt Thysmic qui se tourna vers lui, faisant sonner exprès les mailles de son armure d'acier terni.
« Tu crois que je suis pas professionnel, moi, alors que je suis un Champion de l'épée, que j'ai poutré seize dragons ! Oh, SEIZE DRAGONS mec, je te le dis moi alors commence pas à... »
Mais l'autre l'interrompit, mage rompu à l'art de la psychologie. « Vas-y c'est bon là avec ton baratin à deux pièces de cuivre, tu crois que tu me fais peur ? Viens, viens tarlouze ! »

Se sentant par cette insulte parfaitement offensé, Thysmic fendit l'air de sa lame acérée et toujours rutilante, d'une attaque rapide d'estoc. C'est le moment que choisit Morrdred pour intervenir, poussant du pied le Mage afin que celui-ci ne puisse esquiver l'arme qui pénétra ses boyaux sûrement, acclamée par les hurlements hystériques des sept vierges terrorisées. Thysmic, totalement surpris, vit le cadavre se dresser d'un bond et de ses guenilles jaillir un Cimeterre d'onyx, qui sans faille le pourfendit au-dessus du col de son armure.
Le troisième, sagement, avait fui. Ne restaient que les délicieuses filles trop apeurées pour agir.
Morrdred un festin s'en fit.

Duc De L'uto | 14/11/07 18:21

J'adore...

Guerrier Du Tnaën | 14/11/07 18:41

Encore un adorateur minable de pseudo-divinités hallucinatoires...Ce Yog-ourte doit avoir tourné, ce qui n'est guère étonnant compte tenu de la vétusteté poussièreuse et malsaine de ce culte pitoyable.

Serpent et moi aurons satisfaction à déchoir un peu plus ce dégénéré....8)8)8)

(sinon le texte est bien écrit:o)

Edité par Guerrier Du Tnaën le 14/11/07 à 18:41

Lancwen la Pourpre | 14/11/07 20:59

{range ses parchemins de RP}

Après ça, difficile de passer ;)
Bienvenue a la maison Morrdred.

Faerandel | 14/11/07 21:27

Ça calme !

La paix sur Daifen n'est désormais plus qu'un souvenir, si IL est de retour. ;)

Zoltahn Kodaly | 14/11/07 23:55

Le retour d'un titan... l'ombre va grandir.
Une perfection ce RP.

Jarx le Vieux Loup de Mer | 15/11/07 10:29

La paix sur Daifen? :o

Jarx le Vieux Loup de Mer | 15/11/07 10:30

Bon retour!

Et beau RP ;)

Xüne Syphonn | 18/11/07 09:40

Ainsi Le Déchu de Céphalopodhil refait surface.... ramène-t-il enfin la peur et la mort dans son sillage ?

Rp toujours aussi bien écrit et agréable à lire...

La lignée Syphonn n'est pas morte.

Heureuse de ton retour Morrdred.

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