Forum - 2 - Noctambule
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Le Déchu | 15/11/07 12:15
Il s'attendait plus ou moins à retrouver son corps d'antan mais le bain de sang n'eût pas d'effet visible sur son corps décharné. Il était néanmoins repu et adressa une prière de gratitude à son terrible Dieu pour ce repas généreux. Passablement hébété, il examina le carnage. L'épée du chevalier était sans conteste un puissant artefact, aussi Morrdred décida de la laisser à qui la trouverait, accomplissant ainsi son premier acte depuis longtemps en faveur du Chaos.
Les vierges dépouillées de leurs chairs lui évoquaient un sinistre gaspillage de la vie, qu'il aurait préféré éviter si l'instinct n'avait pas été le plus fort. Peu importe, pensa-t-il.
L'autre mort, le Mage, était en fait toujours agonisant. Morrdred se pencha sur lui, sondant le regard de l'Humain. Pauvre de lui, témoin du repas de Vampire qui venait de se dérouler sous ses yeux impuissants.
Le Déchu laissa poindre un demi sourire sur son visage ravagé. « Insecte ! », grogna-t-il en écrasant sous sa sandale râpée le crâne sans ressource.
Le troisième Homme, qui s'était enfui, avait emporté le parchemin de Morrdred. Peu importe, pensa-t-il de nouveau, il en connaissait le contenu par coeur, et ce seul fragment n'avait pas d'utilité en soi. Il ramassa son Cimeterre et se remit en route, dodelinant du chef, ses bras pendant sur ses flancs, le pas peu assuré.
Cauchemardesque vision que ce Mort déambulant dans un manteau déchiré d'une démarche guère humaine, ou guère Elfique puisque telle était sa race. Un Elfe de Yog, bien entendu, qui aurait puni la comparaison avec un autre peuple d'Elfes, pour qui il avait partagé avec les Extrémistes Nains un mépris flagrant.
Ses sandales gorgées de sang provoquaient un bruit de succion à chacun de ses pas. De sang il en était mouillé intégralement. Cauchemardesque vision, oui, que ce Vampire anéanti par le poids de son étrange existence, célébrant la nuit tombante par la menaçante gigue de sa démarche désordonnée. Prophète noctambule à l'oeil destructeur, il suivait le Nord, vers Céphalopodhil, sans savoir encore ce qu'il y ferait. Qu'étaient les vies de ceux qu'il avait jadis connus, de celle qu'il avait jadis épousée, de son fils Nhaundar, de son père Zampitanafron Syphonn, le Roi des Elfes de Yog ?
Qu'était devenue la Pieuvre Noire, qui avait dirigé le Monde dans l'Ombre, en partie grâce à lui, où étaient les Séides Faerandel, Manumilitari, Tello Sumstrat, Gorghim Trapanelh ?
Gorghim, oui, c'était lui qui avait dit, un jour où il était moins aviné que d'habitude: « La réalité, c'est la somme des points de vues de tous les êtres vivants. »
Morrdred n'était pas vivant, juste animé, mais réel il le redevenait au rythme de sa démarche saccadée. Il avait une conscience saillante du fait que devant lui l'éternité ouvrait ses portes, et derrière les charognards finissaient ses restes.
Edité par Le Déchu le 21/11/07 à 01:12
Le Déchu | 15/11/07 13:39
Finalement, ce fut devant lui l'Océan.
Habituellement il aurait plongé, et nagé tout droit à une bonne profondeur. Mais cette époque devait être révolue. Plus loin à sa gauche, les lumières jaunâtres indiquaient la présence d'un village portuaire qui se découpait à peine sur le paysage nocturne. Morrdred se regarda, et fut immédiatement pris de fou rire !
« Eh oui mon pote », grogna-t-il, hilare, « T'es tout pourri ! »
Retrouvant son sérieux grâce à une insupportable quinte de toux, il se débarrassa de ses loques ensanglantées et pénétra nu dans l'eau noire, glacée. Léchant l'écume salée, il frotta ses jambes maigres, son corps cadavérique enchevêtré de tatouages tortueux. Il arracha la partie de la chevelure noire qui dépassait sa propre taille, et démêla du reste le plus gros, de ses doigts griffus. Puis il s'enfonça sous la surface et s'accrocha au fond quelques instants.
Quand il retourna sur le rivage, il ressemblait plus à...un zombie propre...qui empestait toutefois l'algue à plein nez. Il fit un baluchon de son manteau, dans lequel il fourra ses rares affaires. De son capuchon il fit un pagne, et le Cimeterre reprit place à sa ceinture. Il relaça enfin ses sandales, attacha ses cheveux d'une cordelette de cuir.
Ce n'était pas suffisant. Il imaginait facilement la réaction d'un mortel à sa vue. Fuite, hystérie, hostilité en tous les cas. Peu importe, pensa-t-il, avançant sur le sable vers le village.
Tactiquement, il attendit l'aube pour se montrer.
Ainsi le voilà qui parvenait au petit port et se dirigeait vers les plus rudes malandrins qu'il y pouvait trouver. Les gens ne se contentaient pas de se détourner, il s'arrêtaient et le regardaient, cois. Les flibustiers vers lequel il allait dégainèrent leurs sabres et leurs dagues.
« J'ai de l'or, coassa Morrdred.
- Tant mieux pour toi, répliqua le capitaine, dégage maintenant.
- Où est on ici ?
- Tu es sourd ? j'ai dit dégage ! »
Morrdred se retint de lui sauter dessus comme un animal. « Social, social ! », se répétait-il...
« Regardez-vous, reprit-il, et regardez moi. Je vous laisse en vie si vous me laissez monter à bord. Vous vous en tirez à bon compte !
- Tu n'es pas le premier Mort-vivant qu'on affronterait, alors pour la dernière fois, dégage ! »
Rien à faire. A part un exemple. Mais était-il réellement capable de les affronter, après tout ? Oui, bien sûr ! Ils n'étaient rien que de la racaille des mers. Sans crier gare (ce qui aurait été stupide), il rompit en un éclair le cou du ruffian le plus proche de lui, n'ayant de cesse de fixer le capitaine, misant tout sur l'intimidation...et le style. Le matelot s'affaissa en regardant son propre dos. Le Capitaine perdit sa confiance l'espace d'une fraction de seconde, ce que Morrdred ne manqua pas, avançant aussitôt d'un pas.
« Où est-on ici ? demanda-t-il de nouveau, choisissant bien sa tessiture.
- C'est le village de Norbrochet, au Nord du continent Purgatoiredhil, territoire d'un certain Snorf.
- Je vais vers le Nord, quels sont les continents les plus proches ?
- Il y a Hirondil tout près, territoire des Lumineux, là-bas on est tricards. Peut-être que vous voudriez pousser vers Certadhil ? Vous allez où en fait ?
- Certadhil, hein ?
- Oui, à deux petites semaines de navigation.
- Emmenez-moi là-bas pour l'instant, je vous paierai deux pièces d'or par jour en mer. »
Une seule tentative d'assassinat vint salir le voyage, et la traversée se termina avec un équipage réduit mais parvint à bon port. Les côtes agressives du continent maudit se rapprochaient. "Certadhil", marmonna-t-il.
Bart Abba | 15/11/07 18:22
BRAAAAAAAAAAAAAAAAAAHH !!
Lancwen la Pourpre | 15/11/07 21:20
Sur Certadhil, dans la plaine menant a la citadelle de Drazankhar, l'air était suffocant. La brise torride aurait brûlé les poumons de n'importe quel vivant, mais nul âme n'osait s'aventurer ici de toute façon. Se rapprochant de la cote, l'air devenait certes plus respirable mais la désolation était omniprésente, la foret d'arbres morts qui longeait le rivage n'était pas plus hospitalière mais elle accueillerait bientôt un de ses enfants les plus prometteurs.
Le Déchu serait ici chez lui....
Edité par Lancwen la Pourpre le 15/11/07 à 21:27
Le Déchu | 16/11/07 19:34
Piétinant encore et toujours la poussière et la végétation ratatinée, en pagne et sandales comme un vulgaire Cimmérien, le Déchu se questionnait, sondant sa mémoire abîmée. Le décor de Certadhil lui rappelait que, à l'heure où tous étaient unis contre Drazankhar, lui avait fomenté un assassinat contre Findel, pour lequel il éprouvait des remords cataclysmiques, lui avait envoyé ses troupes contre Faerandel, en proie à une rage incontrôlée. Il avait été le plus misérable des alliés, car, il le comprenait à présent, la puissance d'une alliance se mesure à sa loyauté, non à sa capacité de destruction.
Son intelligence, il l'avait gaspillée, comme d'ailleurs sa famille, ses responsabilités envers son peuple de Céphalopodhil, envers ses acolytes de la Pieuvre Noire. Les souvenirs fusaient, anarchiques, et de chacun il tirait la même leçon. Mais il pouvait devenir meilleur, n'avait-il pas épargné l'équipage pirate quand il avait débarqué sur Certadhil ?
Meilleur, peut-être, mais il avait perdu ses plus chers amis, les abandonnant à leur sort. Pouvait-il frapper à la porte de Celimbrimbor en criant « Yo ! Comment ça va ! » ? Pouvait-il se présenter aux gardes d'une forteresse des Nains Extrémistes en disant « Salut, je suis Morrdred, laissez-moi entrer ! » ? Pouvait-il surgir chez les Hordeux du jour au lendemain...oui, bon, ça, avec un bon tonneau de bière il pouvait...
Mais cela ne l'amusait pas, car il se souvenait... « Le sang de Xüne à Xüne, le sang de Morrdred à Morrdred »... Comment cela avait-il pu se produire ?
Le Sang.
« Tu auras le Sang que tu veux »...Qui avait dit cela ?
Il cherchait dans l'obscure forêt de ses pensées. Il s'arrêta de marcher. Il fouilla dans son baluchon.
Il y avait un parchemin, qu'il avait reçu quand il possédait un royaume sur ce continent maudit. Il ne savait même pas pourquoi il l'avait gardé parmi ses affaires dévorées par les mites. Il lut.
"Morrdred,
Je ne connais rien des raisons qui te font agir ainsi, mais elles n'importent peu. Seule compte notre solidarité entre frère et soeur de Race.
J'espère te revoir tel que tu étais avant ton passage sur Certadhil, débarrassé de tes tuyaux infects. Les Elfes de Yog n'ont point besoin de tels artifices.
Mon action contre Fær va sûrement sonner la fin de mon royaume sur Certadhil, tant pis, tu comptes plus que tous ces pleutres à sang chaud.
Mes troupes marcheront donc contre le camp de Fær dès cette lune.
Lancwen Vampire et fière de l'être."
Il n'avait pas, à l'époque, pris conscience de la loyauté de Lancwen à son égard, trop habitué aux serviles serviteurs et Acolytes qui pullulaient autour de lui en permanence, trop obnubilé par sa ridicule vendetta à l'encontre de Faerandel.
Peut-être qu'ils le mépriseraient tous, mais pas elle, pour qui trois ans n'étaient rien, elle qui le considérait comme son fils et comme son frère.
« Tu vas être contente, dit-il au vent amer, je n'ai plus le moindre artifice...c'est tout juste s'il me reste un peu de peau... »
Comme s'il venait de recevoir ce message pourtant obsolète, il se lança seul dans un heureux dialogue imaginaire de retrouvailles chaleureuses, au sein du berceau des Morts-vivants de Daifen. Que Yog bénisse ce continent, pensa-t-il en cherchant un repère pour localiser le Royaume de Lancwen.
Duc De L'uto | 18/11/07 13:11
Vraiment bien écrit. Un RP à suivre.
