Forum - [Troisième Baal] Double faute, premier service.
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Althâr Anthâar | 24/03/08 00:37
« Ma femme m'a quitté, mais je m'en contrefiche ! » Hurla Baal en enfonçant la porte du Heaven's Bar, à la stupeur générale. Ben quoi les gars, continue-t-il. Z'avez jamais vu quelqu'un d'heureux ? Tournée générale ! »
Aussitôt, tout le monde se jeta dans le plus grand désordre vers le zinc, agressant littéralement le tenancier de commandes. Et quand je dis littéralement, cela signifie qu'une bande de démons pas forcément mineurs lui balancèrent en pleine tronche mot de pouvoir sur mot de pouvoir.
Une fois le miroir recouvert d'une substance que la décence m'interdit de décrire... En fait non.
Une fois le miroir recouvert d'une substance étrange, plus ou moins verdâtre, mais avec quelques tendances à virer au jaune ou au rouge le plus vif par endroits, granuleuse aussi là où aux fluides biologiques du pauvre barman [Pour la petite histoire, il faut savoir que n'importe quel être ne peut pas répondre à plusieurs mots de commandement en même temps : un, cela passe. Deux, encore. Au-dessus, l'issue est fatale : le corps se lance dans toutes les tâches demandées en même temps. Alors, imaginez ce pauvre barman et la grosse vingtaine de commandes. D'où la substance.] s'ajoutaient des lambeaux de peau, des morceaux de cornes, voire des résidus de cervelles ; les clients se servirent eux-mêmes tandis que Baal, un peu penaud et franchement hilare surtout, s'éclipsait avec toute la discrétion dont il pouvait être capable avant que la Brigade Anti Débordement n'arrive.
Évidemment qu'il s'en fichait que sa femme l'aie quitté. Même si elle était un avatar tentaculaire du lucre et du vice, au bout de cinq siècles de mariage et d'un ou deux siècles de plus de vie commune, il en avait fait le tour. Place à un nouveau Baal, plus libre, plus grand, plus fort, plus audacieux, dont la femme ne le tromperait pas avec le dentiste, le plombier et le petit livreur de lait de bouc en même temps !
Place, donc, à un Baal célibataire et archiviste.
Bien sûr, dit ainsi, cela ne sonne pas très bien. Et si je payais pour lire ce genre d'âneries, je vous assure que je massacrerai les auteurs à la pelle. Ou à la boule de feu. Au choix. Mon coeur balance, en fait. La boule de feu, c'est très pratique mais bon, ça ne laisse pas de traces sinon un tout petit tas de cendres, et encore, pas toujours, cela dépend de la puissance avec laquelle on la lance, ce qui fait que généralement, moi, je me retrouve avec simplement un peu de roussi sur le sol. Et rarement encore. Tandis que la pelle... La pelle, tout de même, c'est autre chose. C'est plus artisanal, on y met beaucoup plus de passion et de grandeur. La pelle, c'est jouissif : le coup de tranche, le coup de plat, tant et tant de manières de massacrer joyeusement ! Mais je m'égare.
Les archivistes infernaux ont sans doute le travail le plus complexe et responsabilisant qu'on puisse trouver dans le multivers. Être archiviste consiste à classer. Ce qui en soit, bien sûr, n'est pas bien difficile. Mais rappelez-vous que « classer », c'est intégrer de l'ordre dans les choses. Or, comment intégrer de l'ordre en enfer, c'est-à-dire précisément au point du multivers qui ne supporte pas l'ordre ? C'est un coup à se prendre un retourné claqué des lois physiques en pleine pogne. D'où le salaire démesuré. Et la demande de talent.
Car il ne faut pas croire, surtout, que Baal est un incapable de premier rang. Au contraire : il est intelligent. Très intelligent. Brillant même. Un esprit comme il en existe peu. Il est capable de trouver des problèmes pour résoudre une infinité de solutions. Lors de la dernière crise démonique majeure, alors qu'il n'était encore qu'étudiant sur les bancs de la classe préparatoire, il avait formulé, en quelques jours, l'échappatoire que le Conseil Démoniaque mettrait deux mois à trouver. Un esprit tellement brillant qu'il est un des rares, en ce monde de chaos, à réussir à concilier les concepts d'ordre et de désordre. [Précisons ici qu'un démon quelconque, mis à part peut-être Rek, mais il n'est pas quelconque lui, exploserai à l'idée même d'ordre. Quant à conceptualiser l'ordre dans le désordre, l'inverse ou la réciproque... Cela, cependant, demeure un moyen assez amusant de se débarrasser de n'importe quel démon et de repeindre les murs de sa cuisine dans des tons originaux. La réalité fait mal. Très mal.]
Ainsi, aux archives, il accomplissait un boulot du tonnerre de... D'enfer. Les rayonnages multidimensionnels de l'immense bibliothèque n'avaient jamais été aussi bien rangés que depuis sa nomination. Certes, au début, il avait fallu être très clair avec les démons qui venaient y faire leurs recherches, et leur apprendre à ne pas penser à l'ordre. Baal n'aimait vraiment pas retrouver de morceaux sur les livres. Non plus que des flaques étranges sur ou sous les plans de travail. Enfin, bref.
Tout ça pour dire que Baal faisait son travail avec maestria, et que les XP tombaient. Défringolaient, même. Chaque mois. Avec une régularité inquiétante, Baal recevait son salaire de 400000XP. Impressionnant, non ?
Ce qui est vraiment impressionnant, c'est que tout pris par son boulot, Baal ne les répartissait pas ! Il les laissait s'accumuler stupidement dans un coffre de la Demonic Bank of Demonic Land, sans jamais s'en préoccuper. Il était trop occupé à ranger le désordre auto-reproductible des archives. Aussi, bien qu'étant potentiellement l'un des plus puissants démons de l'histoire multiverselle, il n'en demeurait pas moins un jeune démon de second ordre terriblement, terrifiquement intelligent.
Une précision s'impose ici. Des chercheurs, du haut de leur savoir, ont édicté que la génération spontanée n'existe pas. Imbéciles. Dans les archives (démoniaques ou pas d'ailleurs) la génération spontanée existe. Le chaos naît de lui-même, sans qu'on lui demande, et se reproduit tout seul, comme un grand. Faites l'expérience : rangez précisément vos livres sur des rayonnages, scrupuleusement. Fermez la porte et revenez, mettons, une semaine plus tard, en ayant empêché quiconque de rentrer. Le désordre régnera. Incroyable, non ? A noter : le même principe d'auto-reproduction du chaos s'applique aux chambres des adolescents.
Un boulot à plein temps, donc, qui empêchait Baal de faire attention aux choses de la vie. Comme par exemple ces deux démons qui, bien innocents, s'amusaient à allumer en douce des incendies dans le coeur des deux jeunes démones juste à côté d'eux. Spectacle touchant que la parade nuptiale de ces êtres inoffensifs, qui se préparaient à s'aimer et se chérir, ou pas, jusqu'à ce que mort s'en suive. Miracle toujours renouvelé de la nature qui séduit les âmes et déchaîne le feu des passions.
Au sens figuré normalement, mais selon le principe bien connu dit de « «littéralité des lieux communs dans un espace fortement magique », les archives prirent feu.
Communément, ici, les auteurs auraient voulu placer une longue, très longue description de l'incendie, des livres qui hurlaient au feu tandis que les démons archivistes se tortillaient de douleur sur leurs rayonnages. Je vous prie de le croire, les auteurs auraient vraiment voulu décrire comment le feu, d'abord faible et contenu dans la salle des livres pour enfants, était devenu de plus en plus intense, dévorant dans un premier temps cette maudite salle, attisant sa flamme par des ouvrages sacrés enfin, pas au sens religieux, plutôt genre incontournables, tels que « Petit démon deviendra grand », « Manuel de torture pour les tout petits » ou encore « Le paladin, la holy avenger et le souffle du diable ». Nous aurions vraiment apprécié de pouvoir vous expliquer de quelle manière insidieuse le feu avait pu combattre les secours, prétendant s'arrêter, s'essouffler, à leur approche, se dissimulant derrière des étagères ignifugées, sournoisement, attendant les vaillants soldats de l'eau, et bondissant soudainement sur eux dans un souffle putride pour les dévorer sans pitié aucune. Cela aurait été un plaisir de ne pas vous épargner les hurlements des pauvres âmes faméliques torturées par le feu maléfique, plus ou moins magique, qui les brûlait sans les tuer encore, se gargarisant de la souffrance de ces pauvres hères, gagnant encore en puissance à mesure qu'il tuait et tuait, et tuait encore. Sincèrement, du plus profond de notre coeur, nous vous assurons que vous décrire l'incendie et comment finalement il parvint, en cet instant précis du récit, à détruire les archives en entier, ne laissant des bâtiments autrefois glorieux qu'un large tas de déchets légèrement fumés, aurait été notre plus grand plaisir. Vous expliquer comment Baal échappa miraculeusement à la mort en se faufilant sous des sièges, se protégeant derrière des gamins de passage, affrontant même le feu de ses mains nues (ce qu'il ne fera pas deux fois, notez bien), comment, sautant du quatrième étage pour sauver sa vie, se rétablissant dans les airs, plantant ses griffes (fournies à la naissance à tout démon) dans la pierre dure pour ralentir sa chute, il survécut, tout cela nous aurait délicieusement fait plaisir mais nous avons le regret de devoir le résumer ainsi.
Le feu prit dans les archives. Il dévora tout le bâtiment. Baal s'en sortit miraculeusement...
...Pour tomber dans les griffes de la justice. De Justice, pardon. Justice Von Remur. Démon très expérimenté. Très très expérimenté. Très griffue aussi. Non, nous ne l'a décrirons pas. Pas envie. La flemme, ouais.
L'incendie des archives n'avait pas de coupable. Ce qui pour Justice, était inconcevable. Par contre, il avait un responsable, responsable qui coûtait très cher à l'administration. Dont Justice était la connétable, aussi, en plus d'être la porte parole.
Baal fut donc accusé d'avoir laissé se répandre le feu, et ergo de l'avoir laissé dévorer la bibliothèque. Sa défense consistant à dire : « J'étais en train de mettre de l'ordre dans le département quantique » ne tenant pas la route, il fut condamné. Justice lui retira sa fiche de perso sans lui permettre d'ajouter les innombrables points d'XP qu'il avait pu accumulé pendant les deux trois siècles qu'avaient duré son emploi (admirez l'ellipse : deux trois siècles en une demi page. Fortiches, les auteurs, non ?), stipulant que s'il voulait la récupérer, il allait devoir fournir à Justice, qui avait une petite faim, six cent soixante six âmes, et pas une de moins. Fraîches, de préférence.
Voilà donc que notre pauvre Baal se trouvait à la rue, et sans aucun pouvoir.
Ce qui est pitoyable, n'est-ce pas ?
Si vous avez réussi à nous suivre jusqu'ici, vous serez heureux de comprendre enfin quelque chose à propos de cette histoire. Ce jour précis qui avait vu Baal nommé au poste d'archiviste à l'Institut Démoniaque des Archives l'avait aussi vu recevoir quelques menus privilèges. Parmi ces privilèges, une demie douzaine de formulaires d'Allégeance. Ce jour précis qui avait vu sa promotion - mise au placard diront certains - avait aussi vu sa femme le plaquer. Et c'est précisément le soir de ce jour précis qu'il débarqua au Heaven's Bar, prêt à prendre un nouveau départ dans la vie. Tout ça, vous l'avez, je l'espère, compris.
La causalité, on est pas là pour vous expliquer comment ça marche. Cependant, ça entraîne parfois l'occurrence d'évènements, théoriquement complètement distincts, simultanément, entraînant l'occurrence d'un seul et unique événement directement causé par l'occurrence simultanée des précédents éléments qui eux, finalement n'étaient pas si distincts qu'on aurait pu le croire.
Dans le cas qui nous concerne, ce soir là, précisément, au Heaven's Bar, un vieux nain avait lui aussi quelque chose à fêter. Althâr Anthâar venait d'être élu Mister Daifen et, après une cérémonie en grandes pompes, il n'avait pas trouvé meilleur endroit que le Heaven's Bar pour partager sa joie avec le multivers - la taverne étant déserte à ces heures tardives.
Au moment précis où Baal offrit sa tournée générale à la populace en ce lieu réunie Althâr, sentant le mauvais coup venir, se téléporta derrière le bâtiment. Quelques instants plus tard, Baal, s'étant adroitement faufilé, dégommait la porte de derrière et s'écrasait dans une flaque de boue, aux pieds du nain, surpris. Aussi, l'aidant à se relever et ayant encore quelques tonneaux à vider pour pouvoir considérer qu'il avait effectivement dignement fêté sa victoire, Althâr lui proposa d'aller finir la soirée à la taverne, où ils pourraient discuter.
Quelques heures plus tard, Althâr Anthâar, saoul comme une barrique, s'engageait à servir sans restriction le démon porteur de malemort et de violence, l'annonciateur de destruction, le chef d'orchestre des trompettes de Jéricho, aux côtés de qui marchait la Mort, le funèbre seigneur des funestes destins, écraseur de crevettes et massacreur d'espoirs, Baal, et à accomplir son dessein. Par le contrat qu'il venait de signer, et les précédents chapitres nous ont appris qu'il ne s'en souviendrait pas, il engageait donc sa vie et son âme, et ne devrait théoriquement s'estimer relevé de son serment qu'une fois que Baal aurait accompli son grand oeuvre.
Ceci explique bien des choses, non ? Et ensuite ? Le temps d'y penser et on vous tient au courant !
Baramir d'Eckmöl | 24/03/08 14:30
*applaudit à deux mains*
Vraiment génial
je ne sais même pas quoi dire de plus. Tout simplement délicieux
.
