Forum - [RP] Difficultés enfantines. (2)

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Duc De L'uto | 23/11/06 17:18

Les hommes du Duc progressaient depuis déjà vingt minutes dans la forêt longeant le village qu'ils avaient incendié la veille. Espacés les uns des autres, ils ratissaient les bois à la recherche de n'importe quelle âme qui n'y aurait pas sa place. Enfin, c'est ce que le Duc leur avait dit. Car s'il était vrai qu'une présence humanoïde l'aurait fortement contrarié en ces lieux, il faisait cela avant tout pour retrouver la fillette. La fillette qui avait tué un de ses nains sous ses yeux, et qui avait probablement réservé le même sort à celui qui était censé la poursuivre, la nuit dernière. Alors que ses rêves ne l'avaient pas épargné, il s'était réveillé avec les images nettes de ce qu'il s'était passé avec les jumelles. Des sorcières, des démons, sans aucun doute.

En marchant, le Duc contemplait tout ce qui l'entourait. Il s'agissait d'une banale forêt, avec son lot d'arbres tortueux et envahis de plantes grimpantes. Mais rien n'échappait à son regard, car si son visage restait de glace, il ne trouvait pas moins du bonheur à être ici. La mousse sous ses pieds, le chant des oiseaux, le bruit du vent, toutes ces choses si naturelles qui faisaient de la Terre une oeuvre resplendissante. Si seulement les gens n'avaient pas été créés. En passant près d'un énorme tronc, le nain aperçut une forme mouvante, plus loin, partiellement dissimulée par un rideau de branchages. Faisant signe aux gardes les plus proches de faire silence, il s'approcha aussi discrètement que possible.

Alors le premier nain hurla. Se retournant, le Duc le vit lâcher son arme pour placer ses mains de chaque côté de sa tête. Du sang coulait de ses oreilles. Le garde suivant s'effondra après avoir été victime d'une série de vigoureux tremblements, il continua de gesticuler une fois au sol. Un autre nain, après avoir voulu aider son compère, se retourna finalement pour courir vers la lisière. Le Duc fulminait. Il contemplait la faiblesse de sa garde, tout en se promettant de faire torturer les fuyards, lorsqu'arriva le premier choc mental. Une série de douleurs apparurent, puis il se remit à voir en noir et blanc. S'adossant contre un arbre, il souffla, essaya de se concentrer sur les couleurs. Il n'arriverait à rien. Plus loin un autre nain brailla sa douleur, et sûrement sa mort. Puis on entendit un rire. Un rire féminin, un rire enfantin, celui d'une petite fille de dix ans qui se moquait de quelqu'un.

Le Duc empoigna son marteau et se leva d'un bond fulgurant. Où que pouvait être la petite, elle devait cesser cet horrible jeu. Repérant la source du rire derrière quelques arbres fins ayant poussés côtes à côtes, il s'approcha, luttant contre la souffrance, et frappa. Son arme rencontra le vide avant de percuter les arbres. Le craquement qui en résulta était comparable au son d'os que l'on fracassait. Le Duc aurait payé cher pour que ce soit des os. Mais déjà le rire venait d'ailleurs. Le nain se retourna et localisa le nouvel endroit où aurait pu se cacher une petite fille, mais son marteau ne fit que déraciner les buissons, sans toucher quoi que ce soit d'humain qui aurait pu être caché à l'intérieur. Et le rire continuait. Elle jouait avec lui.

Ces couleurs ! Ces couleurs qui avaient disparus, c'était le plus insoutenable. Le Duc voyait la forêt, le monde, sous un autre angle. Il ne pouvait accepter cette vision. Si sa vision de la Terre changeait, sa perception de Gaïa changeait. Et ce n'était pas concevable. Il poussa un cri de fureur qui était censé le rassurer face à ce rire démoniaque, mais qui ne fit que peu d'échos tandis que le gloussement malsain reprenait de plus belle. Jamais il ne s'était senti aussi seul. Jamais il n'avait eu autant besoin de Gaïa. Il se stoppa, recula, chancela et s'écroula en avant. Son heaume roula au sol, alors que sa joue rencontrait des feuilles mortes et de la terre. Il se rendit soudain compte de son amour. De son amour pour la Terre. Mourir, pour lui c'était peu. Mais mourir, cela signifiait abandonner Gaïa, abandonner la Terre. Alors qu'il se hissa pour se relever, de la terre humide lui coula sur le visage, auquel se mêla une larme. Une larme de haine, mais une larme d'amour.

De nouvelles forces le hissèrent. Le Duc récupéra son marteau et se remit à avancer fébrilement. Il le serra dans ses mains, se jurant de ne plus tomber, se jurant de rester en vie. Son ennemi le plus redoutable était une fillette de dix ans ? Il le terrasserait comme les autres, pour son plaisir et pour le bien-être de Gaïa. Une autre larme coula alors qu'il défonçait littéralement un tronc censé dissimuler une petite fille. Encore rien. Mais il ne pouvait pas désespérer, jamais. Il ne se le permettrait pas. Et tandis qu'il s'appuyait à un autre chêne pour tenter de se repérer, une petite silhouette enfantine apparut, juste en face de lui. Il la regarda, trempé de sueur et de sang venant d'une plaie invisible, son marteau se balançant lourdement dans sa main droite.

« Qu'est-ce que tu es, espèce de saloperie ?
-(Après un petit rire, le silence tomba) Je ne suis qu'une petite fille, Duc. Mais une petite fille élue. Je suis une élue de la Terre. Je suis Son élue, Sa troisième prophète, après ma soeur et toi. Je n'ai pas ta puissance, je n'ai pas d'armée, mais je suis capable de bien d'autres prodiges pour nettoyer la Terre. »
Et les couleurs revinrent.
« Alors pourquoi me causer ces douleurs, pourquoi massacrer mes hommes ?
-Tu as tué mon père. Et ma soeur. »
-Ils sont la vermine de ce monde, tout comme les autres, ou comme toi et moi. Ne crois-tu pas que j'ai eu une famille, un jour, et que leur disparition ne m'affecte pas plus ?
-Chacun ses règles du jeu, j'ai choisi de ne pas tuer ma famille.
-Alors Gaïa s'est trompée sur ton compte. »

Après avoir prononcé ces derniers mots, le Duc ressentit la même impression qu'il avait perçut lorsque les couleurs s'étaient dérobées. Et effectivement, sa vue devint trouble à nouveau. Il cligna des yeux. Et la fillette se mit à rire. En la regardant, le nain s'étonna de la voir en noir et blanc, alors que tout le reste, la forêt, le ciel, lui-même, étaient faits de couleurs. Un autre rire s'éleva alors, un ricanement mauvais, un gloussement satisfait, celui d'un nain. Le marteau s'abattit sur une petite fille de dix ans alors que son sang éclaboussait les arbres du coin.


Edité par Duc De L'uto le 23/11/06 à 17:19

Movézeuil | 23/11/06 21:42

Franchement magnifique ! La suite !

Baron Hector Iii | 28/11/06 01:29

Du texte de haute qualité mon seigneur. Comme toujours.

Isilwen | 28/11/06 17:53

RP assez intéressant...

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