Forum - Les éléments la demandent... [Partie 1]
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Eigoel Nahb | 29/05/08 22:46
-Mais puisque je te dis que c'est un As !
-As ou non, le un est plus petit que le deux, il a donc moins de valeur, donc je gagne la mise.
-Ce n'est pas un Un, c'est un As ! Le chiffre au dessus de tous, comme aux cartes ! C'est le plus fort, c'est à moi de gagner la mise.
-N'essaies pas de me la faire à l'envers !
-Truandaille ! Tu vas voir !
Sur ces derniers mots, l'homme au visage recouvert d'arabesques bleues sauta au cou de son compagnon de jeux, qui l'accueillit de ces mains griffues, aux ongles extrêmement longs recouverts de terre. Les deux êtres s'arrachèrent des touffes de cheveux et se firent sauter quelques dents, jusqu'à ce qu'un lourd grondement dans l'air retienne leurs poings levés. Les quelques nuages blancs dans le ciel s'obscurcirent considérablement, le grondement se fit plus fort, et un vent annonciateur de tempête se leva. Les deux bagarreurs se relevèrent lentement, leurs regards interrogateurs se redressèrent vers cieux, puis balayèrent le paysage secoué par le blizzard.
-Là ! S'exclama l'homme au visage peinturluré de bleu, en indiquant un point en bas de la colline.
-C'est ce vieux fou... Devina le second humain à la peau claire, presque transparente. Il recommence... Ces invocations sont de plus en plus fréquentes, je n'aime pas ça.
-Il doit y avoir une raison, jamais il n'a convoqué les éléments aussi souvent. Allons le voir.
Aussitôt dit, aussitôt fait. Nos deux humains dégringolent le long de la butte où ils étaient perchés, à grandes enjambées, leurs pieds nus rebondissent avec légèreté sur l'herbe haute et fraîche. Quelques gouttes de pluie commencent à tomber des nuages alourdis, et viennent s'écraser sur leur peau badigeonnée de peinture. Ils se dirigent vers un homme au milieu du vallon. Ce dernier est aussi maigre qu'un loup n'ayant pas mangé durant des jours, ses cottes saillantes structures un torse frêle, lui aussi orné de volutes et de symboles bleu, semblables à ceux que portes les deux hommes qui arrivent à sa hauteur. Une barbe de plusieurs mois trône sur son visage, ses yeux gris sont emplis d'une excitation inquiétante, sans pareil, alors que sa bouche entrouverte murmure imperceptiblement. Son visage est levé en direction du ciel, les gouttes de pluie qui se font plus nombreuses perlent sur son visage dément. Les muscles de ses bras écartés sont tendus, et lentement, commencent à trembler, de plus en plus fort, jusqu'à ce que son corps entier soit secoué de spasmes. Ses jambes décharnées peinent à le maintenir debout.
Les deux hommes près de lui se reculent légèrement en voyant ce spectacle.
-Vertueux Druide... Que faites-vous ? Hasarde le plus courageux, en se protégeant les yeux du vent avec son bras.
Le sorcier ne répond pas. Ses paupières closes sont agitées de convulsions. Le vieil homme semble être dans un état de transe absolue. Ses deux interlocuteurs se jettent un regard curieux, ne sachant qu'en penser. Le plus impatient hausse les épaules, et s'avance vers le prêtre sans prêter attention aux éclairs qui fendent à présent le ciel en deux.
-On te parle, vieux f...
A peine avait-il posé sa main sur l'épaule aux os saillants du vieillard qu'il fut projeté à plusieurs mètres de lui, suivit par une intense traînée de fumée noire. Il atterrit lourdement, et mollement sur la terre détrempée transformée en une boue collante, carbonisé, mort. Son compagnon de jeux ouvre de grands yeux épouvantés, ses dents grincent alors que sa mâchoire se serre fortement d'effroi. Il pose son regard craintif sur le druide qui s'est tourné vers lui, les yeux lançant des éclairs, le gris de ses pupilles ont pris une couleur bleue électrique. Tremblant, ruisselant de crachin, l'humain en face de lui tombe à genou, ses mains se joignent et se crispent l'une contre l'autre, s'élevant vers le prêtre.
-Ne me tuez pas, Grand Sage, Ô Vénérable Druide... Je suis à votre service...
-Relèves-toi, voyons, c'est moi. Depuis quand tu te prosterne de la sorte ? Répondit avec assurance le vieil homme à la voix flûtée, contre toute attente en vue de son état quelque peu sombre. Va me chercher de quoi écrire et appelle les papillons de nuit. Les éléments la demande...
***
Le temps était abominable. Il pleuvait des cordes, et malgré son capuchon posé sur son crâne, Eigoel était trempée jusqu'aux os. Ses bottes étaient recouvertes de fange, ainsi que son pantalon jusqu'aux genoux. Tapie dans les feuillages d'un haut buisson, elle guettait silencieusement un campement à quelques pieds de là, calme et mouillé. Cela faisait des heures qu'elle était là, à attendre, aucune âme qui vive n'était sortie d'une des nombreuses tentes depuis que la pluie s'était mise à tomber, et cela accablait la jeune humaine d'un ennui mortel. Les heures passèrent, et l'averse se transforma en un crachin passager, mais provocateur. L'estomac d'Eigoel grogna, elle n'avait pas mangé depuis des heures. L'humaine frappa sur son ventre afin de le faire taire, se faire repérer par sa faim serait vraiment idiot. Une silhouette sortie d'une des tentes. C'était un homme vêtu d'une armure légère en cuir, soigneusement réparée ici et là, témoignant de multiples affrontements. Une très longue cape noire au large capuchon traînait dans les flaques. Il regarda alentour, jaugeant la pluie avec une moue dégoûtée sur le visage. Les effluves de terre imbibée d'eau stagnaient dans l'air épais d'humidité. Personne d'autre ne pointa son nez hors des tentes. L'homme seul se dirigea vers un tonneau et l'ouvrit pour remplir une grosse carafe d'étain qu'il tenait d'une main. Le liquide blond légèrement écumeux s'infiltra rapidement dans le récipient, mais dans un sursaut, la main qui le tenait lâcha prise, et la cruche coula dans la barrique, créant un bruit sourd et étouffé en touchant le fond. Le corps sans vie s'écroula. Eigoel ramassa rapidement le corps par les chevilles et le tira derrière les buissons. Le crachin dilua le peu de sang qui avait eu le temps de se déverser dans la boue. La jeune femme vola les vêtements de sa victime, et s'en habilla. Une fois déguisée, elle prit soin de dissimuler le corps gisant sous une montagne de terre, et se tourna à nouveau vers le campement vide. La luminosité du soleil était atténuée par les nuages gris, rendant le paysage triste. Le rassemblement allait sonner, elle le savait. Les jours passés à observer la vie du campement portaient à présent leurs fruits...
Au bout de nombreuses minutes, un homme à l'air important sortit de la plus imposante des tentes. Son visage était balafré de toutes parts, un oeil lui manquait, et un large bandeau noir lui enserrait la tête. Il était vêtu d'une armure en acier noir, très près du corps, et une épée à deux mains lui battait la cuisse au rythme de ses pas. Son regard froid et obscur serpenta sur les nombreuses tentes. Il prit une inspiration, soulevant son lourd poitrail, et beugla :
-Rassemblement !!!
En un éclair, les maisons de toile se vidèrent. Une foule d'hommes et de femmes en cuir avec de longues capes noires s'amassa autour de l'individu en armure. Maintenant... Lentement, et avec la plus grande discrétion, Eigoel sortit de sa cachette feuillue et se mêla à l'attroupement, se fondant dans cette masse dense. Des chuchotements parcouraient l'assemblée, mais lorsque celui qui semblait être le chef leva la main, tous se turent. Un silence pesant régnait à présent, tandis que l'homme en armure noire jetait un regard hautain à ses mercenaires autour de lui. Puis, sa voix tonna :
-Messieurs, Femmes, Il nous demande. Une armée lui fait du tord, rien de bien méchant, certes, pas plus d'un millier d'hommes. Mais s'en est assez pour déranger notre Maître. Vous devrez donc infiltrer cette armée, et tuer ses soldats un par un avant, et pendant le combat qui va opposer Sa Seigneurie à son infâme ennemi. Soyez net et précis ! Je veux quelque chose de propre ! Il n'y a pas de héro parmis nous ! Soyez sans pitié. Il se tourna vers un petit homme robuste qui avait prit place juste à côté de lui et le désigna de son gant noir. Le caporal Khéla va distribuer à chacun un parchemin avec les indications quant à l'emplacement de l'armée.
Sur ces mots, le commandant tourna les talons, et fendit la foule en deux, regagnant sa tente d'un pas rapide. Le caporal commença sa distribution, et les premiers servis s'éloignèrent rapidement dans la forêt en lisant le parchemin. Quand elle reçue enfin le sien, Eigoel s'éloigna à son tour entre les troncs serrés des résinifères. Ses yeux glissèrent rapidement sur le manuscrit, à la recherche de la signature de leur dit Maître. Un sourire s'afficha sur ses lèvres, sous son capuchon sombre... Valefor. Même si ce n'était pas son vrai nom, mais espérant que ce le soit, elle avait une piste. Son travail d'observation n'avait pas été vain. Elle avait prit son temps, et n'avait pas trébucher. Le travail n'était pas fini, loin de là, mais elle avançait...
Alors qu'elle sortait de la forêt en direction de la taverne, après avoir fait une pose pour se rhabiller convenablement, un détail dans le ciel attira son attention : Un tout petit nuage très épais se dirigeait tout droit vers elle. L'humaine plissa les yeux, comme pour mieux voir, et se rendit compte qu'il s'agissait en fait d'un nombre important d'énormes papillons de nuit velus, qui portaient avec leurs minuscules pattes un parchemin enroulé. Ce dernier tomba à ses pieds, dans la boue. Elle se baissa pour le ramasser en bougonnant. Son regard se posa sur le parchemin, puis sur la taverne non loin... Elle avait bien le temps d'aller boire un coup avant de le lire, ce ne devait pas être urgent.
Loxias The Dark Lord | 01/06/08 17:27
Au sein de ce récit fort intéressant, tant du point de vue artistique que fantastique, l'univers celtique, druidique, y est très bien rendu, en définitive.
Tout cela laisse présager une suite d'une grande saveur littéraire.
Je l'attends d'ailleurs avec impatience. 
