Forum - Les Enfants de Bodom [3. Downfall]

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Loxias | 24/07/08 06:11

Les Enfants De Bodom

Troisième partie - Downfall

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Le rescapé ignorait où il se trouvait, dans quelle pénombre il avait été plongé...
À vraie dire...
Il méconnaissait tout de sa situation précaire...
En fait, et pour tout dire...
Il ne se souvenait de rien...

Un chemin tortueux s'ouvrait devant sa silhouette éthérée. Sur toute la longueur indistincte, et aussi loin que pouvait porter le regard de l'aveugle, ce parcours ténébreux présentait nombre d'aspérités infranchissables. Une seule voie se perdait vers l'horizon déchiré par le champ de ronces, où commençait le ciel de jais n'existant pourtant. Une ultime alternative s'offrait à lui alors que derrière son entité fantomatique, la route mal dessinée sombrait dans la noirceur impénétrable du néant, à chaque pas de cette marche mortuaire que le voyageur solitaire exécutait.

Le chaos de son esprit tourmenté ne laissait présager un quelconque dénouement heureux, dans cet impardonnable univers d'inconsistance glaciale. L'espoir avait déserté son coeur. Sa raison déraisonnée l'avait abandonnée. La terre de tristesse et de regret s'étendait infiniment, marquée du sceau de la souffrance, en se liant sensuellement au désespoir illimité d'un égarement perpétuel. L'amour, la hargne et la jalousie, délicats fruits du mépris, s'étaient intimement conjugués pour sommer tout vivant d'abandonner leur futile résistance existentielle, de jeter les armes brisées, là où tout espoir s'avérait être dérisoirement vain.

Errant dans ce désert psychotique, désorienté au sein de cette prison mentale, indubitablement exempte de tous points de repaire possibles ou imaginables, il avançait à tâtons, rampant inconsciemment, en restant pourtant conscient de son équilibre profondément ébranlé. En effet, le mortier de sa pensée tourmentée s'effritait sous les rafales de vent incessantes de l'échec humain. Avec le temps et les intempéries de la vie, les pierres instables du fondement de son âme en ruine s'étaient affaissées, s'étaient finalement écroulées, reposant éparses, sur les landes desséchées de son existence infertile, telles d'innombrables pierres tombales reposant en paix, éternellement.

Incohérent, il ne pouvait que l'être, dans ce monde d'antimatière, et matière à ébranler l'ensemble des malheureux mortels, cette masse de larves pathétiques, ridicules pantins suspendus dans le vide de l'immatériel, dans le réel comme dans l'irréel. Pauvre loque confrontée à elle-même, confrontée aux pires atrocités, le rêveur désillusionné avait sombré. Cadavre immuable condamné à vivre, désormais privé de tous sentiments, il continuait de se traîner sans véritable raison d'être vers l'avant, toujours, toujours plus ténébreux, embrassant doucement de ses lèvres avides l'éclat tamisé d'une pénombre accueillante pour tous les suppôts de la Mort...

Le chemin mal dessiné de cette jungle de l'esprit humain menait au coeur des plus immondes contrée, territoires encore inviolées pour la majorité, pour la plèbe la plus insignifiante. À force de pas mal assurés sur le gravât poussiéreux, après des années, des siècles de perdition morale, et en perpétuelle lutte contre l'ennemi invisible -toutefois inexistant dans ce désert balayé par d'incessantes bourrasques d''illogisme - le marcheur courroucé s'était finalement retrouvé dans une infime clairière, timidement lovée au sein de l'inhospitalière forêt d'épines. Un gigantesque Dôme sans nom était alors apparu, perçant les cieux aussi noirs que la pensée des Poètes Maudits. D'étranges révélations lui apparurent, de manière sporadique. Sans vraiment savoir pourquoi, il comprit que son voyage comatique tirait lentement à sa fin... Sans équivoque, la Folie avait atteint une profondeur encore plus saisissante...

La clameur sourde provenant de la nécropole illusoire intimait à l'élu déchu de gravir la volée de marches qui s'élevait devant lui avec grandeur et prestance. L'odeur pestilentielle de la mort émanait de la coupole démoniaque. Dans toute sa splendeur nocturne, inquiétante, le portail représentait désormais la dernière destination, l'accomplissement final de la procession funèbre. L'escalier vers le paradis s'offrait sombrement à son âme souillée. L'homme au teint laiteux ne laissait paraître aucune émotion sur son visage translucide, impassible. Il ne craignait nullement la délivrance ultime. Aussi, déterminé et avec une nouvelle vigueur, il gravit énergiquement les paliers immenses du promontoire aux dimensions incommensurables, le rapprochant toujours davantage de son Destin. Laissant docilement les voix rauques résonner dans son crâne douloureux, une voie nouvelle, un nouveaux parcours lui avait été dicté.

Les larges portes de fer ouvragées s'ouvraient sur l'intérieur d'une cathédrale richement décorée en ornements sublimes. Les ossements reliquaires de quelques créatures titanesques soutenaient la structure immuable de l'église maudite, telles les colonnes de marbre des anciens temples païens. Nombreux, les vitraux ternes ne laissaient pourtant passer la lumière, de toute manière absente, dans ce monde de terreur. La suie des flammes de l'Enfer recouvrait d'ailleurs l'ensemble des surfaces aux couleurs fades du lieu de recueillement démonique. Les chants grégoriens louangeant l'arrivée prochaine du Messie impie s'harmonisaient au résonnement sonore des pas du pèlerin martelant frénétiquement la surface de pierre noirâtre. Irrémédiablement, se dessinait dans l'ombre du sanctuaire damné les contours de l'autel faiblement éclairé par quelques timides bougies à la clarté vacillante, déclinante.

Partout autour du visiteur solitaire, se dressaient des squelettes au regard vide, ainsi que d'innombrables goules rampant sur le sol de magma froid. Les craquements des os et les sapements affamés des êtres trépassés ne troublaient sa concentration désormais inatteignable. S'accrochant férocement, futilement, à ses bras puis à ses jambes, les morts ne parvenaient à freiner son zèle maintenant inébranlable. Sa chair tendre cruellement lacérée et entaillée par les griffes tranchantes des terribles démons attroupés laissait couler d'abondants filets de sang se répandant sur la cendre. Alors que les morts-vivants léchaient langoureusement les traînées de gouttelettes sanguines, le jeune humain atteignait enfin le bas du pallier permettant d'accéder au coeur du choeur. Intempestif, il relava promptement la tête, en agitant le large capuchon voilant partiellement son visage livide, puis fixa froidement son regard animé d'une force qu'il n'avait plus eu depuis longtemps vers l'autel cérémonial.

-Salutations, vénérable hôte de ces lieux!, lança d'une voix portante le mortel fièrement dressé. Je me nomme Nils Gustafsson, continua-t-il, sans vraiment attendre de réponse.

Gêné par les inquiétants murmures s'amplifiant dans son esprit assaillit, envahi, il haussa encore le ton pour faire taire ces psalmodies énigmatiques d'une volonté bien supérieure à la sienne.

-Je viens revendiquer mon trône, et somme votre puissance inégalée de m'accorder sa totale dévotion!, hurla-t-il, tentant de couvrir le mugissement du vent s'engouffrant par le portail principal, puis les cris survoltés des créatures de la nuit se massant de nouveau autour de sa solide stature, en passant avidement leurs langues putrides sur les plaies sanglantes de l'héritier.

Au haut du promontoire dominant la cathédrale infernale, les volutes noires d'un nuage opaque se formèrent prestement, prenant lentement les formes indistinctes d'une silhouette ténébreuse. La nuée finit par se dissiper en laissant apparaître dans un climat d'horreur la Faucheuse, appuyant paresseusement le manche de son immense faux sur l'épaule.

Les panneaux métalliques de l'entrée se refermèrent soudain avec fracas puis un ricanement franc se répandit en écho dans le dôme clos.

-Ma totale dévotion, souhaites-tu, Ô grand roi?, lâcha ironiquement la Mort, avec toute la splendeur de sa noirceur.

Un autre éclat de rire méchant s'en suivit, excitant encore davantage les morts-vivants qui continuaient de claquer sauvagement des dents.

-Pour tout dire, j'apprécie que tu aies ainsi suivi mes indications, vraiment, et ce avec le plus naïf aveuglément. Enfin, pour te remercier, je revendique dès lors ta dérisoire enveloppe charnelle, souffla avec indifférence la grande collectrice.

-Nous pourrons désormais accomplir de grandes choses, ensemble. Aussi, je t'accorde la mémoire, afin que tu te rappelles avec quelle minutie tu as accomplie ta première tâche, en mon humble nom, poursuivit en quelques sifflements aigus la moissonneuse.

-Allez, ne perdons plus de temps, fidèle serviteur, conclue doucement l'entité d'outre-tombe.

L'homme aux pieds des marches finement taillées dans la lave d'une couleur d'ébène rayonnait lugubrement. Son sourire flegmatique ne disparut pas lorsque l'amas de fumée fonça rageusement sur lui, avant de s'introduire brutalement en son être, pour y rester à jamais...

... Tout devint noir, ou du moins, la noirceur atteignit alors son paroxysme...

Le rescapé ignorait toujours dans quelle pénombre il avait été plongé, lorsqu'il se réveilla enfin, dans un lit d'hôpital de Bodom...
Mais maintenant, du moins...
Il se souvenait de tout...
Un sourire continuait d'illuminer son visage calme...

. . .

Saga aussi disponible dans la bibliothèque de l'Ordre Lux Ferrer Cerberus

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Edité par Loxias le 24/07/08 à 14:15

Vadim | 28/07/08 18:55

Avec cette Saga, tu prouve encore une fois ton talent pour l'écriture. Les images que tu crées en écrivant sont fabuleuses, tellement qu'elles donnent presqu'un mal de tête rien que de les imaginées :D. Surtout lâche pas :D.

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