Forum - La quête des légendes : La mer, 1/4 : Chanson d'automne.

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Celimbrimbor | 14/10/08 00:53

La mer. Que je vois danser. Le long des golfes clairs. A des reflets d'ichor doré. Et des membres flottent sur les crêtes des vagues. Et quelques corps aussi. Ils auraient dû m'écouter. Mais je projette trop loin.

Le feu n'avait rien donné. Enfin, rien... Il n'avait pas été suffisant pour mon dessein. A moins que je n'ai pas été suffisant, mais cette hypothèse était, dès l'origine, écartée de l'équation. Le feu n'avait pas suffit à déclencher ce que je cherchais à déclencher, et une nouvelle fois, ma construction avait rejoint le sol et s'était éparpillée en petits éclats douloureux. Alors, à nouveau, j'avais quitté ma demeure, repris la route, en quête, une fois de plus. J'avais déjà demandé l'avis des plus primordiaux êtres du feu, quoi d'étonnant à ce que je me tourne alors vers ceux de la mer à présent.

La vie y était née, dans un gigantesque hasard, voilà des milliers de milliard d'années. Grâce à une combinaison insensée de coïncidences. Grâce à un environnement propice aussi sans doute. Un bouillon primal. Une soupe primitive, si je devais reprendre les termes que les chercheurs avaient consacré dans de nombreux ouvrages. L'eau, alors, devait avoir gardé le souvenir de cet état. Sans doute pas les élémentaires, mais les profonds. Ceux qui dorment dans les abysses les plus obscurs. C'est à ceux-là que j'avais décidé d'avoir affaire.

Je m'étais transporté d'un sort distrait aussi prêt du littoral et, perché sur une falaise crayeuse, la lune pour seule témoin, j'avais examiné les alentours.

La mer est grande. Très grande. Il est même impropre de parler de mer : ici, c'était le début, ou la fin, d'un océan. Je n'avais envie de perdre mon temps à balayer toutes les profondeurs au hasard. Cela m'aurait pris trop de temps. Et je n'avais pas l'intention de me plonger en concentration intense. La vulnérabilité, toute relative, qui me saisit alors, ne m'est jamais agréable.

Et puis mes sens repérèrent un village un peu plus loin au Sud, à l'embouchure d'un fleuve. Un clignement d'yeux plus tard, j'étais devant les portes de cette ville marchande, aux murailles imposantes.

Du haut de leur surplomb d'une dizaine de mètres, les gardes me toisaient sans vraiment comprendre ce qu'il s'était passé. Un instant je n'étais pas là, l'autre, devant eux, à leur pied. A travers les murailles de pierre, je voyais l'activité qui y régnait malgré l'heure tardive. Les femmes de petite vertu amusaient des marins aux bourses pleines. Des tires laines, d'ailleurs, les en délestaient aussi souvent et discrètement que possible. Plus loin, encore, sur la jetée, l'un d'eux se faisait envoyer à l'eau. Pas assez discret.

J'apparu sur la place centrale de la ville, sans que personne ne me remarque. De toute façon, elle était déserte. Ce qui servait mes plans. C'est une ville comme il en est tant près des océans. Une grande ville côtière, avec ce que cela implique de taverne, de bouge, de bordel, mais aussi de grands axes, d'infrastructures.

C'était une jolie ville.

Même, une très jolie ville. Un endroit rêvé pour installer mon campement pour l'instant. J'ai donc repéré le bâtiment qui semblait être la mairie, et j'y ai convoqué le maire séance tenante.
C'est à cet instant que j'ai compris que ce n'était pas une petite démocratie comme j'en connaissais tant. Et également que les habitants n'étaient ni des elfes, ni des orcs, ni des nains, ni des humains, mais autre chose. Cet autre chose, furieux d'avoir été dérangé alors qu'il dormait (je l'avais réveillé d'un sort léger) déboulait dans son bureau, hache et masse d'arme à la main, avec la vive attention de s'en servir contre moi.

Je lui ôtai et le collai contre le mur.

« Je souhaite m'établir ici. »

Seul un grognement incertain et peu poli me fut adressé en réponse.

« Je souhaite m'établir ici et diriger votre cité, ainsi que les efforts de vos marins pour mes recherches. »

Le grognement, rageux cette fois, n'avait rien que d'agressif. Comme les gestes obscènes qu'il m'adressa.

« En parlant de vos marins, fis-je en m'installant dans le fauteuil pas trop inconfortable, où sont-ils tous ? Je n'en ai vu que peu dans vos murs. En mer ? »

Je relâchai l'étreinte du sort et le nerlk s'effondra au sol. En se relevant, ses yeux haineux me dévisageaient horriblement, des envies de meurtres perçant sous son regard.

« Ils reviendront bientôt, mais vous ne les verrez pas, sale chien ! »

Il se lança sur moi. Sans arme. Sans finesse.

Sans espoir non plus, puisqu'après un pas, il repeignait les murs de son bureau.

Il avait dit bientôt. Je décidai d'hâter leur retour.

De retour sur la grande place, je tournai mon regard délicatement vers les murailles. Personne n'entendit les gardes s'effondrer, mort soudainement, sans raison apparente. Par contre, je sais que tout le monde remarqua l'explosion de la caserne de la ville, ainsi que des divers postes de guet intra muros.

Les réjouissances commençaient à peine. Dans les bordels, au hasard, certains marins voyaient leur peau fondre comme cire au feu, et des cloques immondes et purulentes apparaître un peu partout sur leur corps, les démangeant comme mille démons assoiffés de sang. Les putains se flétrir d'abord, pour se recroqueviller ensuite, et cracher entrailles, poumons, coeur par leur bouche édentée. D'autres prirent feu, sans s'en rendre compte, et coururent en tout sens, propageant l'incendie de place en place. Ceux qui eurent le plus de chance, finalement, furent ceux qui dormaient déjà à ce moment là. Leurs maisons s'effondrèrent alors qu'ils étaient déjà morts, dans leur sommeil, la gorge tranchée par leur propre main.
D'autres explosèrent, volant un peu partout, maculant personne, sol et mur de sang et de viscères diverses. Le chaos était total et personne n'avait encore réussi à réagir intelligemment, tout le monde cherchait à fuir, courait en tout sens. Je continuai mon oeuvre. Jamais, de mémoire de médecin, on ne vit un tel nombre de descente d'organes, tant chez les hommes que chez les femmes, et nombreux furent ceux qui se prirent les pieds dans leur propre intestin et le déchirèrent eux-mêmes en se débattant pour s'en sortir. Les hurlements étaient un son cocasse tant ils étaient cacophoniques et disparates.

Finalement, au bout de quelques minutes d'une folie improbable, quelques valeureux sots prirent les armes et cherchèrent la cause de leur malheur. Ils ne mirent que peu de temps à la découvrir. Sans sourire, je les regardai venir, avant de m'éloigner d'eux à petits pas, en direction du port. Ils me suivirent en courant, et arrivèrent, pour ainsi dire, avant moi sur la jetée.

Ils se retournèrent, étonnés de ne m'avoir pas dépecé sur le chemin quand ils m'avaient dépassé, mais aucun ne s'interrogea sur la nature de mes pouvoirs. L'assaut fut pathétique et débandé en un instant, quand l'épée ou le sabre du compagnon d'arme s'enfonça dans le sein du frère.

Ils se massacrèrent les uns les autres, sans pouvoir y rien faire, sous mes yeux, sachant pertinemment ce qu'ils faisaient. Leurs esprits se révoltaient, leurs consciences se tordaient de douleur, mais je n'en laissai aucun perdre connaissance. Jusqu'au bout, ils furent présents à leur action.

Il n'en resta plus qu'un, qui découpa les cadavres de ses camarades en morceaux, parfois avec mon aide quand il prenait trop de temps, souvent non, et les balança à l'eau. Je lui rendis la maîtrise de son corps et l'observai avec attention. Il ne se suicida pas. Il n'essaya pas non plus de venir me tuer, sachant son entreprise vouée à l'échec. Non. Il resta là. Debout. Droit dans le sang. Taché d'innombrables liquides corporels étranges. Sans savoir que faire.

Je dois avouer que sur le moment, une hésitation me saisit. Devais-je finir moi-même le travail ? Où le laisser en vie ? Pendant que je réfléchissais, je lui fis incendier toute la ville, m'occupant moi-même, d'un sortilège rapide, de ce qu'il ne pouvait techniquement pas brûler. Et puis, quand il revint vers moi, l'air hagard, perdu, mais vivant, je lui redonnai sa liberté, sans plus me préoccuper de lui, et me tournai vers la mer. Vers l'océan.

Il avait décidé, finalement. Il se trancha la gorge lui-même avant de sauter dans l'eau pour s'y noyer, en hurlant comme un dément. Je le changeais en plomb avant qu'il ne touche le fond, pour m'assurer qu'il ne survive pas.

Cette statue est maintenant derrière moi, affreuse et distordue. Elle va être la première chose que vont voir les marins. La première chose après moi, en fait, et l'incendie qui dévore la ville et me sert de fanal pour attirer ces papillons de nuit. Ils ne tarderont pas.

La mer. Que je vois danser. Le long des golfes clairs. A des reflets d'ichor doré. Et des membres flottent sur les crêtes des vagues. La mer, les soirs d'été...

Les nefs noires arrivent.

Baramir d'Eckmöl | 14/10/08 10:40

Sourit doucement en lisant.
Comme il est amusant de voir que la destruction attire les Nerlks.

Peut-être réussirez-vous votre projet, mais j'en doute. Vous cherchez à obtenir ce qu'un seul être au monde possède. Et un être immensément puissant mais inconscient.

Sourhnak | 14/10/08 11:33

La mer des reflets changeants
Sous la pluie

La mer au ciel d'été
Confond ses blancs moutons
Avec les anges si purs
La mer bergère d'azur
Infinie

Voyez près des étangs
Ces grands roseaux mouillés
Voyez ces oiseaux blancs
Et ces maisons rouillées

Le mer les a bercés
Le long des golfes clairs
Et d'une chanson d'amour
La mer a bercé mon coeur pour la vie.

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