Forum - La quête des légendes : La mer, 3/4, "Au fond des océans."

Celimbrimbor | 05/12/08 18:41

La tempête fait rage sur la mer. Mais ce n'est pas cela dont les marins ont le plus peur, au contraire. Sur le pont supérieur, le mage est debout, le front offert aux intempéries qui lui battent le visage. La pluie tombe avec fracas sur les planches de vois qui chaque fois semblent vaciller sous les coups de boutoir des éléments déchaînés.

Ils ont fait voile plein Nord ce matin à l'aube, après une journée de repos. Pourtant aucun des hommes n'est vraiment frais. Les souvenirs, les images du village sont encore sur leurs yeux ou bien dans leurs esprits. Seul un esprit dément avait pu accomplir cela, seul un démon en avait le pouvoir, et ce démon se tient sur leur précieux navire.

Etrangement, aucune intention de meurtres ne sourdait de l'elfe planté là, défiant les éclairs. Au contraire, même, cet être semblait d'un calme inquiétant. Depuis leur départ, c'est lui qui les guidait. Et ils pouvaient en lui être reconnaissants. Il les avait fait passer et découvrir des courants rapides, des vents nouveaux et des chemins inconnus. Il cherche quelque chose, mais quoi ?

Le capitaine du vaisseau porte son regard au loin et son inquiétude augmente. Le ciel est encore plus noir, les nuages plus épais et le vent plus fort encore. Pire que tout, son intuition lui crie que les vagues sont traîtresses là-bas. Il porte ses yeux sur l'inquiétant personnage au milieu du pont.

« Ne déviez pas d'un pouce. »

La voix est claire et audible malgré les tonitruantes exclamations de la nature. Plus glaçante et plus terrifiante que tous les dangers que l'univers peut receler à cet instant.

« Il n'arrivera rien à votre vaisseau tant que je serai à son bord et que vous m'obéirez. Est-ce suffisamment clair, capitaine ? »

Le nerlk ne veut pas tenter de pousser plus loin. L'être paraît suffisamment puissant pour pouvoir atteindre ce qu'il cherche tout seul. S'il prend un navire, c'est qu'il en a besoin. Il ne peut donc pas le détruire, en théorie. Dès lors, l'échange pourrait être à double intérêt.

Une lame venant de nulle part se plante sur la barre, entre deux de ses doigts.

« Vos pensées ne me plaisent guère, capitaine. Faîtes simplement ce que je vous dis, et vous serez largement récompensé. »

Le capitaine se tait, il ne sert à rien de discuter avec leur bourreau. Et puis il a besoin de toute sa concentration pour éviter que le navire de perde sa route ou ne soit détruit par les assauts des vagues. Le chemin est dangereux, et la trombe qui se forme un peu plus loin dans le ciel ne lui dit rien qui vaille. Pour concurrencer les cris déchirants du vent, il hurle vers la silhouette qu'il aperçoit à peine depuis que la pluie a redoublé.

« Nous ne pourrons pas passer !

-Nous sommes passé. »

Le capitaine ne comprend pas, et lève les yeux. Où est la tornade qui se formait à l'instant ? Où la pluie incessante et violente ? Son être tremble de comprendre ce qu'il vient de se passer, et c'est avec réticence qu'il consent à regarder derrière lui. La vision d'apocalypse qui le saisit, pleine de tempête, de rage et de trombe, le fait se détourner instamment. Il a peur. Comment ce type a-t-il pu déplacer le navire sans que cela soit perceptible, voilà ce qu'il pense. Sa peur est perceptible, comme l'est celle de tout l'équipage.

Mais peu importe. L'elfe sait où il veut aller. Aussi le capitaine resserre-t-il les mains sur la barre et espère que ce fou ne les tuera pas tous. De toute façon, ils se vengeront, ou mourront en essayant. Il ne sera pas dit qu'un être aura détruit leur village impunément.

Cependant, petit à petit, le temps change autour du navire, et l'atmosphère se fait moins oppressante. La pluie se change en embruns, le vent en doux murmure et finalement le calme s'installe sur une mer d'huile, tandis que loin derrière la fin du monde se déchaîne.

« Devons sortir les rames, Monsieur ? Ose le capitaine.

-Inutile. Taisez-vous, simplement. »

L'elfe écoute, semble-t-il, quelque chose qu'il est le seul à entendre. D'un sort rapide, il étouffe les craquements et les sons du vaisseau. Soudain, les respirations des marins résonnent comme des coups de tonnerre dans le silence apaisant.

L'écoute se fait plus attentive, de toute part. N'y a-t-il pas un son qui s'élève de la mer, comme une musique, une danse des profondeurs ? Les légendes des océans resurgissent dans les esprits des marins, les fables d'êtres attendant au fond, rêvant dans des cités antiques submergées, des monstrueuses créatures capable de dévorer des navires d'un seul coup.

Je les éteints. C'est le meilleur moyen pour moi de m'assurer qu'ils ne vont pas devenir fous. Ils ne sont pas prêts à écouter cette chanson. Je la savoure un instant encore puis, d'un bond gracieux,

Je plonge.

Au fond des océans, trouverais-je ma réponse ?