Forum - De la guerre.
Index des forums > Rôle Play > De la guerre.
Celimbrimbor | 11/12/08 12:58
Parmi toutes les horreurs que peut bien compter ce multivers, la guerre est celle que l'homme, et tous les êtres doués de conscience, pratique avec le plus d'âpreté, de rigueur et surtout d'opiniâtreté. Il semble même qu'il ne puisse pas se passer des combats, de l'exaltation des batailles, de la renommée des vainqueurs et de la détresse des vaincus. Dès lors, la guerre est destituée de son statut symbolique et exceptionnel. Elle devient un divertissement identique aux autres, pas plus sacrée qu'une partie de carte dans la taverne du cru. A l'exemple des combats de gladiateurs qui, faisant de la lutte à mort un objet de jeu, attirèrent moult seigneurs, la guerre se transforme à son tour en aimant à paltoquets et freluquets d'extractions diverses, dont le seul et unique point commun, bien souvent, est une besoin exacerbé de gloire, et pratique alors la guerre sans besoins.
Pourtant, la guerre n'est pas un jeu. Que répondre alors aux foutriquets gémissants de s'être fait étriller ?
Il n'y a pas de guerre juste. Ce constat établi, il devient possible de comprendre la nécessité et les nécessités de la guerre pour finalement expliquer alors les recours de la guerre.
Il n'existe pas de telle chose qu'une guerre juste. Il serait simplement stupide de le croire, et cela tiendrait de la gageure que de le démontrer.
Parce qu'elle oppose toujours deux personnes, deux entités, deux pays, deux nations, au moins, constamment persuadés l'un et l'autre d'être dans leur droit le plus strict, le résultat de la guerre (c'est-à-dire un vainqueur et un vaincu) est toujours injuste, ramené à soi. Effectivement, le vainqueur considérera que la justice a été accomplie puisqu'il a gagné. Mais ceci seulement a posteriori. Pendant le combat, bien malin serait celui qui prédirait de quel côté se tiendra la justice, si jamais tel concept existe véritablement. La guerre, comme étant la confrontation de deux intérêts divergents, ne peut pas être juste. Non plus que justifiée de façon objective.
De fait, elle est l'affrontement de deux, ou plus, subjectivités. Deux avis contraires ou simplement un peu différents qui ne cherchent plus à se convaincre, mais à s'exterminer. L'exemple de Certadhil est explicit : une idée du « mal » et une idée du « bien » se sont affrontées sans jamais chercher à discuter et à chercher une entente. Entente prouvée possible par la force de l'expérience : les Morts-Vivants sont bien présents sur Daifen et ils ne sont pas les plus nuisibles des voisins.
Enfin, la guerre spolie constamment le droit de quelqu'un. Que cela soit celui des paysans, conscrits de force dans les armées du seigneur et obligés d'abandonner leur terre et leur moisson pour aller se faire moissonner dans une guerre qui ne les concerne pas, ou celui de la nation perdante, qui se retrouve vouée aux gémonies et à l'oubli. Il serait impossible de tenir le compte des civilisations plus ou moins glorieuses ayant disparu par cette faute. Le simple fait que a guerre établisse une différenciation de type « maître » « esclave » fondée sur un rapport de force suffit à montrer qu'elle n'est pas chose juste.
Ainsi, elle apparaît comme injuste dans son essence même.
Pour tout injuste qu'elle est, la guerre n'en apparaît pas moins comme nécessaire.
C'est cette étrange nécessité qu'il faut évoquer à présent.
A l'origine, la guerre était un état plus ou moins sacré, en ce sens que les communautés s'affrontaient épisodiquement, autour d'enjeu d'importance : qui aura le droit à ce bout de forêt, qui aura le droit de vivre dans ses mines, qui est le détenteur du seul vrai et unique dieu, qui détient la seule et unique vérité sur le monde et ses à-côtés marrants, qui a la plus grosse et ainsi de suite. La guerre ainsi était uniquement épisodique, rare, et de faible ampleur, toutes proportions gardées, évidemment. Il s'agissant soit de défendre soit d'étendre ses intérêts, mais jamais d'aller plus loin. Dans un certain sens, il était question de simples querelles de bon voisinage, et la paix était toujours au bout de cette action.
Comparé à cette antique situation, le tableau à aujourd'hui incroyablement changé. Plus de terres en paix. Plus de seigneurs en paix. Plus de paysans en paix. Plus de paix, et pire : plus d'intérêt pour la paix. Simplement parce que la paix n'apporte pas de gloire. Seule la guerre et ses cicatrices, ses récits, apportent grandeur aux êtres, de nos jours. Il s'agit ni plus ni moins d'une course à la gloriole la plus injustifiée. La reconnaissance ne s'acquiert qu'en humiliant son adversaire, en l'abattant. Et de préférence en y mettant les formes : sans trahir par exemple. D'où l'apparition d'un code de l'honneur complètement imbécile dont il sera question plus loin.
Ce changement provient d'une évolution de la nécessité de la guerre. Celle-ci ne l'est plus, tout simplement. Les races ne se disputent plus quelque suprématie que ce soit, et cohabitent avec bonheur dans le monde Daifen. Les gens, à défaut de se respecter, se côtoient dans la bonne volonté. Corollaire lamentable à ce relatif état de paix : les seigneurs s'ennuient. Il leur faut un divertissement. L'exutoire de la guerre est alors tout désigné. Permettant de se divertir, de changer de décors par rapport aux salles de bal, d'apporter un peu d'exaltation, et surtout de frimer devant les camarades, la guerre est idéale pour permettre à des flots entiers de testostérone ou d'endorphine de se déverser librement dans le corps humain. En outre, par la possibilité de rencontrer ses amis sur le champ de bataille et de leur faire goûter l'amer goût de la défaite, la guerre devient encore plus amusante. Il s'agit d'humilier, rabaisser, détruire son adversaire.
Les êtres de ce monde ne font plus la guerre par obligation, mais par amusement. Et ce changement est la pire chose qui pouvait arriver.
Elle existe pourtant, et ses exactions sont nombreuses. Il faut s'intéresser aux outils de la guerre désormais.
Essentiellement injuste, la guerre repose sur des mécanismes d'humiliation de l'adversaire. Il s'agit de lui faire mordre la poussière, le plus rapidement possible et en essuyant le moins de perte possible.
Et pour ce faire, tout est permis. « A la guerre comme à la guerre », stipule le dicton, et il n'est pas loin d'avoir raison. Il s'agit de vaincre. De gagner. Et peu importe si pour faire ce il faut se salir les mains, se baigner dans le sang ou bien manoeuvrer délicatement dans des méandres un peu sombres. Parce que marquant le triomphe d'une personne sur une autre personne, il est nécessaire, pour mener la guerre, de mettre de côté tous ses scrupules. La guerre est sale, mauvaise, salissante. Penser autrement est un raffinement qu'il ne faut pas se permettre en dehors de salle de bal pour conquérir de jolis coeurs. Fourberie, traîtrise, manipulation d'information, déformation d'information, infiltration, bassesses, tout cela fait partie intégrante des outils nécessaires pour mener la guerre. S'en priver est être aveugle. Ils sont tout aussi nécessaires que les soldats, les arcs, les flèches ou les épées.
Pourtant nombreux sont les seigneurs qui vitupèrent, tempêtent et s'indignent des actes de leurs adversaires. Ces récriminations ont connu un regain de vitalité avec l'apparition d'un ordre décomplexé, celui des Initiés, pour ne pas les nommer. Encore aujourd'hui, un seigneur s'élève contre leurs basses manoeuvres. C'est faire preuve d'obscurantisme, de stupidité et d'idiotie agravés. Plutôt que de stigmatiser cette attitude, cependant, il faut s'intéresser à son origine. Elle est simple : le code de l'honneur, ou quelque raffinement du même genre, résultant de la course à la gloire dénoncée plus haut.. Ces codes, puisqu'il faut les nommer ainsi à défaut d'autres noms plus adéquats, sont nés en même temps que les idéaux de justice, de guerre juste, d'honneur du combattant. Ils ne résistent pas à l'épreuve du feu. Parmi les préceptes, il faut souligner l'interdiction de trahir, d'utiliser des seigneurs moins expérimentés pour servir ses propres fins, et ainsi de suite. Or, cela a été dit, ces outils sont vitaux pour la menée de la guerre.
Un seigneur agissant constamment selon le code de l'honneur est plus fragile, plus manipulable, plus dupe qu'aucun autre. Toutes ses actions peuvent être prédites. Toutes ses réponses également. Sur un champ de bataille, il n'est rien comparé à un autre, plus roué. D'aucuns objecteront que cela est faux, que ces seigneurs arrivent à gagner. A cela il faut répondre qu'ils ne suivent plus leur code de l'honneur, mais qu'ils l'adaptent, le modifient selon les circonstances, à l'instar des Bollos qui avaient finalement créer une brigade d'attaque pour pallier leur insupportable et stupide code de la chevalerie. Enfin, ces codes de l'honneur ne sont jamais les mêmes selon les seigneurs, les ordres, ce qui rend leur pratique d'autant plus incohérente et pleine de défauts. Des victimes toutes désignées pour les seigneurs plus malins.
La guerre se résume bien souvent à un simple jeu de massacre où il s'agit de tuer ou d'être tuer. Comme de nécessaire, les plus forts ou plus malins survivent. Pas les plus droits.
Pire que l'injustice inhérente à son essence, c'est le divertissement qu'est devenue la guerre qui pose problème, et légitime cependant le recours à toutes les armes pour triompher. Cependant, il ne faut pas sombrer dans le travers inverse et se réfugier derrière un prétendu code de l'honneur dépassé et inutile. La guerre reste une affaire où les forts triomphes et où les faibles et incapables trépassent. Les gémissements des vaincus sont le témoin flamboyant de cet état de fait.
La guerre n'est pas un jeu, et l'étrillage fait l'expérience. Les foutriquets pleurnichards et imbéciles doivent, s'ils sont assez conscients pour le comprendre, se relever et retourner au turbin, ou bien accepter de ne plus mener la guerre pour un bête concours de qui a la plus grande.
« Vae victis » disait une civilisation disparue depuis des éons. Il semble que, plus que jamais, cette maxime ait cours. Pourtant, une question demeure, inquiétante et lancinante : quel avenir et quelle place pour la paix ?
Kalguz | 11/12/08 13:36
La paix? Quelle paix? Il n'y a que la guerre.
Elle nous a formé, elle nous élève encore, et elle durera ad vitam eternam.
* Fier de sa citation, Kalguz reste dans le silence pour laisser aux autres Orcs le temps de ne pas comprendre *
La guerre est notre raison de vivre, que ferions nous en temps de paix? Il n'y aurait aucun intérêt, battons nous, faisons couler le sang, jusqu'à ce que la mort frappe les faibles en premier.
Edité par Kalguz le 11/12/08 à 13:37
Bart Abba | 11/12/08 16:55
Et komme disait le vieux Shaman Alikoum :
"Si nous faisons la guerre aux autres, c'est pour être en paix avec nous même !"

