Forum - [Tranche de vie] Jude la trouvaille
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Prince Anaodot | 12/12/08 21:17
Une nuit venteuse, comme tant d'autres. Elle n'avait rien d'unique, cette pénombre frémissante, avec sa lune a demi-voilée par une nuage menaçant. Sans doute qu'elle serait pluvieuse, a défaut d'être chaude, et il ne ferait pas bon se trouver la d'ici quelques croassements de corbeaux.
Des corbeaux ? L'empire des rapaces nocturnes serait il tombé, vaille que vaille, les armes a la mains, face aux assauts incessants des lampions des villes illuminées, remplaçant l'astre solaire, au grand damne de tout ce que le monde compte de pouilleux, de vermines et d'ordures ? Une victoire des piafs de mauvaises augures, certainement. Ils s'affichaient d'ailleurs partout, ici, sur une enseigne, la sur un tonneau; celui ci picorant l'oeil d'un ivrogne mort de froid dans l'indifférence la plus totale, la bas un autre fanfaronnant de son cri sinistre sur son tas d'immondices.
Je n'aurais pas cru la chose possible. On m'en avait parlé, pourtant, de ce foutu progrès. Oué, qu'il nous rendait pas les affaires faciles. Anaodot n'avait pas hésité, lui, a trouver quelques accommodements. La poudre, il la maniait déjà avant que son usage ne se répande dans le milieux. D'ailleurs, il était en rogne, toujours a dire que les ingénieurs nains lui avaient volé son concept de bombes artisanales. Je l'ai jamais trop cru, et je n'y ai jamais attaché d'importance. Ça en avait maintenant, avec la vingtaine de kilos d'explosifs que je trimballais dans mon sac ! Le moindre geste de travers, une étincelle, et on pouvait dire adieu a Jude-la-trouvaille. A ce propos, j'ai jamais su pourquoi il m'avait surnommée ainsi. J'aime bien penser qu'il avait fait une découverte en me rencontrant, que j'étais en quelque sorte un bijoux précieux a ses yeux. Mais d'après les autres, ca serait que je serais pas capable justement de trouver la moindre affaire juteuse. J'ai pas grand chose a leur répondre, on a tous nos sobriquets, et ils sont tous sujets a moquerie.
Fallait que je me bouge. Un clocher ordonnait aux braves gens de se rentrer, le couvre feu approchait. Il était pas bon d'être pris a roder dans les rues, si tard. Je passerais pas pour une prostituée, vu mon bardas. Une voyageuse, possible, vue la poussière sur ma cape, et l'odeur que je dégageais. Mais dans ce cas, comme serais-je rentrée dans la citadelle, alors que les lourdes portes du corps de garde s'étaient refermées il y a bien longtemps ? Me trouver un bordel pas trop crade, ou je passerais la nuit. Oui, c'était une bonne idée. Le Patron m'avait fait verser ma paye d'avance. Pas dans ses habitudes, ça. Je pouvais bien passer un peu de bon temps avec un serviable jeune homme. L'or lui ferait oublier mes cheveux filasses, les deux minuscules bosses qui me servent de seins, et ma peau rêche. Sans parler de mon haleine, mais faut dire que j'ai pas eu autre chose a boire, depuis trois jours, que du mauvais vins.
Dernier coup de cloche. Le matelas doré, juste en face. Bien, en espérant que la moitié de la caserne ne soit pas dans celui ci. J'entre, il faut bien. J'affectionne ce genre d'endroit; c'est l'un de ses bouges, ou, dès que l'on en franchit la porte, on saisit toute l'intensité de ce qu'on est venu y chercher : du sexe. L'odeur est forte, mélangée a des relents de tabac, d'alcool et de sueur. Les serveuses sont a moitié nues, mais on les distingue pourtant mal a travers la fumée opaque des cigarillos de la région. Telles des figures de proue, elles fendent la brume exhalée par la meute d'hommes rudes, avachis sur leurs chaises bancales. On y parle fort, on y rote, on y vomit. On y joue aux cartes, on y boit des coups, on s'y bagarre. On y baise, aussi, accessoirement. Une ambiance familiale, bon enfant. Ici, on se connait, par coeur, sous toute les coutures.
Je me pose a une table, rabat ma capuche. Personne ne me remarque. Faut dire, j'attire pas les regards. Un beau blond, élancé, un peu noueux a mon goût. Ça fera l'affaire. Juste un ruban autour de la gorge, et un pagne, en guise de tenu. Un verre ? Il m'a bien regardé lui ? Oui, allons, un verre. Et un claque sur les fesses au passage. Ici, la cliente est reine. Y a interet, sinon, ils ne verront pas la couleur de mon or. J'tiens la route, quand il s'agit de lever le coude. J'ai été a la bonne école. Je vois bien qu'il n'est pas tenté, mon blondinet. Il a crispé son sourire, quand je lui ai soupesé son paquet. Mais il reste la, bien sage. Un bon gars, fidèle a son employeur. L'aura droit a un pourboire, s'il me fait monter. Allez, le grand jeu. J'sors ma bourse, la fait tinter. A quoi il pense hein ? Mais je vois bien qu'une lueur cupide s'est allumée dans ses yeux. C'est gagné. Il accepte d'un hochement de tête, me voilà partie pour un peu de bon temps. Enfin.
Merde. Qu'est ce que j'ai fait de mon paquetage? Je croyais l'avoir mis la. Et ou est ce foutu porc, pas capable de me faire jouir comme il le devrait ? Encore flouée sur la marchandise, c'est bien moi ça. Une lueur la bas, au pied du lit. Qu'est ce qu'il fout, a quatre pattes, avec une bougie ? Le con, mais le con, il fouille dans ma besace.
« Qu'est ce tu fous idiot ! Tu va.... »
La surprise de me voir debout dans son dos lui fait lâcher la bougie dans mon sac. Et merde.
Eigoel Nahb | 12/12/08 23:53
Ehéhéh !
Pas de bol pour le sac !
Très bien raconté
Edité par Eigoel Nahb le 12/12/08 à 23:53
Pépé Narvalho | 14/12/08 00:14
Pas de bol pour le sac, oui... et pour le reste.
Tres joli, Anaodot !
Celimbrimbor | 14/12/08 15:12


