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Perle | 21/03/09 19:37
- Calme toi...Perle, ne t'inquiète pas, ca va aller, mon trésor...
Sa main replonge dans la bassine d'eau fraîche, le linge retrouve le front brûlant de sa mère. Maigre consolation qui n'arrive pas à sécher les larmes et détendre les visages.
La masure est à peine éclairée si ce n'est par l'âtre qui ronge le bois des cagettes délaissées sur la place du marché.
-Mère, je dois trouver le Sorcier. Peut-être qu'il pourra quelque chose, il a dit que...
- Va t'en Satan! Le feu me ronge, Perle...Perle...Reste!
La jeune femme se lève lentement sachant que dialogue va être impossible, elle plonge une dernière fois la compresse dans la bassine chassant les larmes qui veulent s'inviter. Un châle élimé est jeté rapidement sur ses frêles épaules. Un imposant dogue noir se dresse en émettant un grognement désapprobateur, prêt à suivre sa maîtresse dans sa sortie nocturne.
- Non Ebène reste là. Veille sur elle.
Un dernier regard à sa mère, et la porte se referme derrière elle. Si la jeune femme pensait échapper au désespoir s'étant invité dans leur habitation de fortune, c'est le cauchemar qui l'accueille à l'extérieur. De pauvres hères hagards supplient les cieux de leur clémence, se mêlant aux prédicateurs annonçant la fin du monde. L'air empeste! Des fosses ont été rapidement creusées et les corps touchés par l'épidémie sont jetés avec négligence par l'armée. Elle s'accouplent avec les bûchers qui ne diminuent pas d'intensité; Ils libèrent cette épaisse fumée âcre qui prend la gorge et se colle à la langue. Perle camoufle l'odeur tant qu'elle peut en enfonçant sa nez dans le lainage de son châle.
La maison du Sorcier est dans la Forêt des Luths, celle que l'on dit hanté par les esprits, même si elle est proche de la ville, personne n'ose lui voler son bois pour se chauffer ou pour construire les charpentes. Elle se dirige vers le Nord des remparts baignés par le fleuve Noir, la ville étant en quarantaine, toute sortie est impossible, mais une faille existe et Perle l'a découvert depuis son jeune âge. Elle se faufile dans les larges boyaux recevant les eaux usées de la cité, pressant le pas pour rejoindre la petite barque servant aux fonctionnaires de la ville. A coups de rames, elle parvient à rejoindre l'autre rive; L'air se fait piquant, le froid vif la pénètre de plus en plus à mesure qu'elle s'enfonce entre les troncs inquiétants de la forêt à peine éclairée par la pleine lune.
Soudain, une silhouette massive surgit en face d'elle. Un cri d'effroi dérange les oiseaux nocturnes qui s'échappent vers d'autres lieux. Son coeur bat la chamade même si elle vient de reconnaître Le Vieux.
Perle que fais-tu là? C'est pas une heure pour une jeune femme! Retourne d'où tu viens.
Onyx, Mère est mal, les remèdes ne suffisent plus...
Je ne peux rien contre la mort, retourne chez toi et accompagne Opale vers sa dernière demeure. J'ai fait tout ce que je pouvais pour elle.
Si vous pouvez! Regardez vous! Mère est si jeune...Je vous en prie, je suis prête à passer le pacte.
Le pacte?
Ne pouvons-nous pas rentrer?
Elle se frictionne les épaules pour chasser le froid qui l'engourdit. Elle arrête son geste quand le bâton noueux du sorcier se pointe vers elle.
- Non! Nous ne pouvons pas! Comme nous ne pouvons pas défier la Mort! Rentre chez toi, veille ta mère avant que la peste ne l'emporte sans toi. Et ne parle jamais de Pacte! Tu ne sais pas de quoi tu parles!
Le Vieux lui tourne le dos et s'enfonce dans les ténèbres, elle interpelle avec un cri de désespoir ce drôle de personnage au savoir incommensurable et parfois inquiétant.
- Ne me laissez pas, je vous en prie! Onyx Le Sorcier vous n'êtes qu'un être sans coeur. Je veux passer le Pacte!
Seul le silence lui répond, Le Vieux a disparu, le sol se dérobe sous ses pieds, un poing rageur rencontre le sol mousseux tandis que de violents sanglots l'emporte dans un tourbillon d'émotions. Elle ne peut pas mourir et la laisser. Ça ne devait pas se passer ainsi, ça ne doit pas se passer ainsi.
Les minutes s'écoulent avec ses larmes, prise d'un sentiment d'être observée dans cette forêt aux multiples légendes Perle se redresse et se prépare à affronter le visage creusés et agonisant de sa Mère.
Souillée, elle pénètre de nouveau dans la masure, forçant un sourire vers sa Mère qui délire. L'imposant dogue l'accueille avec la queue battant l'air joyeusement. Avec des gestes simples et posés, elle délie ses bottes croutées pour les poser devant le feu, calmement, elle pose son châle sur le dossier d'une chaise et reprend place au chevet de sa mère avec résolution. Délicatement, elle replace les mèches trempées de sueurs qui se sont collés aux tempes d'Opale, avec autant d'affection, elle remonte le drap quelle replie soigneusement.
Une violente quinte de toux secoue la jeune femme qui la camoufle en se dirigeant vers le bouillons qui mijote. Elle reprend son souffle comme à chaque fois, et enfonce le mouchoir maculé de son sang dans la poche avant de son tablier. Dans un de ses rares moments de lucidité, la fibre maternelle surgit de nouveau même si la voix n'a plus la force d'autrefois:
Perle?
Tout va bien, Mère, j'ai attrapé froid en allant voir Le Vieux, repose toi...
Perle | 26/03/09 19:27
L'ambiance est maussade, un brouillard blafard enveloppe la ville comme pour s'harmoniser aux visages hâves de la guirlande d'humains formant une file décourageante devant le four public. Un trio d'hommes portant le blason de la royauté sur leur coeur distribuent la pitance du jour. La jeune femme se faufile sans mal entre la foule pressée de remettre le ticket de rationnement. Du pain, deux portions d'eau saine et parfois un peu de viande séchée sont distribuées. Sa respiration reste en suspend quand on lui retire sèchement son ticket et que le scribe note soigneusement son nom sur le registre. Un regard inquisiteur la détaille, puis finalement, au signe de son comparse, le troisième homme lui donne sa miche de pain et remplit son baquet d'eau avec agacement, visant déjà le prochain seau qui se tend vers lui.
Perle ressert son châle et presse fermement le pain contre sa poitrine, elle prend soin de ne dévisager personne, puis elle accélère le pas pour s'éloigner de la file d'attente. Les yeux rivés contre la terre boueuse, elle trace son chemin, espérant éviter les ennuis et susciter l'envie par ce qu'elle transporte. Rapidement, un imposant chien noir se met à ses côtés et suit son rythme soutenu. Un illuminé la prend à partie, la bloquant pour enfoncer ses yeux fous dans son esprit. Ebène retrousse les babines et montre quelques crocs menaçants devant l'intrus qui entrave leur progression. Perle se montre sauvage en se dégageant sans ménagement du prédicateur annonçant la fin du monde. Poursuivit par sa folie, il hurle au démon en pointant du doigt le dogue noir. Sa propriétaire laisse filer un sifflement qui dicte au molosse d'abandonner sa proie.
C'est le souffle coupé qu'elle pousse la porte de sa masure. Le soulagement fait rapidement place à l'étonnement, sa mère tantôt alité, sourit radieusement. Les marques de la peste ne sculptent plus son visage en souffrance.
Perle te voilà enfin! Tu as réussi à avoir leur cochonnerie! Mets tout ça au feu! Nous avons une invitée!
-Mère, que fais-tu debout!?
Elle repose son châle nerveusement et lisse de même sa jupe avec des gestes secs. Elle dévisage la femme assise dans la petite pièce, ses vêtements sont soyeux et marquent son appartenance aux grands de ce monde. De longs cheveux noirs encadrent un visage parfait serti de deux émeraudes rendant le regard de cette femme étrangement étincelant et pénétrant. Son annulaire porte une bague en or figurant un serpent découvrant des crocs. Un charisme déroutant se diffuse de cette invitée qui donne encore plus de pauvreté à la pièce dans laquelle elle se tient. Sur l'unique table en bois mal dégrossie, un festin trône avec divers mets rivalisant par leur attrait tentant.
-Dame...Bienvenue chez nous! Que nous vaut tout ceci? Pourquoi venir dans le quartier des Tanneurs.
Perle, je suppose!
Sa voix est envoutante, douce et autoritaire à la fois. Elle se lève et pose une main glacée contre la joue de Perle.
-Je suis une amie du Vieux fou Onyx! Je t'ai entendu hier soir. Installe toi et profite de ce festin, Opale m'a déjà beaucoup parlé de toi, tu sembles très bien porter ton nom.
Le silence précède ses paroles, la jeune femme dévisage Ebène qui émet un sourd grognement vers l'étrangère, mais aussitôt cette dernière, le regarde, et le mécontentement de l'animal fait place à un couinement peureux. Il part aussitôt se réfugier dans son panier.
-Mère a besoin de se reposer.
-Un rire cristallin résonne dans la pièce de façon enchanteresse marquant l'amusement de la Dame et dévoilant ainsi une rangé de dents incroyablement blanches. Pourtant, ce rire sincère a quelques sonorités qui font naître des frissons inquiets. Perle s'installe rapidement et freine son envie de se jeter sur les plats alléchants. Elle dévisage sa mère respirant la santé:
« Il a accepté ma proposition!»
« Quelle proposition Perle? » Opale découpe le rôti en observant sa fille avec curiosité et vivacité.
« Celle de te trouver d'autres remèdes par un autre moyen. »
« Disons...que ce sera notre petit secret, il ne sait pas que je suis ici. » La femme prend la parole avant Opale et porte son index à la bouche de façon complice « Mais le résultat n'est-il pas merveilleux ? J'ai entendu ta demande, je suis ici pour t'aider à l'accomplir »
« Le Pacte... » Perle laisse filer sa pensée à voix haute, se perdant dans le verre de vin que la femme lui tend avec un sourire chaleureux.
« Ne parle pas de ça ici, as-tu perdu l'esprit? Te sens-tu fiévreuse mon trésor? » Opale plante une regard inquiet mêlé de colère vers sa fille.
"Ne vous inquiétez pas Opale, la petite doit avoir l'imagination qui travaille avec tous ces prédicateurs annonçant les pires calamités, pour eux la peste doit être trop douce!"
La chaise crisse contre le sol lorsque Perle se redresse, courbée sous la toux provoquée par le trop pleins d'émotions. Un mouchoir recueille de nouveau son sang, et retrouve rapidement sa poche:
-Pardonnez moi, j'ai besoin de prendre l'air.
-Es-tu sûre de vouloir quitter cette table? * les doigts fins de l'étrangère attrape son poignet. Elle plonge son regard dans celui de la jeune femme qui entend une voix s'immiscer dans son esprit: « Quand tu reviendras, elle sera morte! Tu ne peux plus faire marche arrière. Le Pacte est ainsi. »
Le temps se suspend, la joie de sa réussite se mélange à la terreur de ce qu'elle va devoir accomplir pour que la vie reste en Opale. Lentement, elle s'installe et sourit à sa mère pour la rassurer, déjà les remontrances maternelles fusent même si elle n'est plus la gamine aux quatre cents coups. Elle n'aurait jamais cru qu'elle aimerait tant les entendre de nouveau. Tentant d'oublier le feu qui ronge ses poumons, elle sert les deux femmes et ouvre ainsi le repas avec cette Dame bien mystérieuse,
- Connaissez vous la légende de la Rose d'Or?

