Forum - [Rp Clan : La Garde ] Contrat : Adjaron
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Dakeyras Dat Narumyr | 05/04/07 19:17
[Voici le premier rp écrit par les 4 plumes d'un nouveau clan : La Garde, qui, pour raison rp ne dévoileront pas leur nom. Merci de votre lecture.]
[Pour une remise en bouche, voici de quoi découle le texte que vous allez lire :
[Lien HTTP]
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Adjaron était resté assis dans son lit trois heures durant, refusant de toucher à la nourriture qui exhalait de doux parfum à ses fines narines. Il avait regardé les farfadets s'affairer autour de lui avec un regard sombre bourré de rancune et d'incompréhension. Dakeyras l'avait présenté à la première qui le garderait pendant dix lunes. Elle avait été aimable et accueillante, le garçon, lui, n'avait pas daigné lui adresser un sourire.
Il ne comprenait pas. Il ne comprenait rien et il ne comprendrait pas d'avantage s'il restait ainsi.
Il se cloîtrait dans son mutisme.
Cela avait duré trois jours.
Le lendemain matin, le petit Adjaron se glissa dans la chambre de la dame et ouvrit une armoire. Il savait que c'était là puisqu'il l'avait vu faire. Fier de s'être dérobé aux yeux de la dame qui préparait son bain, il ouvrit de grands yeux admiratifs à la vue des nombreuses armes légères qui se présentaient à lui. Il piocha une arme qui était à sa portée, un poignard qu'il trouva joli. Adjaron sortit et traversa le couloir, le sourire aux lèvres, se disant qu'avec cela il pourrait venger sa mère et prouver à son père qu'il n'était pas un faible. Il voulut d'abord cacher le poignard dans sa chambre, il s'empressa donc d'y parvenir mais la dame l'attendait, debout au milieu de la pièce. Adjaron se rembrunit et serra fort son poignard contre sa poitrine. Il l'avait entouré de ses bras et se disait que si elle voulait le reprendre, elle devrait le lui arracher des mains. La dame s'avança, elle perçut que le petit garçon resserra son étreinte. Elle s'accroupit face à lui en souriant puis lui présenta une plume.
« C'est le moyen plus connu, mais aussi le plus efficace. Si tu veux exprimer ta douleur, ne la renie pas car tu souffriras davantage. Fais en ta compagne, tu pourras enfin la comprendre et accepter de vivre avec elle. Pose ou étale sur papier tes tourments puisque c'est le seul moyen que tu possèdes pour l'instant. »
Il laissa tomber le poignard et pris la plume, un peu perplexe. Cependant, elle ne reprit pas l'arme.
« Viens, ton bain t'attend. Oublie cette éventualité pour le moment, tu pourrais te blesser. L'avenir ne peut se dérouler comme tu le penses si tu ne portes pas en toi la sérénité. »
Ce jour là il n'avait rien écrit.
Malgré le chagrin qu'il éprouvait, elle ne le laissait pas se morfondre dans sa chambre et l'attachait à ses pas. Il ne disait mots mais observait beaucoup. Ce petit avait quelque chose de particulier, quelque chose qui le distinguait de tous les autres enfants de son âge. Il avait été témoin d'un épouvantable carnage et elle savait qu'il ressentait un impérieux besoin de rétablir des liens avec la vie.
Ils étaient tous deux partis à Orne pour y acheter des vêtements, Adjaron les avait tous troués à force de vouloir s'entraîner seul toutes les nuits avec ce fameux poignard à l'insu de la dame. Il lui avait dit que c'était à force de grimper aux arbres que ses vêtements partaient en lambeaux. Elle connaissait bien évidemment les vraies raisons. Ce jour là, il fut témoin d'une scène qui le surprit. Il avait vu un jeune garçon aux cheveux couverts de boue séchée et d'un visage maculé de poussière voler du pain alors que le boulanger se tenait debout devant son étalage. Quelle audace ! Et il parcourait la place aussi discrètement que possible. Lorsqu'il s'approcha de la dame, Adjaron n'eût pas le temps de comprendre ce qu'il se passa que le jeune garçon s'enfuit avec sa bourse. N'admettant pas que l'on puisse faire quoi que ce soit qui puisse importuner la dame, Adjaron le rattrapa et lui sauta au cou sans ménagement. Tout deux s'agrippèrent l'un à l'autre et aucun ne voulait lâcher la bourse jusqu'à ce qu'Adjaron sortît son poignard et plaqua sa lame sous la gorge du jeune garçon. Pris de terreur, le petit aux yeux embués de larmes lui rendit la bourse sans demander son reste. Seulement, malgré cet acte condamnable, la dame lui demanda de donner au frêle garçon de quoi se restaurer, chose qu'il ne saisissait pas.
Sur le chemin, le petit garçon parlait à la dame de la vie qu'il avait menée jusqu'à présent.
Le soir, lorsqu'elle rangeait tranquillement les affaires dans sa commode et qu'ils parlaient de choses et d'autres, il lui demanda :
« _ Pourquoi avoir fait cela ? Il l'avait volé ce pain, et votre bourse...
Alors, elle se retourna et s'assit sur la chaise en face de son fauteuil.
_ Il l'avait volé certes, mais as-tu vu dans quel état il était ? Il est peut-être orphelin qui sait ? Il doit donc subvenir à ses besoins même si ses manières ne sont pas les plus honorables.
_ Orphelin... Comme moi ?
La dame secoua la tête.
_ Elle me manque...
Elle le prit alors dans ses bras et le consola.
_ Adjaron, j'admire ton courage et ta dextérité mais il faut parfois se servir de ses mots et non de ses armes pour convaincre quelqu'un. Je t'apprendrai à t'en servir justement. C'est un des plus grands pouvoirs, tu peux plier le monde sous ta volonté grâce à cela. Et tu deviendras encore plus respectable. »
Elle répondit encore à une multitude de questions avant de l'embrasser pour lui souhaiter bonne nuit et de quitter la pièce.
Avant de se coucher, Adjaron prit la plume et écrivit.
Le jeune garçon progressait vite et utilisait de mieux en mieux la langue. Elle lui apprenait quelques mots en elfique suite à ses demandes fantaisistes et il développait rapidement un esprit critique perspicace. Il faut dire qu'il devait assimiler vite et apprendre beaucoup pour son jeune âge. Il lui disait toujours qu'il voudrait lui aussi écrire plein de livres et qu'il ferait de la poésie ; il lui disait aussi que c'était dans la poésie que l'on pouvait s'évader et que même si le rêve et l'espoir ne matérialisaient pas le désir, ils contribuaient à mener à bien ses desseins.
A la fin de ses enseignements, il aimait se promener à cheval dans les prés non loin de la demeure en compagnie de la dame jusqu'à ce que le crépuscule soit venu déposer son aura blanche autour de lui et que les derniers rayons du soleil eurent peint les fleurs de camaïeux de rouges.
Un soir, Adjaron vit une touffe brune se déplacer dans les hautes herbes. Il serra sa gourde remplie d'eau dans ses bras et fit un pas en arrière, observant silencieusement cette étrange forme se mouvoir bruyamment. Soudain, une tête ronde maculée de poussière et de boue séchée fit son apparition devant le jeune homme qui avait bu tranquillement son eau quelques minutes auparavant. Il reconnut le jeune garçon de la ville de Orne, des miettes de pains encadraient ses lèvres. Il se souvint alors qu'il avait volé la bourse de la dame mais ses paroles résonnèrent dans son esprit. Adjaron le dévisagea puis, accompagnant d'un sourire son geste, lui tendit la gourde. Le jeune garçon, surpris par ce geste, leva des mains tremblantes avant de terminer le contenu de la gourde. Le vent apporta le murmure d'un « merci » à l'oreille d'Adjaron qui regardait cet étrange garçon repartir et disparaître dans les hautes herbes. La fatigue sapait les forces du jeune Adjaron et il se retourna une dernière fois vers les hautes herbes. Il ne versa pas de larmes en les quittant.
Adjaron dormit toute la nuit, il ne se leva pas pour s'entraîner avec son poignard.
Le grand jour était arrivé, Adjaron devait repartir. La dame craignait cet instant car ayant perdu sa mère violemment, ce jeune garçon avait besoin de repères et elle ne savait si l'emmener d'une demeure à une autre, d'une personne à une autre, était un acte bénéfique pour lui. Mais cela ne la regardait plus, Sire Dat Narumir savait ce qu'il faisait. En entrant dans sa chambre, elle le vit se battre avec son foulard qu'il tentait tant bien que mal de nouer correctement.
« Adjaron, n'oublie pas que la vie est comme un miroir des sens, délecte la dans sa splendeur,
elle te donnera sa saveur. » Dit-elle en nouant doucement le foulard crème.
Il était élégant et la dame passa un dernier coup de peigne dans ses cheveux pour qu'il soit fin près à revoir « son Dakeyras ». C'était peut-être cet homme son repère. Après que la dame l'eut aidé à monter sur son cheval, Adjaron se pencha suite à sa demande et elle lui murmura quelque chose. Lorsqu'il comprit que le galop de son cheval l'éloignait de la demeure de la dame, il marqua ses paroles.
« Montre-nous la vie que tu as choisie de mener. »
Edité par Dakeyras Dat Narumyr le 05/04/07 à 19:23
Dakeyras Dat Narumyr | 05/04/07 19:18
Le gamin m'avait d'abord regardé sans comprendre puis avait chuté. Il était tombé au sol sans un bruit, fermant lentement les yeux, s'abandonnant au vide. Mon coup de bâton l'avait atteint à la tête.
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Adjaron était arrivé chez moi un soir alors que s'annonçait une longue nuit. Il était entré, nous nous étions alors salués. Il m'avait sourit, m'avait demandé si j'étais bien le second Garde et bien entendu, j'avais répondu oui. Il m'avait demandé la direction de sa chambre. Et puis il avait arrêté de sourire.
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Il se réveilla en proie à un mal de tête intense. Il se leva et me regarda. J'étais alors assis sur une petite bûche, à siroter une bière. A côté de moi reposait un bâton. Il se tâta le haut du crâne et me lança un regard mauvais. « Je croyais que vous étiez mon ami. » C'est ce qu'il a dit. J'ai souris et j'ai repris mon bâton. « Je te l'ai déjà dis, gamin, dans la vie certaines choses se méritent, et tu ne les obtiendras pas qu'avec de grands sourire et tes niaises politesses. » J'étais alors vraiment désolé de fausser les premiers enseignements que la Dame lui avait apportés, mais c'était à mon tour de lui apprendre.
« Ne m'appelez pas comme ça. » Il avait crié. Je lui ai lancé mon bâton. « Recommence, mets moi à terre, sans retenue, vois en moi un ennemi, et tu auras le droit à la clef de ta chambre à coucher. » Il avait alors saisit le bout de bois et s'était élancé. La surprise fut ma première pensée. Adjaron avait une telle quantité de haine, de vengeance, dans le sang qu'il lui était facile de la libérer. Il était fougueux, me lançait toute sa hargne au visage et ne m'avait fait aucune pitié. Je n'étais même pas armé, pas même armuré. Il chercha à me frapper de côté, au visage, aux jambes... Mes bras commençaient à me faire mal à force de parer les coups rageurs de ce gamin. Un coup me fit reculer, l'autre me fit tomber. « Stop. » Lançais-je en attrapant fermement son arme improvisée. « Tu peux aller te coucher. »
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Le lendemain je décidais de le laisser se reposer la matinée. Il fut étonné de voir la simple petite demeure qu'était ma maison. Comme si un Garde ne pouvait habiter que dans une tour sombre ou dans une citadelle imprenable. Nous n'échangions quasiment aucune parole. Je prenais vraiment une place d'ennemi dans son coeur. Après le repas de midi, nous partîmes à cheval. Je lui demandais s'il savait se servir d'une épée. Il me répondit avoir déjà empoigné une dague. J'hochais la tête devant son air interrogateur. Nous arrivâmes à un campement. Des tentes à perte de vue, des soldats dans tous les coins. Le garçon n'avait jamais vu ça.
Je lui permis de se promener dans le camp tandis que j'allais voir mes hommes. Il découvrit par hasard des blessures horribles, des conversations effrayantes, des regards livides. Il s'entraîna avec les hommes à l'aide d'épées de bois et appris la camaraderie. La fin de journée me l'apporta épuisé. Nous passâmes la nuit autour d'un feu, à écouter les vétérans parler des batailles et des héros. Les yeux du gamin brillaient de cette flamme admiratrice qu'ont les enfants. Je le ramenais endormis à ma tente de commandement et le laissait dormir pendant que je réglais les derniers préparatifs.
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L'aube le réveilla. Les tentes étaient pliées, les feux éteints, les hommes anxieux. « Que se passe-t-il ? » Me demanda-t-il. « Nous partons pour la guerre, Adjaron, crois-tu qu'un soldat n'est qu'un narrateur habile près d'un feu réconfortant ? Tu verras aujourd'hui un nouveau visage de la vie. » Il se tut jusqu'à l'arrivée de l'armée ennemie. Je devais enseigner et en même temps gérer mes propres affaires militaires sur le continent, aussi avais-je décidé de mêler les deux. La bataille tourna en la faveur de l'adversaire et mes hommes durent bientôt quitter le champ de bataille. Le chemin du retour vit Adjaron se plonger dans un mutisme observateur. Il avait vu des morts, des nuées d'hommes prêts à tout pour servir leurs seigneurs, pour survivre, pour conquérir. Je lui avais appris les idéaux, les buts et les moyens d'y avoir accès, je lui montrais certaines tactiques de bases, alors qu'il serrait ma main en voyant une éclaboussure de sang gicler de la mêlée. Il voyait mes hommes changés, transformés, leurs regards sombres accompagner leurs plaies béantes, il avait vu l'expression de triomphe des guerriers d'en face, leur sourire glorieux et leurs chants de victoire. Il avait vu la guerre.
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« Faudra-t-il que je me batte pour vivre ? » Me demanda-t-il soudainement un jour. « Peu de gens passent au travers du filet de la violence. Il y a des guerriers partout. Dans l'enfant qui vole pour manger, dans le fermier qui a peur des inconnus, dans le boulanger devenu brigand par nécessité, dans le seigneur qui désir encore plus de pouvoir... Il te faut savoir te battre, pas pour vivre, mais pour survivre. » Je ne lui parlais pas des tueurs de sa mère. Il accepta ma proposition de lui apprendre à se défendre à l'épée, puis à l'arc. Il progressait, dormait peu, désirait apprendre toujours plus. Il répétait certains mouvements dans sa chambre, se prenait par jeu pour un héro millénaire. Nous nous battions souvent avec un respect mutuel et un honneur qu'il se faisait une joie d'apprendre, mais laissions parfois cela pour combattre sans règle aucune. Il frappait par derrière, injuriait, me faisait des coups bas.
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« Adjaron, tu te bas bien, mais aimes tu cela ? ». Je ne sais pourquoi cette question me vint un jour aux lèvres. « Oui, il le faut bien. » Me répondit-il naturellement. « Tu te trompes, gamin. » Je ne l'avais pas appelé ainsi depuis le premier jour. « Tu dois te battre parce que tu le dois, parce que la situation l'exige, ou parce que tu deviens un véritable guerrier. Les hommes qui se battent par plaisirs n'ont plus grand-chose d'humain, même les combattants de métier n'éprouvent pas tout le temps cette joie combative. » Il haussa les épaules.
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L'avant dernier jour de son enseignement me vit le blesser au bras lors d'une passe d'arme malheureuse. Son épaule fut légèrement coupée. Le sang coula, il hurla, pleura. Mais par ses pleurs, je constatais une étonnante dureté, comme s'il les réprimait de toutes ses forces, derrière ses dents serrées et sa façon instantanée de recouvrir sa plaie de sa main compressée. Je m'aperçus aussi de son changement physique, le môme avait gagné en musculature, était devenu plus droit, plus agile également. Il dormit plus de quinze heures.
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Sur son cheval il m'adressa un dernier signe de tête. Pas très chaleureux, un simple geste de remerciement. Mais notre regard nous révéla une sorte de complicité qui nous fit sourire. « Je te reverrais, gamin, grandis bien. Et surtout, deviens ce que tu veux devenir. Ne laisse personne te dicter ta conduite, reste droits, sage et affectueux. » Je lui tendais une petite dague de lancer joliment ornée et lui imitait le salut militaire. Il libera un bref rire et me serra la main. Ce petit bout d'homme allait forcément devenir quelqu'un. Et quelque chose me disait que ce quelqu'un ne serait pas n'importe qui...
Dakeyras Dat Narumyr | 05/04/07 19:19
Ce n'était qu'un cottage de bois, perché en déséquilibre en haut d'une petite colline. Adjaron grimpait le chemin qui menait vers cette cabane de fortune, juché sur un cheval et entouré par une escorte de gardes. Après avoir acquis les connaissances de la guerre, il n'allait pas tarder à rencontrer le troisième et dernier Garde. Le soleil orangé se frottait contre l'horizon lorsqu'ils frappèrent à la porte. Ils entendirent tout d'abord de l'agitation à l'intérieur, un bruit de cognement, puis une voix qui jurait. À nouveau, l'agitation régna, puis des pas se dirigèrent vers la porte. Cette dernière grinça en s'ouvrant, laissant s'échapper une épaisse volute de fumée à la forte odeur de volaille. Puis la tête d'une jeune femme passa dans l'embrasure. Elle échangea quelques mots avec l'homme qui avait frappé, que le jeune garçon ne pu entendre. Puis on le fit mettre pied à terre et le conduisit jusqu'au seuil. La dame le salua silencieusement, posant ses étranges yeux gris sur lui. Elle se fendit d'un large sourire :
_Bonsoir, Adjaron. Je suis la troisième Garde et m'occuperai de toi durant les temps à venir... Entre !
Lorsque Adjaron fut couché, la femme attisait le feu d'un air songeur. Voilà bien des lunes que Dakeyras l'avait prévenue de l'arrivée du garçon. Cette cabane avait été aménagée aussi bien que possible afin d'accueillir l'enfant dans les meilleures conditions, sans trop attirer l'attention.
_Tu le prendra en charge pendant dix lunes. Plus si nécessaire, résonnait encore la voix de Dakeyras dans sa mémoire. Je compte sur toi pour lui enseigner ce que tu sais. Forge le ; occupe toi de lui aussi bien que possible. Une surveillance vous accompagnera à tout instant, dans l'ombre. Voici l'adresse où vous logerez, durant cet apprentissage.
L'homme à la canne lui avait tendu un carré de parchemin où figurait ladite adresse. Puis elle s'était penchée sur les mots afin de décrypter les phrases griffonnées.
_Mais, cet enfant est vraiment....
Avant d'avoir pu finir sa phrase, la femme s'était rendue compte que Dakeyras avait déjà disparu, lui laissant une enveloppe contenant de plus amples détails.
_Daco Dak'... avait-elle soupiré.
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« Adjaron ! »
C'était encore cette voix familière, ce sourire et cette main tendue vers lui. Adjaron rêvais. Il était bien, il était absent de toute réalité.
_Adjaron !
La réalité s'éveilla autour de lui. La porte de la petite chambre s'ouvrit à la volée. La jeune femme aux yeux gris pénétra dans la chambre et lui jeta un paquet de vêtements, avant même que le garçon se souvienne de l'endroit où il se trouvait.
_Lève-toi, nous nous rendons au village. Et dépêche toi, Les bonnes affaires appartiennent à ceux qui marchandent tôt, déclama la Garde en sortant.
Ce fut ainsi pendant les premières lunes. Chaque jour, ils se rendaient dans le hameau, où ils vendaient des peaux. Dans les premiers temps, cependant, un curieux détail échappait au garçon. Un jour, alors qu'ils se frayaient un passage dans la foule du marché, Adjaron demanda :
_'dame...pourquoi je dois rester accroché à vous par une ficelle ? Lui avait-il demandé en tirant sur la cordelette qui lui entourait la taille.
La dame lui avait souri curieusement :
_Il y a du monde ici. Si je te perdais... c'est ma paye qui en prendrait un coup...
Puis elle soupira en ayant l'air accablée. Adjaron, cependant, était loin d'être stupide. Après tout ce qu'il avait vécu, depuis que sa mère était partie. À chaque instant, il se sentait observé. Et contrairement à ce que disait la femme, il n'y avait pas tant de monde que ça, dans le village. Tous les jours, ils se levaient très tôt, et leur passage en ville se faisait en vitesse.
Ensuite, ils allaient débusquer du gibier, dans les bois bordant leur abri. Parfois, la dame y allait seule, pendant qu'Adjaron restait près du cottage. Il ne jouait pas. Il ne jouait plus. Seul sur la petite colline, il s'occupait, reprenait ce que lui avait enseigné le deuxième Garde. Parfois, il restait un moment à réfléchir à des questions improbables. Puis il finit par se découvrir un intérêt particulier pour...le jardinage. Du moins, il avait enterré une rangée de graines. Chaque jour il les regardait s'enraciner et pousser, se demandant ce que ses pousses donneraient. Avec le temps, il se rendit compte de leur fragilité. Le vent les bousculait, et certaines plantes périrent rapidement. Mais l'une d'entre elle tint bon. Adjaron s'y était alors attaché ; c'était une rose blanche, sa rose blanche. Il la regardait, accroupi près du sol. Et il souriait.
Cependant il ne restait jamais seul très longtemps. La Garde revenait en transportant des bêtes qu'il fallait dépecer.
Un soir, avant d'aller se coucher et tandis qu'Adjaron frottait la surface d'une peau, la troisième Garde se leva de son fauteuil près du feu et s'approcha :
_Tu fais du bon travail, Adjaron. Et tu commences à prendre de bonnes initiatives. J'ai un peu soif, pas toi ?
Ce disant, il la vit sortir une petite bouteille en verre et la poser sur la table. Le liquide qui tanguait à l'intérieur était sombre et glissait voluptueusement sur les parois, comme un appel imperceptible. La femme la déboucha et aussitôt il sentit une odeur enivrante flotter avec légèreté.
_Tu en veux un peu ? En récompense de ce que tu as fait pour moi aujourd'hui.
Le jeune garçon ne répondit pas tout de suite, bien que le sourire de la dame le rendait confiant.
_Je n'ai pas le droit. Je suis trop jeune.
La femme se fendit d'un large sourire.
_Allons petit, ce n'est qu'une petite liqueur. Il faut bien une première fois à tout. Et d'ailleurs, à quoi bon laisser filer les jours, si aucun plaisir ne vient les égayer ? Ca restera entre nous, voilà tout.
Elle lui décocha un clin d'oeil avant de lui en verser un fond de verre. Au fond de lui, Adjaron jubilait, malgré sa crainte. C'était comme ces jours où les grands le laissaient faire des bêtises, avec leur consentement. Il se sentait fier et effrayé à la fois. Il but la liqueur. Le liquide lui chauffa la gorge et le ventre. Puis ça lui parut presque désagréable lorsque ses yeux se mirent à le piquer.
_Alors ? Lui demanda la dame, qui ne l'avait pas quitté des yeux. Tu as aimé ?
_Oui, mentit-il avec une légère grimace.
Ils discutèrent un petit moment des choses interdites. Le garçon demanda à la garde :
_On vous a déjà rendue triste ? Ou en colère ?
_On l'est fatalement un jour ou l'autre. J'ai eu un enfant... qu'on m'a enlevé. En lui ôtant la vie.
Adjaron comprit, à l'expression abattue de ses yeux. Comme lui, elle avait de la tristesse. Et ce n'était le genre de tristesse qui s'en va en offrant une simple fleur. La dame capta à nouveau son attention.
_J'ai longtemps souhaité la mort des responsables, Adjaron. Mais ça ne m'aurait jamais ramené l'être cher. Et malgré la peine et la colère, je ne me suis pas vengée. J'ai laissé leur destin s'en charger. Pourtant je les maudis encore de tout mon être. Mais j'ai choisi de mettre en avant tout ce que j'avais de positif en moi. En sombrant dans la haine, j'aurai agit exactement selon leur souhait.
_Alors moi aussi, on veut que j'aie de la haine ?
_Non Adjaron. Toi, c'est une histoire différente. Et il est temps d'aller te coucher.
Il comprit que le sujet était clos. En s'endormant, il se demanda qu'elle pouvait bien être son histoire, à lui. Il pria pour qu'elle soit la meilleure possible.
...
Dakeyras Dat Narumyr | 05/04/07 19:20
...
_Ca alors... J'ai bien l'impression qu'on s'est perdus, cette fois... déclara la Garde en se massant la nuque.
Adjaron, à ses côtés, portait les carcasses de deux lièvres. Silencieusement, il attendait que la dame retrouve leur chemin à travers les bois. Elle examinait une trace de patte au sol.
_Hum... un renard est passé par là il y a quelques temps, on dirait.
Adjaron s'approcha alors et se pencha lui aussi sur la trace. Il hésita un moment, mais finit par lui dire :
_Ce n'est pas un renard, c'est un chien sauvage. On a déjà trouvé cette trace plusieurs fois et on tourne en rond depuis tout à l'heure...
Durant un instant, le garçon se dit qu'il n'aurait peut être pas du faire cette remarque, car la Garde restait figée, dos à lui. Il s'apprêtait à lui donner raison lorsqu'elle se tourna vers lui, un large sourire lui barrant le visage :
_Mais c'est vrai, tu as raison ! Je crois que tu es devenu plus doué que moi à ce niveau là...
Puis elle se mit à rire, au grand désarroi d'Adjaron, qui ne savait plus que faire. Finalement, il se mit à sourire, lui aussi. Puis ils rirent ensemble. Ce n'était pas grand-chose, mais cela lui faisait du bien. C'était comme si une tension s'échappait. Le noeud qui lui serrait le ventre depuis qu'il n'avait plus revu sa mère lui faisait moins mal.
Puis ils retrouvèrent leur chemin, en se servant du soleil, simplement.
Peu avant la fin de la neuvième lune, au cours d'une soirée, Adjaron était dehors, sous une pluie battante. Accroupi devant sa rose blanche, il tendait les bras au dessus de lui, soutenant un linge afin de protéger sa plante.
_Adjaron ! Rentre maintenant.
Le visage de la dame ne souriait pas, et le ton utilisé était catégorique. Le garçon obéit sans broncher, après avoir planté avec soin deux bâtons qui soutenaient la toile improvisée au dessus de la fragile fleur. Depuis peu, la jeune femme parlait moins et faisait d'avantage attention aux chemins par lesquels ils passaient. Mais Adjaron choisit de ne manifester aucune inquiétude. Après avoir avalé un rapide repas et s'être séché, il alla se coucher.
Durant toute la nuit et alors que le garçon restait perdu dans les méandres du sommeil, une chaise avait été installée contre sa porte, à l'extérieur. La Garde avait récupéré une arbalète, qu'on avait cachée dans une armoire en cas de besoin. Puis elle resta assise, immobile, scrutant la porte d'entrée et écoutant le son de la pluie battante.
Le lendemain fut une journée comme les autres. Le soir venu, Adjaron se rendormit comme à son habitude. Derrière sa porte veillait la Garde. La femme aux yeux gris tenait l'arbalète entre ses mains, et se demandait comment fonctionnait ce truc. Les armes à jet étaient loin d'être son point fort. Son regard venait de se poser instinctivement sur une grande casserole, à l'autre bout de la pièce, quand un bruit au dehors se fit entendre.
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Adjaron s'éveilla seul ce matin là. La dame n'était pas venue le tirer de son sommeil, ce qui n'était pas dans ses habitudes. Lentement, il se prépara et sortit de la chambre. Au dehors le soleil était déjà haut. Comme il ne vit personne, il sortit à l'extérieur.
Ils étaient trois cadavres par terre. Adjaron ne savait pas s'ils étaient vraiment morts, car aucune trace de sang n'était venue souiller le sol. Il y avait juste une casserole gisant par terre, toute cabossée. Deux hommes s'affairaient avec les corps. Adjaron les reconnut. C'étaient ceux qui l'avaient accompagné ici voilà 9 lunes. La Garde apparut soudainement face à lui, tout sourire :
_Bonjour, Adjaron. Tu as bien dormi ?
Il opina du chef, tandis qu'elle l'entraînait à l'écart, où deux chevaux attendaient. Elle l'aida à grimper sur l'un d'eux.
_C'est ici que nos chemins se séparent. On ne peut pas rester plus longtemps. Ils vont te mener à Dakeyras. Il saura quoi faire.
Le garçon hocha la tête. C'était la première fois qu'il l'entendait prononcer le nom du « monsieur de la mort ».
_N'oublie pas. Ne laisse pas la haine ronger ton âme. Ne laisse pas un geste inconsidéré partir à bride abattue, alors que ton cerveau n'est pas encore en selle. Il y a bien des choses positives en toi, qui grandiront, si tu les laisses germer.
Elle lui tendit un pot en terre, où elle avait pris soin de déposer la rose blanche et ses racines.
_Bon voyage, mon garçon. Et surtout...
Elle ne finit pas sa phrase, l'un des deux hommes, qui avait fini de s'occuper des corps, l'appelait. Pendant que la Garde s'éloignait, le deuxième homme vint sur le cheval à l'avant du garçon.
Adjaron sourit en son fort intérieur. Il avait compris, le jour où il avait ri, que sa joie l'avait aidé à vaincre une partie de sa douleur ; qu'elle était, en quelque sorte, une arme qui l'aidait à tenir bon. Le cavalier talonna les flancs de la monture, et ils commencèrent à descendre la colline. Derrière, la troisième Garde partait à l'opposé, une arme lui battant la jambe.
Adjaron serra la plante contre lui, se demandant ce qui l'attendait au bout de ce voyage.
Dakeyras Dat Narumyr | 05/04/07 19:20
Le manoir de l'oubli se dessina entre les arbres. Adjaron avançait lentement au travers de la forêt de Dieu. Il l'avait quitté 30 lunes auparavant. Il avait changé, grandi, mûri. Alors qu'il rentrait dans la grande plaine du royaume de l'oubli, il reconnut une silhouette en haut des marches du manoir. L'homme de la mort, Dakeyras comme les autres l'appelaient, l'attendait. C'était lui le chef, c'était lui qui avait décidé de ces 30 dernières lunes.
Il arriva enfin, aux côtés des 3 soldats qui l'avaient accompagné en bas des marches. Il descendit doucement de son cheval. Les soldats après un signe de tête au Comte disparurent vers la ville. Dakeyras descendit doucement les marches, sa canne rythmant toujours de la même manière son pas droit, fière et pesant. Adjaron inclina le visage face à l'homme. La capuche de Dakeyras glissa sur ses épaules, dévoilant un visage blanc, froid, des yeux gris apeurant, et ces runes noires qui marquaient sa peau blanche.
- Bonjour Adjaron, je crois qu'à présent je peux me présenter. Dakeyras Dat Narumyr, Comte de l'Oubli, Maître de la Garde, tueur à gages.
Il s'inclina légèrement, avant de poursuivre
- Te voici dans mon royaume, l'oubli. Ici, nous sommes aux pays des ombres, au centre de la forêt des Dieux.
Adjaron ne disait rien, regardant l'homme imposant devant lui.
- Bien, ces 30 dernières lunes ma Garde t'a enseigné à vivre, survivre et comprendre pourquoi. A présent, je vois et ai entendu que tu as bien écouté et bien assimilé.
Tu sais bien, même très bien te battre, tu te défends également bien à la plume, et ton sourire a retrouvé sa place au fond de ton coeur.
A présent écoute bien, tu as un choix à faire. Sois je te fais ramener en dehors de la forêt et tu prends ta vie en charge, seul, mais avec de bons bagages, et tu fais tout pour ne jamais me recroiser. Sois, tu restes ici, passe sous mes ordres et continues ton enseignement avec moi. Mais saches une chose, je ne suis pas mes gardes, ils sont sous mes ordres mais nous ne possédons pas la même éducation et je ne suis pas dans le relationnel. Tu seras un soldat pour moi. Est-ce clair ?
Adjaron inclina doucement la tête en avant.
- Bien à présent, tu as une nuit pour faire ton choix.
Dakeyras se retourna.
- Non, répondit timidement Adjaron.
Le Comte posa son regard sur le garçon qui continua :
- Mon choix est déjà fait.
- Eh bien.
- Autant finir le travail déjà commencé.
Dakeyras sourit avant de lancer :
- Un oubli va te conduire à tes appartements
Et il grimpa les marches jusqu'à la porte. Mais alors qu'il allait pénétré dans le manoir, un appelle le fit se retourner.
- Et si je vous avais recroisé ? Lança Adjaron
- Je t'aurais tué jeune homme, répondit Dakeyras avant de disparaître derrière les grandes portes.
.La Garde.
Xüne Syphonn | 07/04/07 11:07
Absolument Génial !!! et la suite et la suite ?? Bravo à vous 4 j'adore !!!
Celimbrimbor | 07/04/07 14:07
Agréable lecture. 
Mamba La Vengeresse | 14/04/07 17:16
Jolis textes, félicitation à tous
C'est intéressant mais la suite nous en dira plus j'espère. 
Seregon Halldrim | 14/04/07 23:30
Tout simplement Sublime, Une grande oeuvre qui faut mettre dans nos références
Edité par Seregon Halldrim le 14/04/07 à 23:33
