Forum - [La quête des légendes, Special Reissue Edition 4/21] Les Dragons 3/3 : Du droit du plus fort.

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Celimbrimbor | 09/05/19 18:10

« C'est de ma faute, » murmurait-il.
La chaumière avait constitué le cœur de son territoire, son petit lien ténu avec les hommes. Il l'avait construite lui-même, pour sa femme, sans tricher. Il voulait que sa demeure, même si chiche, même si limitée, fut sienne tout entière. Il ne souhaitait pas d'un produit issu de pouvoirs empruntés qui ne perdureraient pas. Bâtir lui avait été un exercice difficile et il avait connu de nombreux faux départs, des retours en arrière et tellement d'échecs qu'ils se fondaient tous dans sa mémoire. Mais que ces jours passés là à s'esquinter les mains et le dos avaient été doux. Quelle joie, quand la masure se tint finalement debout, quelque peu branlante, mais bel et bien terminée. Et quel bonheur d'être enfin deux, quelque part, à soi.
« C'est de ma faute », répéta-t-il en secouant une poignée de terre.
Tout avait brûlé, jusqu'aux pierres, ou presque. De sa maison, il ne restait que des morceaux abattus, des ruines, des indications de ce qui se dressait ici avant. La cheminée effondrée marquait le mur central, la ligne moins brûlée, là, sa suite, et l'ouverture montrait la porte vers la chambre. Elle avait dû bien prendre, avec tous les meubles en bois et la paille du lit. Et puis, là-bas, la petite grange, un tas noir sinistre, maintenant. Les bêtes, enfuies, les champs, défoncés. Deux visions se superposaient dans ses yeux et il ne voulait voir que l'autre, quand il se cassait le dos à bêcher la terre mais que le rire était encore possible. Il ne voulait pas de cette désolation personnelle, il refusait cette tombe, sur sa gauche.
Il y avait donc un corps. Elle n'avait pas brûlé. On lui avait laissé quelque chose à pleurer.
Il ne pleurait pas.
La chose qui était la forêt grinça derrière lui. Un druide ne laissait pas son territoire sans protection, jamais, en dépit de toute la paix du monde. Même le meilleur d'entre eux ne pouvait ignorer les règles les plus élémentaires.
« Je sais. »
Il avait la voix blanche, ce grand homme abattu. Le grand vainqueur des assemblées. Celui qu'ils craignaient tous.
Jan regarda les décombres à nouveau. Le feu s'était déclaré partout en même temps, sauf dans l'âtre et le four. Sans cela, il aurait pu croire, même pour une brève seconde, à un coup de folie de Piotr, qui l'auraient enterrée à sa mort avant de tout brûler. Mais le garçon était incapable d'un tel prodige. Pour ce qu'il savait, personne n'était capable d'un tel prodige.
« Montre-le moi », ordonna-t-il en fermant les yeux.
La chose qui était la forêt grogna. Il n'était pas nécessaire qu'il vit. Il n'y avait, du reste, rien à voir. Elle lui fit comprendre que tous les animaux avaient fui à peine l'intrus apparu. Elle lui avait déjà tout montré : l'arrivée, le séjour et la fin.
« Montre-moi l'incendie. Je veux connaître mon ennemi. »
Elle hésita encore mais de vieux pactes la poussèrent à s'incliner devant la volonté de l'héritier de ceux qui chevauchaient les nuées. La chose qui était la forêt lui montra le retour de l'elfe au travers de ses yeux extérieurs, elle lui montra la tombe créée, remplie et rebouchée sans un murmure. Elle lui montra le départ du feu, partout en même temps, sans que l'elfe esquissât un geste ou prononçât un mot.
« C'est un défi. Jan chassa la vision d'un clignement d'yeux. Il est venu sur mon territoire pour me défier. Il y a pris ce qu'il y a trouvé. »
La chose qui était la forêt ne répondit rien.
« Les morts ne crient pas vengeance, les disparus ne demandent pas rétribution. »
Il y eut comme un bruit de pluie sur les frondaisons.
« Non, je ne peux pas. Ce serait être pire qu'une pierre. »
Une cascade éclata en de lourdes cataractes sur des roches éloignées.
« Je veux me venger ! Jan se tourna vers la chose qui était la forêt. Voilà. C'est moi qui demande du sang. »
La réprimande claqua comme un chêne trop tiré par le vent.
« Et alors ? Je suis le plus grand d'entre eux ! Réunis ensembles, ils craindraient encore de m'affronter. Qu'ils m'abandonnent parce que je brise une règle ! Sans moi, ils ne sont rien. Rien, tu m'entends ? »
Un froid silence de plaine entoura Jan.
« Oui, évidemment, toi aussi. Il sourit. Une chose alors. Une seule. Ne me ferme pas tes chemins cachés. Pour abattre ce monstre, il me faut un pouvoir que je ne possède pas. »
Une cacophonie se déchaîna dans les ruines. Un tohu-bohu de cris d'animaux, de tempêtes et de tonnerre. Des volcans rugirent et des montagnes s'ouvrirent en deux. Un chaos tonitruant qui s'éteignit lentement.
« Bien sûr que je le connais. Mais regarde ce que j'ai déjà payé. Crois-tu que le reste m'importe ? Que la vengeance. Jan s'interrompit quelques minutes dans le silence de temple avant de reprendre d'une voix douce. Tu as vu passer autant d'hommes que le plus vieux de tes troncs, et de plus sages que moi. Tu sais ce que nous sommes. Tu sais comme nous sommes, druides ou pas. Ne me ferme pas tes chemins, ma vieille forêt. Accorde un dernier vœux à un mourant. »
La chose qui était la forêt s'effondra sur elle-même en un tas de brindilles, de feuilles, d'herbes, de plumes et de poils que le vent dispersa bientôt. Il ne restait plus que Jan, son baluchon et son bâton à gauche et la tombe sans nom à sa droite. Il eut un mouvement, comme pour se tourner et se recueillir encore, mais il se ravisa. Il n'avait plus grand-chose d'un homme brisé. Il ressemblait plutôt à quelques gigantesques ruines à venir. Un fantastique fiasco sur le point d'advenir. Il se baissa pour ramasser son bâton et son paquet. Jan se remit en marche.
La forêt ne lui avait pas barré ses sentiers mais la route fut longue. Ce trajet, courant dans le sang du druide, il ne l'avait jamais marché. Pourtant il se déroulait sous son pas comme une vieille habitude. Jan marchait le jour, partant aux premières lueurs de l'aube et ne s'arrêtait que lorsque le soleil glissait à l'horizon. Il passa par des plaines, des bois et des marais, jamais égaré, foulant des sentiers interdits et cachés, jusqu'à ce qu'il arrivât au pied de la grande montagne.
Il s'arrêta. Les pièges et les chausses trappes lui avaient été épargnées. Le plus facile était derrière lui. Il fallait à présent trouver l'entrée qui le mènerait jusqu'à eux. Jan redoubla de prudence. Ce chemin était sacré, nul pied ennemi ne devait le fouler. Il ne voulait pas faillir à son devoir une seconde fois.
Alors le druide demeura assis, là, une longue semaine. Personne ne l'avait suivi. Il me savait. Il ne bougea pourtant pas avant d'être sûr qu'à part la nature, il n'y avait rien autour de lui. Il interrogea la chose qui était le sol, celle qui était l'air. Même celle qui était la plaine, il la convoqua. Le druide examina tout le pays alentour, sondant ses os les plus profonds jusqu'à obtenir une réponse qui le satisfît. Le pouvoir au bout du chemin ne devait échoir à personne d'autre qu'à lui. Il lut le pays jusqu'à le devenir et il ne se redressa qu'après s'être retrouvé. Personne ne pouvait mentir à un pays.
Jan regarda devant lui : il n'y avait pas vraiment de chemin à suivre alors il se mit à marcher, comme au hasard.
La chose qui avait été sa forêt l'attendait. Le druide s'arrêta de nouveau.
« Je paie le prix. »
Il crut apercevoir comme un éclat dans le regard blanc qui pesait sur lui. Un reflet de lumière, sans doute.
« Je paie le prix. »
Et c'était fait.
Sans rituel, sans un mot. Jan et la nature seuls comprenaient la valeur du contrat. Il pouvait passer les limites interdites et aurait sa chance d'obtenir la puissance des ses ancêtres. En contrepartie, à sa fin, il deviendrait une chose sans vie, sans volonté, hanté par ses remords pour l'éternité. Il deviendrait une chose qui servirait la nature.
L'air scintilla devant Jan. Il adressa un sourire amer à la chose qui avait été sa forêt et franchit un seuil. Sans un regard en arrière, il continua d'avancer. La route n'était plus très longue jusqu'au pouvoir qu'il cherchait. Un frémissement familier le fit se retourner : la chose qui avait été sa forêt s'était effondrée sur elle-même, en travers du seuil. Il avait pensé qu'elle l'accompagnerait. Il haussa les épaules. C'était sans doute mieux ainsi.
Plus le druide grimpait, plus la chaleur devenait forte. De la fumée s'échappait du sommet de la montagne qui avait paru si paisible, si différente depuis la plaine. L'aire n'était plus très loin. Il sentait le souffre et l'odeur âcre des créatures de légende qui demeurait là-haut. Enfin, il passa le rebord d'un large cirque et s'arrêta, le souffle coupé.
Les dragons volaient.
Les bêtes magnifiques, gardiennes du feu premier, volaient dans le ciel.
Jan ressentit un sentiment de pure liberté. De tous les âges, dispersés jusqu'au bout du monde, les bêtes vivaient leur vie de chimères, oubliées par le monde. Bien des années avant lui, les derniers chevaucheurs avaient tiré les dernières parts de volonté de leur sang défaillant pour isoler leurs montures dans un monde ailleurs. Ils n'avaient laissé qu'une seule entrée, que seul un de leur descendant pouvait trouver. Jan s'assit.
Sur les rebords intérieurs du cirque, des nids de roches gigantesques faisaient une sorte de barrière à la fournaise qui rougeoyait en bas, plus profond. Le druide ne ressentait aucune peur. Seulement une impression sublime de contempler quelque chose d'incroyable. Et il lui semblait être arrivé quelque part où il était chez lui. Ce lieu coulait en lui, résonnait dans son sang d'une musique étrange.
Les dragons ne lui feraient aucun mal : il avait payé le prix, rien d'autre n'était nécessaire. Leur secret serait gardé sans sa tombe. La fantaisie qui se déployait devant ses yeux empêchait Jan de les déranger. Il ne voulait pas troubler leur vie. Il ne voulait pas réclamer leur pouvoir tout de suite. Il voulait les admirer encore, saisir toutes les nuances que les lumières de la lune et du soleil faisaient sur leurs écailles. Levant les yeux vers la partie nocturne du ciel, il se demanda combien d'étoiles s'étaient perdues dans leurs moustaches.
« C'est un spectacle magnifique.
─ Oui, répondit Jan. Incroyable. »
Une silhouette longiligne se découpa sous le ciel, grand dragon de rivière, vert comme une émeraude poussiéreuse, tandis qu'un autre s'amusait à passer du jour à la nuit, chassant d'une ruade les cristaux de givre coincés entre ses écailles. Ailleurs, sur terre, Jan crut voir des petits agiter leurs ailes sous l'œil attentif d'un autre. Un sourire béat se fraya un chemin jusqu'à son visage. Il se sentait en paix.
« Et ce calme... murmura-t-il.
─ Oui.
─ On a l'impression de tout comprendre, de tout saisir en contemplant leur vol.
─ Tout ? Non, non. Ce serait trop facile. »
Ce fut la pointe de lassitude qui brisa le sort. Le druide fit un bond de côté. Il se ramassa sur lui-même, les genoux fléchis, prêt à se défendre.
« Vous. »
Celimbrimbor le regardait d'un œil serein. Il ne dégageait aucune impression de violence, aucune volonté de puissance. L'elfe était, juste là, avec tout ce que cela impliquait. Jan avait pensé que sa colère et sa douleur le feraient se déchaîner il sentit un froid profond parcourir ses veines.
« Je brûlais d'envie de vous rencontrer, Jan. Il me fallait vous remercier, ne serait-ce que par politesse.
─ Vous avez tué ma femme.
─ Elle était malade.
─ Vous mentez, elle...
─ Je ne mens jamais. Une pause après la réprimande. Le temps l'aurait emportée. J'ai simplement hâté les choses. Et j'ai veillé à ce qu'elle ne souffrît pas.
─ Elle l'aurait dit ! Elle me l'aurait dit et je l'aurais soignée !
─ Allons, ne faites pas l'enfant. Un temps, Celimbrimbor pesant une idée et l'abandonnant. Enfin, oui. Je l'ai tuée.
─ Je... Et mon fils ? Et Piotr ?
─ Placé dans une institution du continent. J'ai pourvu à ses besoins et à son éducation jusqu'à sa majorité et au-delà. Il finira magistrat ou quelque chose comme cela, je pense.
─ Sa place est avec moi !
─ Avec vous ? La voix de l'elfe charria un instant tout le mépris du monde. Puis : Avec vous... Après tout, oui, peut-être. Cependant, cela même poserait problème, voyez-vous ?
─ Rendez-moi mon fils !
─ Oh, non. Vous m'avez bien guidé jusqu'ici et je vous en suis profondément reconnaissant. Néanmoins, si j'ai réussi à flouer les sortilèges de protection au seuil de cet espace, je ne suis pas certain de pouvoir le refaire. Enfin, si, mais je n'ai pas... »
Jan n'hésita pas. Voyant l'elfe lancé dans un monologue insensé, il lui plongea dessus, oubliant la scène de l'incendie, oubliant la magie du seuil censément infaillible, oubliant ses pouvoirs. Il voulait l'abattre de ses propres mains, sentir son cœur battre dans son poing avant de l'écraser.
Il se mit à suffoquer sans comprendre pourquoi. Il sentit un choc sourd dans la main droite et son couteau s'envola quelque part. Ses jambes se dérobèrent sous lui et il se retrouva sur le dos.
« Merci de me faciliter les choses. Pas même essoufflé, l'elfe tenait une lame fine au-dessus de l'œil gauche de Jan. Bien, comme je vous disais, avant de vous tuer, je tiens à vous remercier très sincèrement : je n'aurais pas pu arriver ici sans vous. Aussi, avez-vous une dernière volonté ? Je ferai mon possible pour la réaliser.
─ Je vous hais. Jan pleurait de frustration.
─ Vous n'êtes pas le premier à exprimer un tel sentiment. Il esquissa un sourire contrit. Je ne vous présenterai pas d'excuses. Un temps. Allons, pressons à présent.
─ Soyez maudit !
─ Oui, oui, très bien... Pour la dernière fois, monsieur, votre souhait. Vous abusez de mon temps. »
Le druide manqua de s'étouffer. L'elfe était sérieux. Bien entendu, il le tuerait. Mais il accéderait aussi à son vœu. Il fallait qu'il trouve quelque chose. Un moyen de se venger. Quelque chose.
« Mon fils. L'elfe attendit qu'il se calmât. Mon fils doit vivre pour me venger. Il faut qu'il survive. Rien ne doit lui arriver jusqu'à ce qu'il puisse se défendre. Vous ne lèverez pas la main sur lui. Jamais.
─ Soit. Je le protégerai de tout ce qu'il est à ma portée de prévenir. Il lui appartiendra de décider si oui ou non il vous venge. Enfin, je ne lèverai jamais la main sur lui. Voilà. Vous avez ma parole. Une pause. Une dernière parole ?
─ Pourquoi ? »
L'épée transperça très proprement l'œil et le cerveau du druide. Une petite impulsion électrique acheva le tour. Il n'avait pas trop souffert. L'elfe fit disparaître l'épée d'un sort distrait. Il en avait enfin fini avec les affaires courantes.
Celimbrimbor se campa alors sur le rebord du cirque et cessa de masquer sa présence.
L'effet ne se fit pas attendre. Sa magie n'était semblable à aucune des dragons. Plusieurs d'entre eux, à l'aspect vénérable, se mirent à tournoyer au-dessus de lui. Bientôt l'un se détacha du groupe et se posa dans un fracas de montagne devant l'elfe, expirant sur lui un souffle enflammé. Celimbrimbor ne broncha pas. On ne se proclamait pas mage sans pouvoir résister à ce genre de petite chaleur. Quitte à tricher un peu.
« Vos épreuves ne m'intéressent pas, hurla-t-il. Et je n'en relèverai aucune ! »
Une vague de reproches l'assaillit et échoua sur ses défenses mentales. Il fit apparaître la rose qui le tourmentait tant.
« Voici ce que je veux ! Donnez-moi votre feu ! Donnez-moi le premier feu ! »
Le dragon renifla de mépris. Et c'était pour cela que la créature se présentait à eux tant de sang sur les mains ? C'est pour cela qu'elle avait assassiné sur leur sol ? Un éclat mauvais brilla dans ses yeux.
« Vous n'avez pas compris. Celimbrimbor fit disparaître la rose et secoua la tête presque tristement. Donnez-moi votre feu ou je vous l'arracherai de force. »
Et il ouvrit son esprit à celui du puissant reptile.
Le dragon y découvrit un vision d'épouvante, ses frères et lui engagés dans une lutte sans merci contre ce petit être. Les œufs, les espoirs, brisés. Le foyer, noyé sous la roche. Des cadavres partout et lui, transpercé de l'intérieur. Il vit les seuils des terres brisés et son peuple traqué. Il comprit la folie de cet elfe qui irait au bout de son projet et mourrait plutôt que d'abandonner. Cette quête était sans espoir.
« Non. Une pause. Ce n'est sans espoir que si j'échoue. Et je n'échouerai pas. Celimbrimbor parlait d'une voix calme. Donnez-moi votre feu. »
Dans un souffle chaud, le dragon s'envola. Celimbrimbor n'esquissa pas un geste. Il ne déclencherait pas la guerre. Il lui avait tout montré, il fallait attendre. Il s'assit en tailleur, aux aguets.
Le dragon ne revint pas. Les reptiles nageaient toujours dans l'air, mais le grand n'y était plus. Cependant, un détail attira l'attention du mage. La fournaise de lave, au fond du cirque, s'était calmée, lissée et, si cela était possible, s'était fait plus chaude encore. Il nota que les dragons évitaient soigneusement à présent de survoler le cratère. Un fin sourire vint jouer sur ses lèvres. La réponse ne tarderait pas.
Alors même qu'il achevait de se redresser, la montagne se mit à trembler silencieusement. Celimbrimbor se campa au sol et reporta son attention sur le lac de lave.
Six pointes d'ailes surgirent de la lave, de la même couleur qu'elle, prémisses de la créature gigantesque qui s'en extrayait lentement. Une tête fabuleuse émergea à son tour, juchée sur un long cou aux reflets insaisissables. Il s'étirait vers un long corps longiligne surmonté de flammes et de fumeroles. Le dragon était tout constitué de lave et elle dégouttait de lui en lourde averse sans qu'il changeât de forme. Chaque battement d'ailes qu'il faisait pour s'élever en projetait un peu partout et pourtant il restait toujours identique. Un feu sans cause. Le premier de tout les feux.
Celimbrimbor respira calmement. Ou les dragons lui donnaient ce qu'il voulait ou il faudrait se battre avec un mythe fondamental pour l'obtenir. Il inspira doucement. Une certaine exaltation courrait dans ses veines alors qu'il passait en revue tous les sorts qu'il avait préparés en vue de ce moment, tous les tours qu'il pourrait jouer avant de s'effondrer, sans énergie. Et surtout, il attendit, toujours.
Enfin le dragon se trouva devant lui, sa gueule brûlante effleurant presque son nez. Chacun plongea son regard dans les yeux de l'autre. Un long moment de silence s'écailla entre eux, suivit d'un autre encore.
Le dragon ouvrit la gueule et exhala du fond de ses entrailles un grondement chaud. Il ferma la gueule. Entre son museau et l'elfe toujours impassible flottait une petite sphère de rien, jaune ou orange ou rouge, mouvante et ensorcelante.
« Voici. Que ta folie te mène où tu le souhaites. »
Celimbrimbor tendit les mains pour recevoir la sphère et la contempla un moment. Il s'inclina profondément.
« Je...
─ Silence. Va, et ne reviens plus. Tu n'es pas le bienvenu ici mais d'anciennes allégeances nous feront te laisser partir. Disparaît. »
Celimbrimbor s'inclina de nouveau, récupéra sa cape, en entoura la sphère et la mit sous son bras. Sous l'œil attentif du dragon, il s'éloigna. Le cadavre derrière lui fumait.
Celimbrimbor ne se retourna pas.

Celimbrimbor | 09/05/19 18:10

Et comme toujours, pour les comparatistes de pseudo-récits : [Lien HTTP]

Lucifero | 15/05/19 20:42

Voilà ce qui clos ce chapitre en beauté !

Celimbrimbor, devenue sage avec l'age :D (ou pas)

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Lucifero, à votre service.
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