Forum - Chapitre premier: La nécropole de Nuada

Index des forums > Rôle Play > Chapitre premier: La nécropole de Nuada

Page précédente 1 2 suivante

Arma' | 02/09/10 18:24

Partie 2

La nuit était en train de tomber sur les Terres de Dana, lentement, c'était une belle soirée d'été qui se finissait. Même le cratère entourant le Krak de Noir-Feu semblait calme, adouci par les teintes du jour finissant.

Sans se soucier du temps ni de l'importance de la quête qui l'attendait, Arma' était bel et bien là, accompagné de ses deux goules contrairement aux désirs du Dragon... Il fit avancer son destrier au pas pour les derniers mètres qui lui restaient à parcourir, tout en contemplant le paysage qui s'offrait à lui.

Un vaste cratère, en activité, empli de lave, dégageait une chaleur infernale. Autour du volcan, des montagnes déchiquetées, chaotiques, sombres, se dressaient, menaçantes. Au centre du cratère lui-même, une puissante citadelle de guerre se dressait, construite de pierres noires, ornée de sculptures plutôt lugubres. De la rive, un étroit pont enjambait la lave pour rejoindre la porte principale, profondément engoncée dans la muraille. Trois herses étaient relevées, protégeant en temps de conflit la porte elle-même. Au-dessus du voyageur, sur les côtés, de nombreuses meurtrières, Arma' y sentit quelques regards qui l'observaient, la forteresse était gardée, malgré que nulle âme ne soit visible.

Cependant, l'être mystérieux, voyageant plutôt léger par habitude, avait choisi cette fois de revêtir une armure lourde noire et "Démence", sa claymore était elle aussi de la partie.
Une fois arrivé, d'un geste sentencieux il renvoya sa monture et d'un regard méprisant il ordonna à "Léza" et "Freud" de rester au seuil de l'antre de Noir-Feu. Les goules auraient bien aimé lui faire une réflexion mais elles connaissaient bien trop leur maître pour savoir que le moment était mal venu...Même si la perspicacité n'était pas leur fort...elles jugèrent que rester hiératique était cette fois la bonne solution.

D'un pas lourd, il franchit le pont, gravit les quelques hautes marches menant à l'entrée. Il fit face à la porte fermée, dont il actionna le lourd heurtoir en forme de patte de dragon après une brève hésitation.

Quelques minutes s'écoulèrent, puis une jeune humaine aux longs cheveux bruns, d'une vingtaine d'années, ouvrit la porte, qui pivota sans un bruit. Elle eut un chaleureux sourire, puis s'inclina:

-Bonjour, Messire. Vous êtes Arma', je présume? Soyez le bienvenu. Mon Maître, Noir-Feu, et la Dame Vampire viennent de partir. Voulez-vous que je lui demande de revenir? Ou préférez-vous que je vous indique le port? Un bateau pourrait vous mener rapidement à destination.

-Je vous remercie pour votre accueil et ne voudrai porter préjudice à votre maître. Indiquez moi où se trouve le port et je m'y rendrai de ce pas.

Les informations prises, il salua l'apprentie et se mit en route. Les goules, le voyant revenir obéirent sans discuter au claquement de doigts cinglant qui avait fusé à leurs oreilles, et lui emboîtèrent le pas en direction du port. Après une longue marche silencieuse dans les terres hostiles du dragon, ils finirent par arriver en vue du port à la nuit tombante, simple petit village aux toits de chaume accolé à une falaise, qui semblait étrangement fragile devant la fureur de l'océan gris à la houle prononcée.
Parmi les barques amarrées, un voilier blanc d'aspect ancien se distinguait de cette obscurité chaotique, ses formes élégantes dévoilant une construction elfique. Les trois individus se dirigèrent donc vers ce dernier, où ils furent accueillis par un unique elfe dissimulé par un large manteau de pluie moiré.

-Seigneur Arma'. Je vous attendais. Montez, le temps presse.

Une fois à bord, Arma' ordonna à ses pantins de se faire le plus discrets possible dans la cale du bateau. Soucieux de les occuper, il leur dit aussi qu'en attendant sa venue, ils pouvaient se délecter des quelques rats qu'ils y trouveraient.Tout en regagnant le pont du voilier, il sentit une nouvelle présence et, là, devant lui se tenait...

---La quiétude avant la fureur.---

Celimbrimbor | 02/09/10 18:42

Intéressant, toujours.

La Demeure Franche : [Lien HTTP]

Tala | 02/09/10 19:00

...Une jeune femme ... Les cheveux épars après sa course folle, une mèche mauve lui tombant devant les yeux, elle le regardait, un mélange de contentement et de soulagement dans les yeux. Elle s'avança vers lui, et vint le saluer.

- Seigneur. La jeune femme de la Tour du Silence m'a prévenu qu'un homme était déjà en route pour rejoindre le bateau... Je suppose qu'il s'agit de vous. Je suis Tãla. Je crois que nous avons tout deux la même destination...

Alors qu'elle parlait, le Passeur s'affairait sur le pont, lançant sans plus attendre l'appareillage du voilier...

..............

La nuit étoilée était fraîche, mais belle et paisible. La meute venait de mettre à terre un élan, et en appréciait la chair encore chaude d'une vie à peine éteinte. Ils dévoraient goulûment, le sang coulant sur leurs gueules. La louve blanche, elle, se tenait à l'écart, se toilettant machinalement, tout en regardant avec bienveillance ses amis. Son esprit était ailleurs. Tout était réuni en cette nuit d'été pour que la paix soit sienne. Pourtant, elle sentait les Ombres, proches, grondantes, l'envahissant peu à peu... Son instinct la taraudait, et au fond d'elle même, la conviction naquit que son Aimé courrait un grave danger...

Un vieux loup gris, à l'oeil droit balafré, délaissa la carcasse, s'approcha d'elle, et vint frotter sa tête avec douceur contre ses épaules, en un geste fraternel. Ses pensées vinrent à la louve. Il comprenait. Il veillerai sur les leurs. Le temps était compté.
Reconnaissante, elle le regarda en lui envoyant toute sa gratitude, dans un langage silencieux, compréhensible d'eux seuls.
Elle poussa un long hurlement à la nuit, le museau levé vers les cieux, puis partit au galop en direction du Krak du Dragon.

Le chemin rocailleux et malaisé lui fit perdre de précieuses minutes. Elle n'eut cependant aucune difficulté à se repérer parmi les méandres rocheux, se fiant à son puissant odorat, se dirigeant droit vers la Tour du Silence. Arrivée au pied du bâtiment, elle jugea bon de reprendre forme humaine, et s'avança vers la porte dans un pâle halo lumineux. Elle frappa sans attendre, et fut accueillie par une jeune femme, aux cheveux d'ébène, à la jeunesse florissante. Il ne lui fallut que quelques instants pour avoir les informations nécessaires. Il était parti, en compagnie d'une Vampire. La crainte la tenailla un peu plus : nul doute qu'ils étaient partis pour de sombres territoires... Le bateau! Il fallait qu'elle l'attrape avant qu'il ne parte, sans quoi, elle devrait attendre encore trop longtemps. La jeune femme brune lui appris également qu'un Seigneur, accompagné de deux goules, se dirigeait lui même vers le quai, et qu'il ferait probablement avancer l'heure du départ.
Sans plus attendre, Tãla fit demi tour, se métamorphosa de nouveau, et reprit en sens inverse sa course folle. Cette fois, le terrain lui parut moins hostile, plus familier, et elle le traversa en trombe, tendue vers son objectif, atteindre le voilier avant son départ.

Elle déchira la nuit, galopant de toutes ses forces vers le port, le vent lui fouettant allègrement le museau, l'obligeant à garder les yeux mi clos. Enfin, elle arriva en vue du hameau, accroché à la falaise, dont quelques torches éclairaient faiblement les rues baignée par l'air marin. Rapidement, elle revêtit apparence humaine, et reprit sa course. La fille lui avait parlé d'un voilier blanc, fuselé par des âmes elfiques, se distinguant nettement des autres. Sans compter qu'il était prêt à lever l'ancre, en pleine nuit, et que la forte odeur des goules à son bord ne pouvait lui laisser aucun doute.
Avec agilité, elle sauta à son bord, et atterrit souplement, un genou sur le pont. Un homme vint à elle, une capuche cachant largement les traits de son visage. Une rapide étendue de ses sens lui apprit qu'il était seul à bord, hormis le mercenaire et ses goules. De sa voix claire, elle lui énonça les raisons de son intrusion à bord. Sans mot dire, le Passeur se contenta de hocher la tête, puis de partir lever l'ancre. C'est alors qu'elle aperçut l'homme, qui allait lui aussi en rejoindre la Vampire et le Dragon ....

..................

Edité par Tala le 02/09/10 à 19:02

Noir-feu | 02/09/10 20:07

Le Passeur sourit légèrement sous son ample capuche, voilà bien longtemps que nulle âme n'avait traversé...Il se relia à son navire, et déploya la fine voilure, semblable aux ailes d'un cygne majestueux. Comme par enchantement, les amarres se détachèrent, le vent se fit coopératif, et le navire s'éloigna de son quai, prenant rapidement une allure impressionnante. Malgré la forte houle soulevée par les vents tempétueux, le bateau fendait les vagues sans en ressentir les effets, accélérant toujours peu à peu.

Au bout d'une demi-heure, le vaisseau entra dans une épaisse nappe de brouillard, rendant toute vision à plus de quelques mètres impossible, assourdissant subitement le vacarme des éléments. Quelques minutes encore, puis les voiles remontèrent, le navire perdit de la vitesse, et pivota rapidement, venant s'échouer doucement sur une plage de sable gris. L'elfe s'approcha de ses passagers, et murmura:

-Vous voici arrivés sur la Terre de Nuada. Une Terre sacrée, que bien peu ont visitée, ou même aperçue. Ici demeurent les Gardiens, présents, passés, futurs, de ce lieu ils veillent sur la Terre de Dana. En suivant l'axe du navire, vous trouverez un début de sentier. Suivez-le, ne vous en écartez sous aucun prétexte, pour votre vie. Ou non-vie. Il vous mènera à la Bouche des Abysses, après s'être enfoncé entre deux falaises. Vous trouverez un escalier glissant, qui descend longtemps. Puis un pont qui traverse une faille vous amènera devant la Porte aux larmes de sang. C'est là qu'ils se rendent. Je ne sais pas ce qu'il y a après. Que Dana vous garde dans cette folie.

Il s'inclina brièvement, puis attendit que ses passagers descendent. A peine furent-ils sur le sable que le navire se retira silencieusement, se perdant aussitôt dans les brumes.

Tala | 02/09/10 20:48


Nuada... Le nom résonne étrangement à l'oreille tendue vers le lieu austère sur lesquels les voilà échoués. La fille-louve gratifie le Passeur d'un signe de tête, mémorisant attentivement ses précieuses indications. Son compagnon de fortune semble tendu. Fait exprès, ou oubli de sa part, elle prend note que les Goules sont restés à fond de cale. Ne lui en faisant pas part, n'aimant guère cette espèce, et craignant qu'à trop grand nombre, ils ne se fassent trop remarquer, elle fait ses adieux au Passeur. Celui-ci s'éloigne, et le bateau effilé se trouve bientôt happé par la brume épaisse, qui cache l'île aux voyageurs impétueux.

Le sable est gris, aussi menaçant que le paysage qui leur fait face. Plus d'un aurait rebroussé chemin à cet instant précis, écoutant les instincts primitifs qui diffusent au corps et à l'esprit une sourde mise en garde : danger... Laissant aller ses sens alentours, elle constate qu'elle ne perçoit nulle âme qui vive, pas plus qu'elle n'aperçoit l'ombre d'un végétal bienfaiteur ... Nul bruit ne semble émaner de l'île, et ce silence inquiétant n'est pas sans la rendre nerveuse...

Imperceptiblement, elle se raidit, se tend, prête à parer à tout instant à une attaque, venant d'une menace invisible. Louve, un grondement sourd surgirait de ses entrailles ... Humaine, ses poings se serrent ... Silencieuse, sans attendre le mercenaire, elle se dirige dans la direction indiquée . Le sentier mentionné par le Passeur est là, parterre de pierres dardant leurs côtes effilés, dédale rocailleux, humide, noirâtre, dans lequel elle s'engage sans attendre.

Alors qu'elle avance, une partie d'elle même se perd dans ses pensées. Elle ignore, le but de cette expédition. Ce qui a pu poussé le Dragon et la Matriarche à s'engager sur cette terre hostile à la Vie ... Elle ignore tout également, de son compagnon de fortune, des raisons de sa présence ici. Elle le sent, derrière elle, qui rythme ses pas aux siens. Elle ne lui pose pas la question, pas plus qu'elle n'ouvre les lèvres pour aucune raison. Elle a la sensation que la moindre parole viendrait à briser le silence maléfique dans lequel ils se trouvent, attirant à eux des assauts indésirés, mortels .... Une rumeur, venue des Ages, lui scande inlassablement, que le danger est immense, imprègne en elle un sentiment d'urgence, pour Lui...
Elle se met à courir, à pas feutré, sans bruit aucun, d'un mouvement souple et précis, traversant d'un trait l'atmosphère lourde et inquiétante, répondant à l'appel de son instinct ....

Le sentier est à découvert, ne leur permet nul camouflage. Ses traitres pierres effilées roulent parfois sous ses cuissardes, dans un bruit léger, qui lui paraît pourtant être un bruit de trop ...Son compagnon toujours derrière elle, se mure lui aussi derrière une barrière de silence. Elle suppose que comme elle, il ressent l'importance, de faire le moins de bruit possible. Ils courent tous deux, un peu moins vite à mesure que le chemin devient escarpé.

Soudain, elle perçoit, à quelques mètres en avant, la présence d' êtres de l'au-delà. Elle cesse brusquement sa course, faisant signe à son compagnon qu'un danger les guette en avant. Lui intimant de rester en retrait d'un signe de la main, elle sort du sentier, rampante, se terrant derrière des rochers bienvenus et s'avance en direction de la présence.

Elle l'aperçoit alors. Ce ne peut être qu'elle. La Bouche des Abysses, s'enfonçant entre deux collines, noires, parsemées ça et là d'arbres gris décharnés, qui lui font songer à des squelettes en souffrance, élevant leurs bras vers le Ciel, quémandant un Salut... A l'entrée de l'Abysse, deux morts vivants, avancent très lentement, glissant presque à même le sol. Elle s'étale un peu plus sur le sol rocailleux, laissant ses yeux embrasser les alentours. Vides. Elle revient aux gardiens spectraux, qui s'éloignent lentement, continuant sans doute une ronde connue d'eux seuls...

Revenant en arrière, elle rejoint le mercenaire, à qui elle fait signe, chuchotant cette fois :

- Allons-y, tant que la voie est libre. Dépêchons nous, ces gardiens ne me disent rien qui vaillent ...

Sans attendre, elle s'élance elle même en direction de la faille abyssale .

Arma' | 02/09/10 22:36

Arma' était un être qui ne se préoccupait par habitude que de sa propre personne et qui ne reculait devant rien, mais depuis qu'il avait posé pied à terre, des questions sans réponses s'entrechoquaient dans sa tête, laissant place à une émotion enfouie et guère appréciable...
La peur de l'inconnu, la peur de plier l'échine, celle de tomber dans les abîmes et de ne jamais se relever. De surcroît, il ne connaissait rien de la personne qui l'accompagnait et avait omis de récupérer les deux affreux, terrés dans la cale du bateau elfique qui lui, n'avait pas tardé à mettre voile, une fois la basse besogne effectuée.

Contraint de faire preuve d'une confiance aveugle en l'aventurière qui l'accompagnait, il écouta, puis obéit avec une rigueur militaire aux ordres et conseils de cette dernière. Peu lui importait ce qu'elle représentait, il devrait désormais avoir foi en elle, comme elle devrait pouvoir compter sur lui.
Le mercenaire avait le visage caché par un heaume noir, aussi ne put-elle percevoir l'inquiétude qui le gagnait et grandissait à chaque pas de plus en les terres hostiles de Nuada.
Tout en jetant un dernier regard aux gardiens, il mit la main au pommeau de sa claymore et emboîta le pas de la nouvelle venue en direction de la Bouche des Abysses, lançant dans un bref murmure:
-Arma', tel est mon nom...
A ce moment l'élocution de sa voix en disait long sur les craintes de ce dernier qui se voulait être quelqu'un d'inébranlable.

---La quiétude avant la fureur.---

Tala | 03/09/10 07:06

Freinant sa course, elle se retourne en entendant l'intonation de la voix de son compagnon. Murmure tremblant, telle une flamme vacillante. Elle plonge son regard améthyste dans ses yeux, et le détaille soudain. Elle tente, de lui insuffler, comme elle l'aurait fait avec ses loups, des ondes apaisantes, tout en prononçant elle même dans un murmure serein :

- Arma'... Je ne sais ce qui vous pousse vous aussi à venir ici... Je ne peux vous mentir en vous disant que tout va bien se passer... Je n'y crois pas moi même...

Serrant de nouveaux les poings, le regard tourné vers l'Abysse :

- Mais nous sommes ici, et nul recul ne nous est permis. Le Danger qui rôde est ... incommensurable. Et nous devons aller le rejoindre. Mais il nous faut garder confiance, et force. Sinon, nous courons à notre perte.

Sans plus de mots, elle reprend sa course, et s'engouffre dans la bouche infernale de l'Abysse...

...

Il y fait noir, et elle perçoit à peine les lieux dans lesquels ils s'enfoncent, avec ses sens humains... Sous ses pieds, un escalier, semble tomber à pic vers les profondeurs terrestres. Elle porte machinalement la main sur la Dague, que le Dragon lui a confié un soir, y trouvant réconfort... Les parois dégagent une humidité, qui sature l'air et rend l'atmosphère lourde et pesante. Une atmosphère qui s'accorde parfaitement au coeur de la fille louve, qui bat de plus en plus fort, tenaillé par de vaines appréhensions. Le silence règne également en ce lieu obscur, percé régulièrement par quelques gouttes d'eau, tombant mollement sur le sol rocailleux, ou à même quelques flaques qui se sont formées au fil du temps.
Prudente, elle ralentit ses pas, et pose une main sur la paroi, qui la guide alors vers les entrailles abyssales, dans une descente interminable... A l'affût, elle ne perçoit ici non plus, nulle âme qui vive. L'obscurité les avale, et, sans les quelques pierres phosphorescentes, le mercenaire et elle n'auraient guère pu poursuivre le chemin.

Soudain, ses bottes ne rencontrent plus de marches. Posant prudemment son autre pied devant elle, elle constate que l'escalier touche enfin à sa fin. S'arrêtant, elle s'imprègne de l'endroit avant de poursuivre sa route. Le noir est le plus total, les entrailles de cette terre ne comportant plus aucune pierre luminescente bienvenue. Elle se concentre, laissant aller ses sens alentours. Vide. Son instinct lui souffle qu'ils se trouvent dans une caverne. L'air y est plus frais, et les parois ne l'oppressent plus, et elle les imagine, s'étendant très largement de part et d'autre. Méfiante, elle avance lentement, devant elle. Sans s'en douter, elle marche sur le pont de pierre, l'immense, bordé d'un trou béant assassin.
Elle trébuche. Son pied ne rencontre que vide, et elle bascule, en avant, ayant juste le temps de se rattraper sur le maudit pont avec ses mains. Ainsi couchée, le pied balayant le vide, elle réalise qu'elle se trouve sur une arche. Tâtonnant devant elle, elle trouve une pierre de taille moyenne. Elle la jette dans le trou, et attend... La pierre se répercute, une fois, deux fois... puis plus rien... quelques secondes... quelques minutes... de longues minutes... puis un écho remonte de la terre, indiquant à la louve que le minéral a enfin cessé sa course folle. Elle s'agenouille, soucieuse. Des minutes. Elle réalise le danger qui s'étend sous ses pieds, et que la chute lui serait fatale. Chuchotant, elle prévient le mercenaire :

- Prenez garde ! Une abysse monstrueuse vous fait face, Arma' !

Puis elle se redresse, et reprend son cheminement, se laissant guider par la roche sous ses pieds... Enfin, ses mains rencontrent une nouvelle paroi, face à elle. Tâtonnante, elle constate que la pierre est ébréchée et coupante. Humant l'air, elle sent son coeur s'emballer quand elle reconnait l'essence du Dragon. Il est passé par ici, et voilà peu ! Une froide lumière émane des boyaux béants qui s'étendent par delà la brèche. Oubliant son compagnon, persuadée qu'il est sur ses talons, elle s'avance dans l'intestin caverneux, ses yeux s'habituant peu à peu à cette lumière retrouvée.
Elle se laisse guider par les traces du passage de son Aimé, et de la Vampire, dont elle commence également à distinguer l'essence particulière. Les parois sont gravées, de monstres, destinés sans doute à faire frémir les fous s'aventurant jusqu'ici. Elle frissonne, tendue vers l'avant, réalisant que ces gravures impliquent une présence, vivant sans doute au coeur de cet endroit malsain. Ses sens l'avertissent du danger imminent, et elle lutte contre elle même, dans une volonté infaillible, pour continuer à avancer ainsi vers une mort certaine. Mais Il est là, quelque part, et Il court un grave danger. Elle ne l'abandonnera pas.

S'enfonçant, toujours plus profondément, elle traverse un boyau, emplit de caveaux éventrés, laissant entrevoir leurs morts squelettiques figés dans des rictus démoniaques. Serrant les poings, elle traverse rapidement l'endroit, se forçant à garder les yeux fixement rivés devant elle. Étrangement, elle note que ce cimetière laisse lui aussi une trace de vie, quelques bougies consumées témoignant de rites, effectués par quelques créatures maléfiques... Elle avance toujours, ses pas, bien que feutrés, résonnant étrangement à ses oreilles.

Les boyaux s'enchaînent, et déclinent soudainement encore plus profondément sous terre. Elle avance, jusqu'à apercevoir de la lumière. Non plus celle des pierres phosphorescentes, mais une lumière chaude, vacillante, celle qui émane de bougies, récemment allumées ... Une odeur acre lui envahit les narines, manquant de lui faire briser le silence par une toux indésirée. Prudemment, collée à la paroi, elle s'approche, laissant aller ses sens à la rencontre du lieu. Vide. Se dégageant de la semi pénombre du boyau, elle pénètre dans la salle lentement.

Trois sarcophages lui font face, éclairés timidement par quelques sombres bougies. Peints de couleurs vives, ils se détachent subtilement de la monotonie caverneuse, et la louve s'approche lentement d'eux, étudiant d'un oeil avisé les scènes les décorant. Arrêtant là sa poursuite pour le moment, elle attend le mercenaire ...

Edité par Tala le 03/09/10 à 07:07

Vormonta | 04/09/10 12:05

[Continuez c'est très sympa ! ]

Tala | 13/10/10 18:49

Partie 3 : Rencontre dans les tréfonds

Un bruit de course effrénée se fait entendre dans le sombre couloir inexploré. Le coeur de la fille louve bondit, et se serre, lui arrachant un hoquet, alors qu'une part d'elle même sait déjà dans quel état se trouve son compagnon. Elle voit à peine la Matriarche, et entend encore moins sa voix, alors que ses yeux se posent sur le corps que la Vampire transporte. Elle sent son Essence, et sait qu'il n'est pas mort... pas tout à fait.

Elle entre dans une rage folle, et dans un hurlement, une puissance lumière envahit la salle ténébreuse, avant de s'estomper quelque peu. Un loup blanc, d'une taille démesuremment grande pour son espèce, rayonnant d'une aura destructrice, se tourne vers les sans-vie qui commencent à affluer par l'entrée du boyau. Un long hurlement de mise en garde. Les babines retroussées, tous crocs dehors, et le loup entre dans une danse mortelle. Il évolue avec une agilité étonnante étant donné sa taille et la petitesse des lieux, déchirant des chairs en putréfactions, arrachant des membres, mordant à pleine gueule l'ennemi, dans un ballet mortel accompagné par ses grognements de rage furieuse. Etonnamment, son pelage garde sa couleur éclatante, comme si l'animal était protégé par un bouclier invisible. D'un bond sur le côté, il évite de justesse un ennemi, avant de le pourfendre d'un coup de griffes acérées. Il tournoie, grogne, déchire, haletant, rugissant, laissant libre court à la fureur de la vengeance....
_________________

Lancwen de Sigil | 13/10/10 18:53

La vampire s'est déjà agenouillée derrière un des sarcophages, protégeant un instant ses yeux de la lumière intense projetée par la transformation de Tãla. Elle sait que le temps est compté tant pour Noir Feu que pour les autres. Elle murmure à l'oreille du dragon quelques mots tout en apposant ses mains sur sa poitrine.

_ Ne me lâchez pas maintenant, j'ai besoin de vous!

Une lumière douce irradie des paumes de la Matriarche, baignant le corps meurtri du seigneur d'Obsidienne. Les saignements s'arrêtent, les plaies les moins profondes se referment, la vampire ne peut faire plus, la vie de son compagnon d'aventure n'est plus entre ses mains, il faut maintenant fuir le plus rapidement possible.
Lancwen se relève et crie un avertissement au loup.

_ Tãla! sortez du tunnel!

Puis elle concentre des éclairs dans ses mains, formant un sorte de boule de plasma qu'elle projète vers la voute du passage. L'impact envoie des morceaux de rocs en tous sens et provoque l'éboulement du boyau stoppant ainsi le flot des assaillants au moins pour un temps.

_ Aidez moi à porter Noir-Feu à l'extérieur...

Tala | 13/10/10 19:04

L'animal en furie s'écarte d'un saut agile, sans tourner le dos aux ennemis ne serait-ce qu'une fraction de seconde, alors que s'effondrent des masses rocailleuses sur leurs êtres décharnés et macabres, les bloquant momentanément.

Le souffle court, le loup s'arrête. Ses grognements et mouvements bourdonnent à ses oreilles, alors que de nouveau les paroles de la Matriarche lui parviennent difficilement, et qu'il se laisse envahir par un monde évoluant soudain au ralenti. Un instant, le loup ne sait plus... S'acharner sur les sans vies, voilà son besoin primitif. Ne pas se retourner, ne pas Le voir ainsi... Laisser cette réalité dans le domaine du chimérique...

Mais il ne peut lutter contre ce qui est. Il ne peut retenir l'esprit de la fille plus longtemps, ni perdre de temps à s'accrocher à de vains combats. Ses yeux froids se posent alors sur le corps mutilé, dont les pouvoirs de la Vampire atténuent les saignements et les plaies.

La jeune humaine reprend sa forme, et se précipite auprès de son Aimé. Aucune parole ne parvient à franchir le seuil de ses lèvres, alors, ses yeux devenus brûlants rencontrent ceux de la Vampire, remplaçant tous propos superflu... Ensemble, elles l'entraînent dans les dédales, en direction de la sortie, le mercenaire à leurs talons ....

Edité par Tala le 13/10/10 à 19:04

Noir-feu | 13/10/10 19:28

Partie 4: Le Rire du Chaos

« Au commencement de la fin, lorsque débutera la Voie de la plus sombre gemme, se rassemblera ce qui était partagé, ne formera qu'une ce qui était trinité, ne sera plus qu'un ce qui était dualité. Et ces deux là même se fondront dans le creuset des âges, y seront forgés par souffrance et désespoir. L'Eclat Ténébreux sera alors trempé au fiel de la haine comme de la terreur, et se dressera inexorable sur le tranchant des mondes pour qu'enfin advienne son règne. »

Livre des prophéties d'Elladyl, chapitre douzième.

Le lien entre le corps mourant du Dragon et son âme déchiquetée s'étend, se distend, fragile fil qui s'amincit inéluctablement, à mesure que son esprit s'éloigne vers les limbes, ou quelque autre lieu, il ne le sait pas. Il perçoit avec une étrange clarté que son réceptacle de chairs, ce qui fut son corps, est transporté quelque part, mais ignore où, ne peut y attacher la moindre espèce d'importance. Tout est vain. Infiniment et définitivement vain. Ne demeure que la souffrance, un sentiment déchirant de pertes irréparables, la somme d'infinis échecs, qui tous se mêlent en une déliquescente brume tourmentée aux reflets d'ichor. Plus loin...toujours plus loin...franchir les frontières absurdes de la vie, de la mort, le chaos, le vide...le vide...ne plus penser, ne plus lutter, ne plus être. Enfin.

Pour une raison qui échappe totalement à l'âme brisée, le lien à son être de matière se raffermit imperceptiblement, la tire faiblement en arrière, à la manière d'un élastique un peu trop tendu. Voudrait-elle revenir ? Ou en finir ? Pourquoi choisir, pourquoi même y songer ? Chahutée par des volontés qui ne lui doivent rien, la fantomatique flammèche se laisse bousculer, indifférente, incapable de volonté propre, elle qui, selon les paroles d'un poète, enchaîna les êtres à sa Voie.

Hagards, les yeux vitreux, semblables à des pantins dénués de marionnettistes, des milliers de macchabées piétinent, si serrés que le moindre mouvement, le voudraient-ils, leur serait impossible, condamnés à suivre le courant sans rémission qui les conduit à l'ultime porte, cet huis à l'aura maléfique source de tant de terreurs : la Porte des Limbes.

Dominant cette masse grouillante de toute sa redoutable indifférence, une sombre silhouette encapuchonnée de voiles en lambeaux trône, se penchant sur la foule de temps à autre, rarement, pour une raison connue d'elle seule. Elle se courbe soudain plus largement, prenant appui de ses mains squelettiques sur les accoudoirs jaunasses de son siège d'ossements, se gratte le fond d'une orbite d'un doigt dénué de chair, étonnée, presque, si cela pouvait avoir un sens pour elle. Que fait-il ici, celui-là ? Et qui est parvenu à le réduire à tel point, alors qu'elle ne l'a pu ? Cela ne l'amuse pas, ne lui plaît guère plus, elle qui attendait avec une jouissive impatience qu'il vienne la défier enfin, la libérer de ses obligations, peut-être même, qui sait ? Il était si...obstiné.

Elle suit de l'index ce fil de vie sur le point de se rompre, observe d'un air dubitatif la Vampire penchée sur le tas de chairs sanglantes qui fut un corps, détaille un instant la Louve, succulente proie à venir, s'amuse de la voir se démener pour empêcher toute intrusion dans son temple. Oui, son temple. A qui d'autre pourrait bien être dédiée une nécropole, après tout, ricane t'elle. Elle se demande, un instant, si elle doit faire quelque chose, ou se contenter d'observer, et de prélever les âmes qui lui sont dues, de toute éternité. Elle tâte d'un doigt squelettique pensif le fil de sa faux, soupire doucement, légère brise qui souffle entre ses côtes décharnées. Elle se dit qu'il l'a bien fait rire, quelques fois. Qu'il était bien prétentieux, aussi. Était-ce cela qui l'amusait ? Peut-être, oui. Soit. Elle agira. Du manche de son létal outil, elle repousse délicatement la petite flammèche vers son corps, murmurant d'une voix que l'on pourrait presque qualifier d'aimante :

-Vas, Dragon...vas retrouver ton monde. Mais...laisse-moi ton humanité. Tu n'en auras plus besoin. Et sers-moi. Oh oui, sers-moi bien.

Et la Mort éclate d'un rire grinçant, toussoteux, macabre, se détournant déjà. C'est qu'elle a du travail, la Mort. Une montagne de travail. Il s'agit de ne pas traîner.

Eigoel Nahb | 13/10/10 19:38

Son errance commençait sérieusement à l'agacer. Elle ne devait pas rôder depuis plus d'un jour ou deux. C'était très difficile pour elle de se repérer dans le temps. A croire qu'ici, cette notion n'existait pas. Et que le nord et le sud étaient aussi abstraits que pouvaient l'être la religion aux yeux des athées. Pas de direction, pas d'aube ni de crépuscule. Le Néant. Marchait-elle seulement ? Était-ce de l'air qui emplissait ses poumons ? Comment savoir... L'humaine s'était arrêtée devant une porte. Encore une. Ce devait être la centième qu'elle allait franchir. D'un geste las, son bras se dressa, et sa paume vint s'écraser contre le marbre de l'huis. Étonnamment légère, la porte n'émit aucune résistance et s'ouvrit avec grâce, invitant Eigoel à continuer sa visite.

Cette fois, la jeune femme s'arrêta net, tandis que devant elle, une file impressionnante d'âme s'étendait à perte de vue. Haut de plafond, composé d'arcades en plein cintre, le lieu dont on ne distinguait pas les murs semblait murmurer. Ou était-ce ces morts, serrés les uns aux autres attendant leur jugement dernier ? Leurs regards étaient vides, absents. Peut-être n'étaient-ils pas conscients d'où se trouvaient ; ou leur esprit divaguait-ils dans de récents souvenirs, tâchant de se remémorer leur dernier souffle. La bâtisse n'était faite ni de pierre, ni de bois. Changeante, la matière semblait se remodeler sans cesse, à la volonté d'on ne sait qui. Ou quoi. A première vu, le blanc dominait, pareil à ce qu'un humain pourrait s'imaginer, bercé par les préceptes d'une croyance contant paradis et enfer. Blancheur rassurante qui encouragea Eigoel à faire quelques pas. Puis le décor s'altéra, devenant grisonnant, oppressant. Nonobstant l'espace assez large et aéré, un plafond bas de basalte aurait donné la même sensation. Le chapelet d'êtres avança d'un pas, créant une vague silencieuse vers le fond de la salle.

Un pas après l'autre, la jeune femme se hasarda parallèlement à la file. Les visages défilaient sous ses yeux. Un homme bavait, la barbe poisseuse, une elfe berçait quelque chose d'invisible dans ses bras, chantonnant à peine ; un nain avait le blair écrasé contre la croupe d'une marquise qui le précédait. Son casque fendu par le haut laissait une vue dégagée sur sa cervelle sanguinolente. Des pochtrons, des soldats, des hobbits, des barons, des boniches, des duchesses... Tous étaient finalement rendus au même point. Stockés comme des sardines.

Au loin, ce qui ressemblait à un trône jaunâtre s'élevait au dessus des prétendants au trépas. Un ramassis os entremêlés et élevés en assise, dossier et accoudoirs. Et planté là, le séant confortable, ce que les humains des Roches Roses appelaient : l'Ankou.

L'être maléfique présidait la séance. Il triait, observait, faisait son petit bazar. Ce qu'Eigoel avait toujours redouté se trouvait concrétisé, à quelques foulées. Elle déglutit. Avant de se rendre compte qu'elle allait tout droit vers la phase ultime de son existence.

Elle fit un pas en arrière, lorsqu'il y eut du mouvement.

Un souffle avait traversé l'espace. Le Seigneur-fait-d'os s'était agité, si l'on comparait ses lents mouvements à l'ambiance générale. Sa guillotine semblait le chatouiller. Les voiles lacérés de sa couvrante dansaient à peine, comme au ralenti. Eigoel ne s'était pas faite remarquée. D'ailleurs, elle ne n'intéressait personne ici, ce qui la rassura.

Quelque chose remua. Elle ne sut dire quoi. Enfin elle remarqua l'épaisse porte derrière la Sombre Faucheuse. La dernière passe. Celle qu'on ne voit qu'une fois. Quoi que. « La porte des Limbes... » C'était comme si on lui avait soufflé. Un autre vacillement, insituable, puis une aura connue. Bien connue même, fréquentée, et de près. Celle de celui avec qui elle avait partagé sa nuit, un ou deux jours auparavant. Ce qu'elle croyait. La jeune femme ne pu qu'ouvrir la bouche, sans qu'un son n'en sorte. Le halo s'était déjà évanouit. Pareil à tous ces moments passés dans le Néant, le temps l'avait trahit. D'un claquement de doigt tout était finit. Pensive, un tantinet désespérée, Eigoel passa sa main gauche sur son épaule droite qu'elle frictionna distraitement. Son anneau témoin de son union frôla son tatouage argenté. Flou, il était devenu mat. Les contours glissaient sur sa peau en un dégradé tirant sur le beige.

Noir-feu | 13/10/10 19:48

Dans la salle aux sarcophages, ce qui fut le Seigneur d'Obsidienne entrouvre un oeil gonflé, le referme aussitôt sous l'afflux d'une douleur insupportable. Il a soif. Si soif. Ses lèvres lui paraissent de verre pilé, le sang qui pulse faiblement dans ses veines et plus encore en dehors, lui inflige une torture démente qui le rejette dans l'inconscience presque aussitôt. Il n'a que le temps de souffler, si faiblement qu'il ignore si la femme penchée sur lui l'aura entendu:

-Mon...Krak...les...les...sou...terrains ...Ell...Ellyn n...

Douce torpeur, inconscience bienfaisante, le Dragon se laisse à nouveau sombrer, flottant dans une brume d'inexistence, se rapprochant à nouveau de ces limbes si effrayantes et attirantes à la fois. Soudain, quelque chose le percute de manière diffuse. Un étrange sentiment, mêlé d'urgence et d'étrangeté. Il ne s'en aperçoit pas, mais sur son corps ravagé, un tatouage s'éclaire d'une lueur argentée, de plus en plus vive, de plus en plus pressante. L'âme du Noir tente de se rassembler, de se concentrer, péniblement, lentement, lourdement. Son regard mental parcourt la file interminable des morts, visages inconnus, par milliers. Par centaines de milliers. Folie...elle guette, prête à s'accaparer définitivement de l'âme fracturée du Dragon, le submergeant de la vision de cette foule de vies achevées, espérant de même achever la sienne. Mais la Mort a jugé, et l'âme tient bon, quelques secondes encore.

Le corps du guerrier se crispe soudainement avec violence. Ses yeux s'ouvrent, immenses, emplis d'une incompréhension totale, d'une négation démente. Un cri rauque qui s'achève en toux écarlate le replonge dans le gouffre de l'inconscience aussitôt. Et l'âme de hurler de même à la lisière des limbes, s'attirant le regard courroucé de la Mort.

-Encore là, toi ? Ne t'ai-je donc pas renvoyé ? Ou alors tu tiens à le passer cet huis ?

-Que fait-elle là ?!? C'est impossible !!! S'indigne l'âme du Noir, rageuse, soudain.

-De qui parles-tu ? Toutes viennent à moi, toutes sont à moi, un jour ou l'autre.

-Elle !!! Désigne l'âme, de plus en plus consistante, de plus en plus assurée.

La Mort examine celle qui lui a été désignée, puis rit, macabre, sarcastique.

-Oh. Elle a erré longtemps, très longtemps. Son heure est venue, maintenant, elle est à moi.

-Non ! Pas Elle !!! Elle est mienne, comme je suis sien ! Lâche-la immédiatement !

Pensive, la faucheuse observe le présomptueux, se demandant si, en fin de compte, elle a bien choisi...elle murmure, d'une voix caressante :

-Tu la croyais morte pourtant...depuis longtemps...le prix sera élevé, Dragon, si tu la veux...tu le sais ?

-Quel prix ? Que veux-tu ?

-Moi ? Rien. Aujourd'hui, dans dix jours, cent ans, que m'importe ? Rien. Elle est à moi, et toi aussi. C'est à la Vie que tu payeras tribut, ne le comprends-tu pas ? Qu'en pensera la jeune louve... ?

L'âme vacille un bref instant, se diluant dans une nasse de questions sans réponses, puis se raffermit, implacable :

-C'est mon problème. Je ne peux pas la laisser ici. Je ne peux pas !

-Je vois...alors prends-la. Mais...

La Mort se penche, frôle l'âme du Dragon du tranchant de sa faux, menaçante.

-Je ne t'accorderai jamais qu'elle, et elle seule. Es-tu sûr de ton choix, Dragon ?

-Oui ! s'exclame le Noir.

-Bien. Elle ne t'aime peut-être plus, tu sais, depuis tout ce temps. Mais tu as choisi. Vas, maintenant...

Et la Mort d'éclater d'un rire crissant, machiavélique, tandis que l'âme errante s'effraye, doute soudain, vacille sous la malignité de sa létale interlocutrice. Éperdu, privé de tout repère sérieux, l'esprit du Dragon se précipite vers celle qu'il ne croyait plus jamais revoir, doutant encore de la réalité de ces instants, hurlant silencieusement aux divins que s'ils se moquent de lui cette fois, ils le regretteront amèrement...

Eigoel Nahb | 13/10/10 19:56

L'Ankou s'ébranla à nouveau. Le défilé de charognes avança. Eigoel s'était arrêtée. Elle était très proche du siège à présent. Cette scène la fascinait. Quel simple mortel pouvait se vanter d'avoir déjà vu pareil spectacle, sans faire partie des figurants ? Le maléfique avait l'air contrarié, elle n'aurait su dire pourquoi. Son palpitant fit un bond dans sa poitrine lorsqu'elle sentit les deux orbites désertées la fixer. Sous sa capuche déchiquetée, la Mort l'avait remarqué un instant, avant de se détourner et de s'agiter à nouveau, silencieusement aux oreilles de l'humaine. La peur chatouilla ses tripes. Elle s'était approchée de trop près. Ses talons firent un demi-tour complet. Elle devait quitter cet endroit, et continuer à avancer, comme elle l'avait si bien fait jusqu'à présent.

La présence qu'elle avait reconnu refit surface. Cette fois, elle était plus distincte. Une sensation de mise en garde envahit les lieux. Des chuchotements fusaient, des quatre coins de la pièce, rageurs.

Son regard balayait les quelques colonnes de marbre, les innombrables défunts... Lorsqu'elle la vit. Cette aura qu'elle avait éprouvée jaillit sous ses yeux, au dessus des cortèges. Irrémédiablement attirée, Eigoel heurta certaines âmes qui la repoussèrent comme un seul homme, leurs pieds ne quittant pas leur place d'une toise. N'y prêtant guère attention, s'attelant plutôt à regagner son équilibre, la jeune femme leva une main incertaine. Les arabesques bleues sur ses bras s'enroulaient, pirouettaient. Suivant une logique inconnue, lovées le long des muscles, des articulations, jusqu'aux poignets, pour aller mourir sur le dos de sa dextre. Ses doigts se tendirent, près à effleurer cette forme qui s'approchait. Le contour se profila lentement, un visage se sculpta, et elle le distingua. La jeune femme s'extasia, un sourire éclatant venant déformer ses traits.

-C'est toi ! Sa voix fit écho dans l'espace. Tu tombes bien, je n'en trouvais pas la sortie... Et cette grande chose là-bas...

Elle avait pointé du doigt la Faucheuse sur son trône. Le ton de sa voix était détendu, calme. Comme si elle l'avait quitté la veille, et qu'il avait deviné où elle s'était fourrée...

Noir-feu | 13/10/10 19:59

L'esprit du Dragon se figea tout net, incrédule, abasourdi. Il suivit machinalement la direction indiquée par le doigt d'Eigoel, croisa les orbites sarcastiques de la faucheuse, puis se tourna à nouveau vers la jeune femme. Un instant, il tenta de dire quelque chose, mais visiblement, les mots lui échappaient.

Les morts firent un pas en avant, poussant Eigoel, et le Dragon réalisa brutalement en quel lieu ils se trouvaient. Retrouvant un peu de sa coutumière assurance, il écarta d'un regard menaçant les rangs qui enserraient Eigoel, s'amusant de voir que même morts, les êtres ressentaient encore de la peur. Il se demanda si cela était encore le cas de l'autre côté de la Porte des Limbes, mais préféra oublier très vite cette question, étant donné la dérangeante proximité de ladite porte.

Etrangement, un sourire semblait le disputer à une absolue stupéfaction sur les traits fantomatiques de Noir-Feu, qui laissa enfin échapper un profond soupir et s'approcha d'Eigoel avec une timidité inhabituelle. Parvenu devant elle, il parut hésiter une seconde, hébété, puis sourit, lentement, avant de prendre la main de la jeune femme pour la porter à ses lèvres sans substance.

-Fleur sauvage...tu...tu sais que...non, plus tard ! Viens ! Nous devons partir d'ici, vite ! Cette chère...amie va finir par se mettre en colère...et là on sera vraiment mal pris.
Il grimaça légèrement, puis d'une vaporeuse traction tenta d'entraîner Eigoel à l'opposé de la porte des Limbes, pressé maintenant de rejoindre son corps, leur monde. Empressement qui faillit bien le figer une fois encore, quand il réalisa que son corps était dévasté, et qu'une question parvint à ses pensées chamboulées : Eigoel avait-elle encore un corps ?

Eigoel Nahb | 13/10/10 19:59

L'hésitation du Dragon souleva des questions dans l'esprit de la jeune humaine. Il ne semblait pas à l'aise, du moins beaucoup moins que la nuit précédente. Ils venaient de traverser quelque chose de douloureux, certes, due à une bêtise irréfléchie et désespérée d'Eigoel, mais elle était sauvée. Le pire était derrière eux. La culpabilité enserra le coeur de la mortelle, sentiment écoeurant.Elle serra plus fortement la main de son aimé, comme pour lui montrer qu'elle ne l'avait pas abandonné. Son visage se fit doux, tentant chasser cette gêne qu'elle ne s'expliquait pas, dessinant un sourire rassurant sur ses lèvres.

-Ne t'en fais pas, j'ai juste... glissé ici ? Nous nous sommes sortis de bien pires bourbiers. Une seconde s'écoula. Elle reprit. Quelle « chère amie » ? Ah.

Ses yeux s'étaient arrêtés sur l'Ankou qui jouait de sa faux entre ses osselets. Eigoel ne résista pas, se laissa entraîner par Noir-feu, remarquant avec une agréable surprise avec quelle facilité ses pieds quittaient le sol nuageux. Nuageux à présent ? Tiens donc...

Les morts en file indienne rapetissaient à vue d'oeil, le décor se brouilla, puis il y eu comme un flash. Ses oreilles bourdonnèrent, elle eu un vertige ; ses deux esgourdes se décompressèrent subitement d'un « plop ! » fortuit. Ce qui la fit sursauter.

Une douleur lancinante lui perfora les genoux, l'arrière de la cuisse, l'épaule gauche et la gorge. Autant de mauvaises blessures qui venaient de se réveiller soudainement. Piquantes, tranchantes, elles chauffèrent quelques secondes qui lui parurent interminables, avant de regagner leur place dans les souvenirs. L'humaine ouvrit lentement les yeux, clignant des paupières plusieurs fois, n'ayant pas eu conscience les avoir fermé. Elle était à quatre pattes contre le sol. Son regard curieux serpenta sur les murs sombres de la pièce où elle se trouvait. Ses mirettes s'arrêtèrent un corps en piteux état, posé là, aussi sombre que les pierres environnantes.

Se relevant avec lenteur, prenant appui sur un étrange autel d'obsidienne, Eigoel articula :

- Merde, c'est quoi, ici ?

Noir-feu | 15/10/10 18:40

Douleur. Insoutenable. Terrible. Sang qui se déverse, lentement, ralenti par le pouvoir de la Matriarche, souillant l'autel sacré, ruisselant en fines lignes écarlates le long de la pierre polie, usée par les âges, le faisant ressembler à un lieu sacrificiel du plus sombre aspect.

Brouillés, voilés par une intolérable souffrance, les yeux du Dragon s'entrouvrent, se referment aussitôt, comme si ce simple geste avait sapé les ultimes forces du Noir. La question d'Eigoel lui parvient, assourdie, à peine compréhensible dans le martèlement qui déchire ses tympans. Coeur qui pulse, sang qui parcourt d'infimes veinules dans un vacarme assourdissant, ajoutant encore au tourment dément qui ronge le corps et l'esprit allongés sur la pierre glaciale. Les yeux s'ouvrent à nouveau, le visage déchiré, lacéré, se tourne avec une infinie lenteur, le regard vitreux se pose sur la jeune femme, les lèvres desséchées se craquèlent davantage quand Noir-Feu tente de répondre, d'une murmure presque inaudible:

-Le...Sanctuaire...chez...chez moi...la...la rune...je...je t'ai...montré...autrefois...

Page précédente 1 2 suivante

Index des forums > Rôle Play