Forum - [Certadhil III] Essai n°5 : Interlude à vocation rotulienne. (...)

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Althâr Anthâar | 18/11/10 01:24

"Oh le rat !"

Le constat était cinglant, et malgré les limitations qu'impose ce forum dans le choix des polices, soyez sûrs que c'est avec une puissance digne des plus grosses et moches Divas du multivers que ces paroles étaient sorties de la bouche d'Althâr. En fait, il s'en foutait. Les quelques pantins qu'il avait ramené à la vie s'étaient fait, pour moitié, assassiner un peu plus tôt dans la soirée, et les quatre restants avaient réussi malgré leur lenteur inqualifiable - que demander à un squelette ou une goule me direz-vous - à terrasser un des laquais du Chaos. Oui vraiment, des tas d'os et de chair flétrie tels que ceux-là, il ne les regretterait pas.

En fait, ce qui l'étonnait, c'était que le rat en question n'était autre que le rat qui avait vu sa vie changer du tout au tout un jour qu'il gambadait du côté du village de Labo, devenant une sorte de mélange - dégueulasse si vous voulez mon avis - entre un sale rat, un mage complètement débile et un démon supérieur mais néanmoins puceau. Depuis peu, et c'est désormais tombé dans le domaine public, donc libre de droits, donc je peux le dire, le démon avait pris l'ascendant - Brantröocq pour ceux qui suivent pas - et, la faute à une physionomie peu commune, même pour un démon ayant pieuté dans le corps d'un rat mage enfariné, s'était mis à émettre des gaz par un orifice qui aurait dû logiquement se trouver un bon mètre plus bas. Mais bon, Althâr voyait encore en lui le Rat de Labo, un être dont il se foutait éperdument même s'il le trouvait très drôle. Et c'était donc sans se cacher qu'il se payait sa tronche et celle de tous ceux qui espéraient vraiment la fin du monde tel qu'on le connaît. La fin du monde, il n'y croyait pas, pas plus qu'à la virginité d'une vestale. À défaut d'être poli, il vous faut savoir qu'Althâr est honnête. Et donc là, il récoltait les fruits de sa franchise.

Loin d'en tirer une leçon, il retourna au Beit Anthâar, situé un peu plus au sud, dans la forêt bordant les terres qui accueillent le tombeau de Kehan Olth - c'est de la redite je sais mais je demeure persuadé qu'au fond il y en a qui ne suivent toujours pas, laissant les morts à qui voudrait les récupérer.

De retour dans son foutoir de bureau, où il retrouva sa fille Alyssa, fidèle au poste, il lui expliqua tout, et si vous n'avez pas percuté tant pis pour vous, sales mioches, et en vint à lui demander de rejoindre Keanor, où tous les rescapés semblaient se rendre après avoir reçu la fessée, bien qu'il n'ait pas la moindre idée de ce qui s'y passait.

"Bon, tu prends ta clique et tu vas rejoindre Dame Lancwen. Et fissa mon soleil.
- Bien. J'emmène le palais ?
- Bah oui t'as raison, on va leur amener le palais ! Ils auront peut-être la place pour ça dans un de leurs trirèmes !
- Oh c'est bon !
- Tu tiens vraiment de ta mère tu sais...
- Euh... Je dois bien le prendre ?
- ...
- Papa ?!
- Mmmh ?
- Bon... Et donc tu restes ici ?
- Non, je vais en profiter pour partir en vadrouille. Les salauds d'en face sont équipés comme des mules, et c'est pas avec nos paniers garnis qu'on va les chatouiller.
- Donc ?
- J'entre en scène.
- Oh.
- Quoi "oh" ? Ça veut dire quoi ?
- Bah... Tu devais pas aller faire je ne sais quoi avec je ne sais qui dans le coin du Sereg Rinn ?
- Oh bah oui t'as raison tiens ! J'vais aller me la coller dans le trou du cul du multivers, qui s'amuse à nous envoyer une chiée de démons depuis qu'il a compris qu'on était pas foutu de marcher droit dans nos pompes, surtout un lendemain de cuîte !
- Papa !
- Oui, désolé. J'ai un peu les crocs et ces connes de vestales m'ont rien préparé.
- Papa ! Bon... Et le Palais ?
- Il reste ici.
- Il ne risque rien ?
- Non."

Et je tiens à préciser que le Beit Anthâar ne risque vraiment rien, caché qu'il est dans sa clairière. Rien, de rien. Et si quelqu'un veut vérifier, c'est mon poing dans sa gueule et mon pied dans son... Dans sa gueule aussi. Capice ? Bon.

Et donc, pendant qu'Althâr partait à l'aventure pour démonter tout ce qu'il pourrait trouver, histoire de servir à quelque chose, et aussi parce que ses incessantes séances de réflexion intense lui avaient collé des migraines de - pardonnez-moi l'expression - tous les diables, Alyssa se téléportait à Keanor avec que dalle, juste des fringues, parce que c'est la digne fille de sa mère, et au Beit Anthâar la vie suivait paisiblement son cours, comme toujours.

Edité par Althâr Anthâar le 18/11/10 à 01:50

Celimbrimbor | 18/11/10 11:49

C'est pas triste.

La Demeure Franche : [Lien HTTP]

Xüne Syphonn | 18/11/10 17:51

Heureusement qu'il n'ont pas tué ton humour, cela aurait été dommage. C'est super comme toujours.

Althâr Anthâar | 18/11/10 19:19

Mon humour est comme l'herpès, on a beau le repousser de toutes ses forces, il revient toujours ! Toujours.

Rat De Labo | 18/11/10 19:21

Tout de même.

Pourvu qu'il ne se refile pas de la même façon que l'herpès...:o

Le Rat, démon clanique et seigneur du cauchemar.
"La récompense des grands hommes, c'est que, longtemps après leur mort, on n'est pas bien sûr qu'ils soient morts."

Sombrebarbe | 18/11/10 20:40

" Les salauds d'en face sont équipés comme des mules, et c'est pas avec nos paniers garnis qu'on va les chatouiller."

mouahha...j'adore :D
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Maître de l'Ordre de la Lumière
[Lien HTTP]

Althâr Anthâar | 19/11/10 13:45

Lectures préliminaires si vous voulez :
[Lien HTTP] et [Lien HTTP]

À ce stade de l'histoire, j'estime qu'il serait de bon ton de vous en dire un peu plus sur le Beit Anthâar, sorte de camp de réfugiés pour anciens avaloniens dont ne vous a été présenté que le bureau bordélique d'Althâr, et qui pourtant possède plusieurs particularités assez atypiques et néanmoins très pratiques.

Comme vous le savez déjà, la bâtisse abrite non seulement Althâr et sa fille, Alyssa, qui y possèdent chacun de vastes appartements que je ne décrirai pas car j'en ai rien à battre, et par conséquent vous non plus, et qu'en plus ça ne regarde qu'eux, surtout qu'ils n'y sont plus, mais aussi une floppée d'anciens avaloniens et notamment des vestales, des jardiniers et des bibliothécaires, en plus d'autres personnes pas vraiment assez intéressantes pour qu'on en parle et trop chiantes pour qu'on se foute de leur gueule sans qu'elles soient vexées, ainsi que quelques animaux de compagnie, de traie ou de transport, et je ne sais quoi encore disons, tout ce que vous pourrez imaginer. Et donc, chacun de ces êtres, et trucs, vit, ou est entreposé, dans une chambre, ou une pièce, dédiée. Ce n'est pas un simple chateau avec cour et basse-cour, champs et serres, non du tout. Ce n'est pas non plus un chateau avec pont-levis, très désuet depuis qu'on peut se faire attaquer par les airs si vous voulez mon avis, puisqu'en fait, il n'y a pas de porte. Sauf si vous êtes invités. Ce qui m'étonnerai. Et donc tout cet immense bordel a été téléporté sur Certadhil. Et du coup, question conne, où c'est qu'ils trouvent la bouffe ?

Donc pour vous expliquer ça sans que vous criiez au scandale, il me faut revenir sur le fondement même du pouvoir d'Althâr, ou en tout cas sur l'un des fondements de son pouvoir, le principe d'Alchimie Absolue.

Nous sommes loin, loin dans le passé, quand Althâr récupère le Heaume d'Argent et accède à son savoir, puis l'intègre, en partie en tout cas. En grande partie. Il accède au niveau ultime de son art lorsqu'il accède à ce statut si particulier que seuls quelques piafs possèdent, les Phénix, qui consiste à nier la réalité et à convaincre le multivers qu'il en est autrement. Ainsi, si Althâr a besoin d'une épée, il dit à qui veut l'entendre, métaphoriquement parlant, qu'il l'a bien en main, et elle apparait donc dans sa main. Pareil s'il a besoin d'une cuisse de poulet. Ou d'un godemichet, mais ça, je suis pas sûr que ça ait déjà été inventé. Ce don de négation le rend apte à créer tout et n'importe quoi à vrai dire. Divin ? Non, du tout. Car Althâr n'est en aucun cas capable de créer la vie. Il ne peut pas sortir une âme de son chapeau à partir de rien, car ces conneries n'ont aucune consistance. Seuls quelques grosbills savent faire ça, et il n'en fait pas partie. Par contre, si quelqu'un lui donne une âme, il peut tout à fait lui faire enfiler un corps qu'il aura créé pour l'occasion. Pour ça que la magie nécromante présente un intérêt pour lui, même si elle ne lui fournit que des âmes de seconde main. Et pour peu qu'il ait un peu de pouvoir sous le coude, il peut l'insuffler aussi. Bref, s'il n'est pas un Dieu, il peut vous faire croire qu si. Mais c'est pas son truc. Et c'est pas le mien non plus.

Le palais de l'alchimiste a donc été conçu ainsi, tout simplement : la bâtisse, construite - magiquement - par Althâr et sa fille, n'est qu'une immense boîte vide. Mais, se référant aux travaux du mage Finnus, dont la langue venue du nord fut, comment dire, très chiante à déchiffrer, il a appliqué littéralement le principe d'Homotique à cet objet, action qui consiste à céder un petit bout d'âme à un lieu afin qu'il aime et serve sans concession son créateur et ceux qu'il aura désigné. Et voilà comment le Beit Anthâar est né, héritant au passage de quelques unes des aptitudes de l'ancien Khân, notamment la capacité à se téléporter, un don certain pour l'Alchimie Absolue appliquée à la gastronomie et l'architecture d'intérieure, et une féroce envie de se reproduire. Mais ça, c'est impossible rassurez-vous.

Si bien que la bouffe, le Beit la créé. C'est aussi simple que ça.

Et, en termes d'aménagement d'intérieur, eh bien ça ressemble ni plus ni moins à ce que vous voulez y voir, si jamais vous y êtes autorisé. Voyez ? Ça coule de source !

Et donc parlons un peu des autres habitants du Palais, ceux qui ne sont pas Althâr, parti écumer les terres certadhiliennes pour casser du monstre, ou Alyssa, en route avec rien sinon ses piles de fringues vers Keanor - en fait elle s'y est téléportée mais vu que je vous en ai pas parlé on conviendra qu'elle n'y est pas encore.

Il y a tout d'abord les vestales. Anciennement avaloniennes et totalement, corps et âme, dédiées à la cause, elles sont des prétresses, pas forcément dévotes et encore moins pucelles, qu'Althâr a souhaité réunir en vue d'un éventuel réveil de la cité millénaire, et pour ses petites cochonneries, aussi. Toutes plus belles les unes que les autres, dotées de corps au moins aussi sublimes que leurs âmes, elles sont la raison pour laquelle la trique matinale de l'ancien Khân peut parfois durer jusqu'à l'heure du thé. Au palais, elles s'occupent de l'entretien général, de la cuisine, passent des heures enfermées à plusieurs dans leurs chambres ou jouent à la balle, nues, dans la piscine. De vraies sa... cerdotes, quoi.

Ensuite, les jardiniers, anciens intendants des magnifiques jardins avaloniens. Habitués aux travaux manuels, on dirait qu'ils prennent toujours le soleil, même quand il pleut, et leur peau tannée ne peut que mettre en valeur leurs musculatures avantageuses - mais vraiment ridicules comparées à celle d'Althâr - lorsqu'il s'agit d'entretenir les haies au bord de la piscine. Même si nous ne le dirons pas, vous devez vous douter qu'ils doivent intéragir de quelque façon avec les vestales, le maître des lieux ne pouvant satisfaire tout le monde. Cependant, les jardiniers ont cette particuliarité qu'ils ne deviennent jamais pères hors mariage. Et donc, personne n'est marié au Beit Anthâar.

Après viennent les bibliothécaires. Eux, c'est l'intelligentsia du Palais, et ce rôle ils le connaissant pour l'avoir assumé du temps d'Avalon, et ils apportent cette dose de spiritualité aux vestales que d'autres que nous ne pointerons pas du doigt ne peuvent leur offrir. Ils savent tout sur tout, et bénéficient pour leurs recherches d'une bibliothèque à la taille adaptée pour abriter tous les ouvrages qu'ils pourraient requérir. Aucun souci d'ordre coïtal de ce côté.

Enfin, les autres. On s'en fout.

Et donc tout ce microcosme évolue un peu comme hors du temps, à l'abri de tout bien que sis en la terrible Certadhil, l'île des Olth, non loin du tombeau de Kehan. Et bien que ni Alyssa, ni Althâr, occupés ailleurs, ne soient là, il n'y a aucune raison pour que cela change.

Oui, la vie suit son cours au Beit Anthâar. Paisiblement.

Edité par Althâr Anthâar le 19/11/10 à 13:46

Xüne Syphonn | 19/11/10 21:35

Hum... On pourrait pas avoir des précisions sur les jeux des vestales et des jardiniers ?? :D

un régal comme toujours

Baramir d'Eckmöl | 19/11/10 22:26

Mieux : on peut venir jouer avec eux ?:o:D

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Baramir d'Eckmöl, Mister Daifen 2008.
Archiviste occasionnel de la Skippypédia

Noir-feu | 20/11/10 18:40

Messire Baramir, je vois déjà briller les yeux de ma compagne, voudriez-vous arrêter sur le champ de lui donner des idées?:o

Althâr Anthâar | 26/11/10 14:43

Depuis la fin de la seconde guerre, Certadhil était sous le joug d'une occupation inique, visant à observer les mouvements de l'ennemi et prévenir tout nouveau conflit. D'anciens guerriers n'ayant a priori plus rien à prouver, chargés de mener les opérations, étaient par la force des choses devenus notables, et n'avaient donc a priori plus de comptes à rendre. Ils commandaient à d'autres guerriers, gras de leurs innombrables festins et saucissonnés par les tôles rouillées qui leur tenaient lieu d'armures. Soit trop cons, soit trop jeunes, soit trop naïfs pour espérer entrer dans la noblesse, au sens propre comme au sens figuré, l'avenir ne leur réservait rien qu'ils ne possédaient déjà. Ils avaient, depuis le temps qu'ils étaient là, oublié la vigueur qui animait leur bras lors des combats, s'assurant pourtant de la rémanence de celle-ci à l'heure de leurs plaisirs solitaires. La noblesse, elle, était aussi nouvelle que déviante. Peu coutumière du protocole et épargnée par la bonne éducation, elle se vautrait dans ce que la vie avait de meilleur à lui offrir en de telles circonstances, à savoir la décadence, souvent la mort, et parfois une renaissance. Car il n'y avait qu'ici, loin des gouvernements et de leurs établissements millénaires, qu'elle pouvait duper son monde. Riche de l'or dont elle avait dépouillé les pauvres hères qui avaient cédé à l'appel d'une vie misérable et éthyle, plus portée sur ce qui se passait neuf mois avant la naissance d'un bâtard consanguin que sur la gestion d'une ville florissante et pourtant terriblement bancale, elle se croyait l'égale des héros qui avaient forgé une alliance qu'elle avait presque fini de consumer, préférant se compromettre dans les ombres et espérer boire un jour le sang par nécessité et non plus seulement par plaisir.

Comme toute grande ville livrée à elle-même, Keanor n'était rien de plus qu'une catin dégénérée. Destinée à offrir ses services à une terre qui en avait terriblement besoin, elle s'était imprégnée de l'atmosphère nauséabonde d'un lieu qui jamais plus ne serait hospitalier. Mais entre ses cuisses, c'étaient des légions de soldats qui s'ébrouaient, entassés là au cas où et qui attendaient qu'on leur demande de brandir l'épée plutôt qu'autre chose depuis bien trop longtemps. Noyés dans une mer de vices après avoir traversé les océans pour assurer la pérennité d'un monde qui les avait depuis oubliés, nombreux étaient ceux qui avaient jeté les armes après que la foi les eut abandonnés. Ces milliers de fous ayant accepté de tirer un trait sur leur vie d'avant pour préserver celle des autres s'étaient depuis le temps rendu compte que leur sacrifice avait été vain.

Et pourtant, Keanor revêtait depuis peu l'habit qui avait jadis été taillé pour elle. Celui de la garantie d'un jour nouveau. Pour ses habitants, tant ceux du port et de la ville basse, miséreux, que ceux des beaux quartiers et arsenaux, misérables. Mais aussi pour les autres.

Quel que soit l'objectif, Keanor semblait offrir les meilleures chances de l'atteindre. La guerre l'épargnait pour l'instant, et des troupes fraîches, pas encore asphyxiées par les émanations putrides d'un moral en décomposition, y avaient été débarquées à la veille des premières escarmouches, arrivées dans des navires qui par leurs seules dimensions avaient créé l'émulation et ravivé la flamme dans la ville basse, rallumant la lumière dans les bouges et les gites et remontant les avenues commerçantes jusqu'aux manoirs des beaux quartiers. Les rues s'étaient animées, la population alors apathique avait retrouvé un semblant de dynamisme.

Mais des colonnes interminables de survivants ayant échappé aux massacres des premières heures affluaient depuis peu. Alors que leurs camarades avaient été écrasés comme des moustiques, ceux-là espéraient en ralliant le port et ses garnisons réchauffer leurs coeurs à la lueur d'un espoir, trouver une raison de repartir au front ou un moyen discret de s'embarquer vers quelque part. N'importe où. Mais loin d'ici. Pouvait-on vraiment leur en vouloir d'avoir trempé leurs chausses à l'heure de vérité ? Ces gens-là n'étaient pas prêts. D'ailleurs, ils ne l'auraient jamais été.

De ceux-là, peu nombreux étaient ceux que l'on pouvait consoler. Leur fierté, ainsi que leurs compagnons, avaient été piétinés par des êtres dont ils ne pouvaient garantir l'existence, faute de preuves tangibles. Ceux à qui la vision de bataillons aussi nombreux qu'ordonnés avait redonné le sourire, on les reverrait sûrement sur les champs de bataille. Mais les autres, ceux qui n'avaient pas embarqué pour une destination plus tranquille, ceux-là ébranlaient désormais la confiance née de l'arrivée de contingents frais et motivés, qui déjà étaient sur le point de céder aux sirènes d'une ville qui savait pertinemment comment détruire un homme.

Keanor allait donc mieux. Mais Keanor n'allait pas bien.

Vous voyez le tableau ? Bien.

Chargée par son père de se renseigner sur ce qui va advenir, c'est pourtant bien à Keanor, et plus précisément dans une sombre ruelle, où l'odeur de l'iode marin est estompée par celle des litres de pisse qui y ont arrosé les murs, qu'apparaît Alyssa, avec son Saksanfon(TM) qui, s'il n'était pas blindé d'enchantements terriblement superficiels et pourtant tellement féminins, pèserait plusieurs tonnes.

Fuyant l'insoutenable fumet, elle s'engage dans l'une des artères commerçantes qui traversent la ville basse pour relier les beaux quartiers au port, et s'engage vers les quais où, espère-t-elle, elle pourra en apprendre un peu plus sur ce qui se passe. Mais voilà, c'est une artère commerçante. Et par un hasard que seule une femme peut justifier, ne se sont installés dans cette rue que des couturiers, des tisserands, des chapeliers, des chausseurs et même quelques bijoutiers. Le rêve. Oubliant ce pour quoi elle est venue, elle s'engouffre dans les échoppes, essaye toutes les parures, toutes les robes, tous les bijoux qui entrent et sortent de son champ de vision aussi vite qu'un orc d'une pucelle, terminant pour la plupart leur course dans le sac de la demoiselle qui s'en donne à coeur joie.

Après quelques heures d'une fièvre acheteuse qui aurait achevé n'importe quel être muni d'une paire de couilles, elle arrive enfin sur les quais, ayant sustenté pour le moment sa faim de fringues, et ne peut que constater un triste spectacle. Le port, où la rumeur du mouillage d'une armada avait atteint jusqu'aux plus reculés des camps et empli les coeurs d'un tas de brèles terrifiées d'un espoir nouveau, offre la vision d'une armada, certes, mais sur le départ. La rumeur était vraie, mais elle est désormais dépassée. Ceux qui sont venus repartent aujourd'hui, pour une raison ou pour une autre, mais certainement pas par courage, se dit la fille de l'ancien Khân. Laissant les autres dans le désarroi le plus total. Pire, les bougres ont allumé un certain nombre d'incendies partout au travers de la ville avant de se carapater, histoire de réduire en cendre les installations militaires et de foutre bien dans la merde la population locale.

N'en ayant cure, Alyssa remonte les quais en vitesse jusqu'à trouver une autre rue commerçante avant que la panique ne gagne la ville et que sa fièvre acheteuse ne soit refroidie par la fermeture des boutiques. La trouve. La pille - au sens figuré puisqu'elle paye ses achats avec l'or qui apparaît mystérieusement dans ses mains à l'heure de passer en caisse.

Mais attardons nous un peu sur Alyssa, voulez-vous ? La jeune Dame est l'aînée d'une fratrie de trois enfants nés de l'union d'Althâr et Annabelle. Ni vraiment Dame des cygnes, comme sa mère, ni vraiment un truc à base de Dragon, de Phénix et d'Alchimie comme son père, elle est cependant un peu tout ça. Toujours est-il que la magie est chez elle quelque chose d'inné, et qu'elle surpasse en bien des domaines son père, et évidemment sa mère. Et elle est vraiment canon. À vrai dire, de ce point de vue-là, la seule chose qui la différencie d'une succube, c'est que les âmes, elle ne les arrache pas, car elles lui sont servies sur un plateau par ses soupirants. Mais tout ça est une vue de l'esprit, rassurez-vous. Pour l'instant. Bref, elle est, par sa perfection, aux yeux de son père ce qu'une mère peut constituer aux yeux des autres : un point de comparaison pour ses éventuelles compagnes. En même temps, la mère d'Althâr ayant certainement été au moins aussi barbue que son père, cela n'a rien d'étonnant, même si ni l'Histoire, ni la fierté de l'ancien Khân ne permettent de confirmer cette hypothèse. Bref, Althâr vise haut, et tous les autres hommes, ainsi que quelques femmes, visent Alyssa. Oui, même toi au fond qui n'écoute rien depuis le début !

Ah oui, Alyssa adore les fringues.

Si le port est désert, les quais ne le sont pas. Dans une mer de soulards ayant inondé les caniveaux de leurs sucs gastriques, de catins ayant trop servi et ne pouvant plus marcher ou de soldats en position foetale et dont le flot de larmes que déversent leurs yeux fait rouiller les casques, elle surnage, radieuse, se satisfaisant mentalement des innombrables « bonnes affaires » qui ont rejoint sa garde-robe et anticipant déjà sa prochaine session, qui hélas n'aura pas lieu avant demain au moins, puisque le temps passant, la nouvelle du départ des armées et des incendies - bien senti le double sens je trouve - s'est répandue, si bien que c'est le bordel dans les rues.

Ne sachant trop que faire, elle parcourt la ville de long en large, apitoyée par la misère qui y règne, et outrée par le peu de virilité des quelques soldats restants qui se murent, de peur de repartir au front. À dire vrai, elle doute que toute la testostérone présente à Keanor suffise à faire pousser ne serait-ce qu'un poil de barbe sur le menton d'un adolescent pubère... Ce constat l'amène à réaliser que si la nouvelle se répand que la ville a une nouvelle fois été abandonnée, ceux qui combattent encore auront bientôt fait de prendre leurs jambes à leur cou. Assurant sa prise sur son Saksanfon(TM), elle sait désormais ce qu'il lui reste à faire : entretenir la flamme jusque dans les campements. Et pour ça quoi de mieux que d'aller y organiser des défilés et y distribuer quelques sourires ? Sa décision est prise : elle va inonder Certadhil de fringues super à la mode !

Xüne Syphonn | 26/11/10 14:46

Y'en a qui n'écoute pas ?!! Quelle honte. Alyssa à l'air si radieuse !! Elle doit tenir cela de sa mère sans aucun doute :D

Comme toujours tes récits sont excellents

Alyssa Anthâar | 26/11/10 15:15

Hum... J'ai l'impression que je dois mal le prendre...

Et pourtant, j'ai vraiment fait de superbes affaires ! :D

Anna-Belle | 26/11/10 22:40

Xune>Les chats ne font pas des chiens....c'est certain qu'elle doit tenir son côté radieux de sa mère :p

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Ils auront mon corps & mon coeur, mais mon âme t'a été donnée, et elle sera tienne à jamais.
Fionnghuala veille sur moi, je n'ai peur de rien.

Kärel | 26/11/10 22:47

Étonnant que vous n'ayez pas encore été accostée :o

Kärel, Ombre égarée sur les rives de l'Existence.

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