Forum - L'héritier

Index des forums > Rôle Play > L'héritier

Noir-feu | 19/12/11 15:39

Suite de: [Lien HTTP]

Chapitre I: La flèche.

Je suis la flèche. Inéluctable, trait du destin, je fends temps et vents, jusqu'au but unique. Je suis la flèche.

L'atmosphère a changé dans le Krak Danaïte, depuis quelques jours, une agitation inhabituelle y règne. Troupes en provenance de divers fiefs, officiers, et même quelques vieux Dragons, ultimes rescapés de ceux qui formèrent en leur temps la garde prétorienne de la Fraternité Dragonnique sont arrivés par vagues. Plusieurs convois sont également parvenus à la ténébreuse citadelle, et des souterrains aux plus hautes tours règne une intense activité, rendue fébrile par l'appréhension d'une ère nouvelle qui s'annonce pour tous. Le Seigneur des Noirs a décidé de céder le trône ancestral à son héritier, et si cela ne choque pas la plupart des êtres présents, les Dragons quand à eux manifestent leur surprise et leur incompréhension par de longs grondements qui résonnent dans la citadelle comme des coups de tonnerre. Ils ne comprennent pas mais ils acceptent, à la fois par une confiance profonde envers leur Seigneur, et parce que remettre en cause sa décision reviendrait à le défier, ce qu'aucun n'est prêt à tenter. Enfin, l'heure approche et tous se rendent dans la gigantesque nef centrale du Krak, la salle du trône des Noirs, massif monolithe d'obsidienne taillé de manière abrupte, tranchante, et pourtant d'une finesse incroyable dans ses proportions. Les immenses piliers heptagonaux qui s'élancent vers des hauteurs indiscernables car plongées dans l'ombre supportent des centaines de torches allumées, éclairant d'une lueur vacillante l'assemblée qui se réunit devant l'estrade du trône, vide pour l'instant. Près d'un millier de personnes se trouvent réunies lorsque les trois unités survivantes de la légion d'Ivoire se déploient telles un serpent dans la salle, fendant littéralement la foule en deux masses pour laisser un couloir central libre. Le silence gagne peu à peu la salle, les murmures se taisent, et leurs échos mêmes s'estompent.

Mille regards se tournent vers l'arche d'entrée, tandis qu'entre celui qui doit devenir le nouveau Seigneur des Dragons Noirs. Ils le soupèsent, le mesurent, l'estiment. Les pupilles embrasées des Dragons s'étrécissent alors qu'ils sondent l'arrivant, cherchant la faille, la faiblesse qui leur permettra de tenter leur chance, quand la couronne aura été transmise. D'un pas lent et digne, Larme entre dans la salle, scrutant calmement chaque visage et saluant ceux dont il croise le regard. L'un après l'autre, ils baissent les yeux et mettent un genou en terre, incapables de défier ou même de soutenir le regard devenu de jais de celui qui n'était au fond qu'un jeune homme voilà quelques jours à peine.

Quelques jours. Une éternité.

-Le veux-tu, sincèrement, véritablement?

La question avait tonné de manière lugubre dans la salle profondément enfouie qui abritait l'un des aspects du Sanctuaire des Noirs. La réponse avait fusé, claire et assurée:

-Oui.

-Bien. Je dois t'éprouver, tu le sais. Es-tu prêt?

-Oui.

La volonté du Noir s'était manifestée dans son regard, comme un poids insoutenable, une lueur aveuglante capable de détruire par sa seule intensité, et elle s'était braquée toute entière sur son fils. Larme avait titubé, surpris, aveuglé, puis il avait arc-bouté sa volonté contre celle de son père, et la véritable épreuve avait commencé. Peu à peu, leurs volontés opposées avaient commencé à se lier, un peu à la manière de lianes vivantes qui s'entremêleraient autour d'un tronc commun, la Lignée, une histoire, un passé immense mis en commun par les sombres arcanes des Noirs, pour ne former dans l'esprit de son dépositaire plus qu'un unique souvenir, pour qu'il devienne ses ancêtres. Durant quelques instants, Larme était parvenu à endiguer le flot brutal et en apparence infini de souvenirs transmis par son père, lui-même dépositaire d'Orféor le Noir qui contenait un passé bien plus lointain encore. Puis, il avait vacillé, et senti une main puissante l'immobiliser tandis qu'une autre relevait son menton et le contraignait à supporter encore l'infernal regard, source d'un torrent trop vaste pour un seul esprit. A cet instant, Larme avait perdu toute notion de temps ou, plus exactement, toute notion du présent. Implacable, la volonté de l'Aîné des Noirs l'avait entraîné dans les abysses du Temps, du Néant, du Chaos et des Limbes, tandis que dans la salle souterraine du Krak, le corps de Larme fumait et écumait comme s'il vivait à une vitesse insensée tous ces événements, à la limite d'une rupture qui semblait inévitable.

Les Trois Noires.

Je vois trois "éclats", de pures ténèbres. Je ne sais si ce terme est exact, car ces éclats ne dégagent rien de "mauvais", ils sont la nuit, nécessaire pendant du jour. Leur obscurité est si intense qu'instinctivement le regard s'y perd, cherchant au coeur de ce "rien", de ce noir, contre toute évidence un point de repère, quelque chose à quoi raccrocher l'esprit. Mais il n'y a rien. Vraiment rien. Et puis, ces éclats se relient entre eux par des sortes de courbes de nuit brumeuse, extrêmement vives si on ne les contrôle pas. Ces courbes finissent par tisser une sorte de "cocon" d'obscurité dont il est infiniment difficile de détacher le regard, et ne pas le faire signifie une prompte folie, je le sais. Pourtant, je ne peux pas m'empêcher d'y plonger les yeux. Mon esprit s'effiloche dans ce néant comme une vieille corde trop tendue, je me sens disparaître, mais ça n'a pas tellement d'importance.

Les Trois Noires.

Le passé, lointain, je le parcours, voyage insensé qui me ramène aux sources, à l'instant de tous les instants, le Premier, celui qui enfin, après tant d'essais infructueux, est. Je contemple cette origine, sachant qu'elle est à la fois unique et multiples, qu'elle a eu lieu une infinité de fois sans pourtant jamais permettre notre avènement, notre existence. Cette fois, cette unique fois, a été différente, elle a été parfaite selon les conditions nécessaires à notre apparition. Et nous sommes là dès ce premier instant, à vrai dire nous étions là avant, nous étions là à chaque Aube, à chaque Crépuscule, mais nous l'ignorions. Nous ne sommes pas différents des autres êtres, ni même de la matière, constitués d'une même et unique force, celle-là même qui a engendré le Tout. Notre Tout. Car il y en a, il y en a eu et il y en aura une infinité, je le pressens mais mon esprit ne parvient pas à le concevoir vraiment, cela reste une sorte d'intuition, de perception plus ou moins inconsciente et floue. Qu'importe. Je suis, Unique dans le Silence, un silence absolu que les battements de mon coeur inexistant ne trouble pas. Il n'y a pas de temps, du moins aussi longtemps que je n'ordonne pas mes pensées. Mais à peine une image, un concept naît-il que le Temps se précipite, avide et désormais lancé dans une course impensable qui s'achevait, à ce jour, lors de la fin. C'est là un pivot de notre existence, de notre pouvoir, de notre devoir. La raison majeure, peut-être, de l'existence du Tout. Nous sommes devenus les maîtres du temps, capables de le concevoir avant son apparition et après sa disparition et, partant, nous lui ouvrons la porte. Ce temps qui naissait et mourrait avec notre espace traverse désormais les âges, existant même quand Rien n'est, quand lui-même n'est pas. C'est la naissance du grand paradoxe, être et ne pas être en un unique et même instant, celui qui permettra, peut-être, une éternité de conscience.

Les Trois Noires.

Je suis revenu, lentement, du moins est-ce l'impression que j'en ai eue. Étrange sensation que cette lenteur, alors que je voyais défiler dans mon esprit les temps, par siècles, par millénaires, par dizaines de millénaires. Bien sûr je n'en ai qu'une perception réduite et fragmentaire, celle qu'on eu mes ancêtres durant les temps de leurs existences. Je parviens à des souvenirs plus récents, plus proches de moi, ceux d'Orféor le Noir. Je vis sa vie, mais d'une manière subtile, détachée, je ressens ce qu'il a ressenti, je vois ce qu'il a vu, et pourtant je sais, comme pour ceux d'avant, que ce n'est pas moi. Et cela me surprend un peu, car je sais que mon père a eu une difficulté énorme à dissocier ses souvenirs de ceux de ses ancêtres. Je réalise aussi que l'une des Noires se relie plus particulièrement à lui, mais sur le moment je n'en comprends pas la signification. Le voyage continue, et je vois, je vis, cet instant étonnant durant lequel Orféor fit de mon père, alors nommé Breagel'Ann et dépositaire du Don Vert, un Dragon Noir. Je comprends qu'à cet instant, tout s'est joué, pour eux, pour moi, pour tout ce qui touche à ma sphère de perception. Car sans ce Don, mon père aurait été anéanti, et l'histoire se serait arrêtée là. Je comprends aussi qu'Orféor savait, qu'il avait prévu et même provoqué cet instant. L'une des Noires se lie à mon père et je commence à entrevoir un sens à ces Runes, à la quête insensée menée par mon géniteur. Le savoir, les souvenirs de mes ancêtres sont comme une immense bibliothèque, j'ai accès à tout, mais il faut choisir un volume, l'ouvrir et le lire, se plonger dans l'histoire pour en arriver à la vivre soi-même. Orféor avait besoin d'un héritier, tous ses fils ayant été décimés dans divers événements, il lui fallait un être capable de recevoir le Don, et de le porter jusqu'au suivant, pour que la Lignée perdure, ce qui était pour lui, comme pour nous tous, la chose la plus importante qui soit, la seule nécessité impérieuse des Noirs.

Noir-feu | 19/12/11 15:41

Chapitre II: Soif d'Elle.

Qu'importent les quolibets, les insultes et les jugements du passé. Pour la première fois de mon existence, je le vois, tel qu'il devrait être, tel qu'il est dans une sorte d'idéal détaché des mondes, des temps. Et je sais, intimement, que c'est l'image la plus proche de la réalité qui puisse être. Lui, tel qu'il s'est voulu, tel qu'il s'est imaginé dans les circonvolutions de son pouvoir dantesque, invisible mais présent dans nombre de trames, source occulte et discrète de l'avenir. D'un avenir, le nôtre, et cela seul importe au final. La nef est emplie d'êtres, venus de terres proches ou lointaines, leur dénominateur commun est qu'ils servent mon Père, cet être qui se tient à présent sur son trône, apparu dans un soudain et brutal éclat de ténèbres, symbole d'âges qui sombrent lentement dans les marais des souvenirs, il y en a tant. Habituellement vêtu simplement de soie noire, le Seigneur des Dragons est maintenant paré d'une lourde armure, qui évoque irrésistiblement les enfers, leurs démons et notre propre fin, car c'est cela qui donne forme et substance au "mal", nos propres peurs. Assis sur son trône, bardé d'un métal plus obscur que la nuit elle-même, le Seigneur des Noirs scrute l'assemblée, paraissant voir au-delà des êtres présents, au-delà même du présent et des temps. Ses prunelles de jais incandescent se posent sur son fils, tandis que mille poitrines retiennent un souffle, quand bien même leur propriétaire est mort depuis longtemps. Lentement, avec une majesté sauvage et dépourvue d'apparat, le Seigneur Dragon se lève, et tend une main vers son fils, une main ouverte, invitation à le rejoindre non pas sur un piédestal, mais dans une perception, la perception d'un devenir, d'un rêve, d'un espoir issu et tourné toujours vers l'ultime et l'indispensable, la survie de la Lignée.

Enfin nous sommes face à face, d'égal à égal. Un bref instant d'équilibre, maintenu uniquement par la magie des Noires, car un défi immémorial luit dans les prunelles des deux Dragons Noirs. Instant de tangence, car Larme ne peut rivaliser avec l'Aîné, aucun Dragon ne le peut en cet âge. La foule attend, muette, suspendue à cet instant qui se fait parenthèse explosive dans le temps, mais l'Ancien a choisi une autre voie, et sans baisser le regard il retire la sombre couronne de brume ornée de trois éclats que Larme ne connait que trop bien. D'un geste solennel il la dépose sur le front de son fils et se retire de trois pas tout en s'inclinant, puis, enfin, Larme fait face à ses sujets, survolant l'assemblée d'un regard profondément pensif. Rang après rang, les êtres présents mettent un genou en terre, les rares Dragons présents courbent légèrement le cou en signe d'acceptation, provisoire au moins car ils éprouveront sans doute l'héritier de mille manières.

La troisième Noire se relie à moi, impalpable, elle m'offre un champ de perceptions désormais infini, du moins à mon échelle. Je réalise peu à peu que, pour la première fois, les Trois Noires sont véritablement contenue dans l'esprit, dans le corps d'un unique Dragon, et que je suis cet être, maudit ou béni, je n'en sais rien. Les deux, sans doute, selon ce que je choisirai d'en faire. Je ressens aussi cette source obscure de notre pouvoir, la maîtrise consciente, certes relative, de notre destin sur des âges entiers, et au delà. Plutôt qu'un présent, c'est un idéal, une sorte de rêve contenu, entre autre, dans ces trois "runes-symboles". Je ressens, et je comprends, la volonté de mon père de se retirer, pour qu'un nouvel âge puisse advenir, pour que le passé ne soit pas la terre qui colle aux semelles de nos bottes mais celle qui porte nos pas, nos rêves, avec légèreté, facilité. Je pressens aussi que la voie n'est pas aussi aisée qu'il paraît, car les conséquences du passé roulent à l'infini, et j'en vois d'innombrables. Qu'importe, la voie, le possible existe, je serai le Seigneur des Noirs, et je porterai leurs rêves dans les temps.

Les trois éclats flamboient sauvagement sur la sombre couronne, un cape d'obscurité s'abat sur l'assemblée alors que sont soufflées les bougies par un vent glacé, ne laissant pour unique source de lumière que les trois éclats et les yeux incandescents des Dragons. Larme avance d'un pas, s'exprimant d'une voix claire qui contraste étrangement avec l'atmosphère ambiante:

-Je fais serment de porter fièrement l'avenir des Noirs en ce monde. De défendre et de conseiller quiconque se mettra avec sincérité sous ma protection. Je fais serment de ne jamais faire preuve de faiblesse, ou de lâcheté, de mener ma vie et celle de ceux qui me suivront avec droiture et dignité. Conformément au Code, quiconque dans cette salle désire me défier pour s'emparer de cette couronne est invité à se manifester. Après quoi la succession, droits, privilèges, charges et devoirs y afférant , sera réputée acceptée et sa remise en question sujette aux lois du défi séculaire.

Les Dragons présents dans la salle se jaugent vivement, jettent de discrets regards perçants en direction de Larme, ils hésitent. Mais ils sont anciens et sages. Les défis évoqués signifient la mort de l'un des deux duellistes et, sous ses airs doux, Larme reste le dépositaire de l'art du combat de son père, du Lignage Noir. La partie s'annonce trop risquée au goût des Sauriens pour qu'ils la tentent, aussi s'abaissent-ils avec une grave dignité en signe d'allégeance. Les nombreuses torches se rallument alors avec soudaineté, éclairant à nouveau la salle d'une lueur orangée. Un silence empli de pensées bourdonnantes envahit la nef, tandis que chacun prend la mesure des conséquences de cette passation de pouvoir. Sur l'estrade, Larme dévisage chaque être avec gravité, son regard de sombres braises plongeant dans les âmes pour en percevoir l'essence. Il devra bientôt nommer ses conseillers, pourvoir tous les postes clés de ce qui, il le réalise seulement maintenant, forme un véritable empire. Et au delà des terres conquises, il existe un certain nombre de lieux, plus ou moins importants, qui sont sous l'autorité directe des Noirs, chacun devra être dirigé par un être dont l'absolue loyauté envers La Lignée ne peut être mise en doute, le destin en dépendra fortement. Mais pour l'heure, un acte symbolique s'impose, celui qui, au-delà de la cérémonie, fera véritablement de lui le Seigneur des Noirs. Lentement, il se retourne, et prend place sur le trône d'Obsidienne tandis que retentit dans la salle une vigoureuse ovation, dont l'inquiétude n'est pourtant pas totalement absente. En retrait, presque indiscernable dans les ombres, Noir-Feu se permet un sourire discret, puis il se fond entièrement dans l'obscurité d'un pas souple. Un subtil sentiment d'exaltation emplit sa poitrine, son âme, quelques pas seulement doivent encore être accomplis puis il pourra, enfin, la rejoindre.

Noir-feu | 19/12/11 15:43

Chapitre III: Libre.

Étranges sensations qui m'assaillent alors que je prends place sur le trône d'Obsidienne, la troisième face du Sanctuaire, symbole antique et sacré des Dragons. Une sorte d'ivresse, grisante, tandis que je ressens par le lien de la pierre la puissance de notre lignée, son ancienneté, ses implications dans un nombre immense de Danses, atroces ou magnifiques selon les âges. J'ai si longtemps éprouvé une angoisse profonde à la seule idée de cet instant, et pourtant je suis calme, incroyablement serein. Je vois tous ces êtres, qui me scrutent. Non seulement les quelques mille qui se trouvent dans la salle, mais une infinité, tous ceux qui ont un jour posé le regard sur l'un de nous avec cette sorte d'espoir, d'attente, qui se manifeste dans les yeux des gens présents. Je prends conscience des ombres nombreuses qui gravitent autour de nous, avides de nous dénigrer, de nous anéantir si elles le pouvaient. Mais elles n'ont pas ce pouvoir, ces pauvres ombres, car leur substance n'est que fantomatique, et elles se perdent elles-mêmes alors qu'elles se dressent contre nous, qui sommes le miroir de leurs peurs, qui sommes, simplement. Je vois aussi que notre influence s'est désagrégée, parce notre attention se portait ailleurs, parce que le monde changeait et que ne pouvions renier si aisément notre voie, oublier la douleur, la souffrance. Je sens aussi, de manière diffuse, qu'il m'appartient entièrement d'orienter le destin des Noirs, je pourrais, si je le souhaitais, le détacher presque totalement du passé pour le transformer en...quelque chose, quelque chose...d'autre. Mais il n'est pas tout à fait temps, pas encore. Je pressens dans les trames du monde de sombres machinations, et malgré le soin apporté, cette passation de pouvoir affaiblit notablement notre position, les prochains temps seront à franchir délicatement et prudemment. Pour l'heure...

Les uns après les autres, les êtres présents viennent prêter serment, et à chacun le nouveau Seigneur des Noirs offre sa protection et sa bienveillance, d'une manière personnelle car la plupart lui sont connus. Longues ont été les années passées à se former sous l'égide rigoureuse de son père. Après que le dernier ait regagné sa place, Larme se relève du trône, et s'adresse à la foule d'une voix forte et assurée:

-Amis, vous vous en doutez, c'est une ère nouvelle, différente, qui s'ouvre à nous. Je ne suis pas mon père, et vous aurez à en tenir compte. Avant toute chose, je vous annonce que vous avez également une nouvelle Reine: La Fille des Eléments, Shadee, qui m'a fait l'honneur d'accepter de devenir mon épouse. Nous combattons depuis bien des lunes maintenant sous la bannière conjointe des Noirs et de la Blanche Plume. Vous agirez, combattrez dorénavant sous ces mêmes couleurs. Dans l'ensemble je vous renouvelle la confiance que vous accordait mon prédécesseur, quelques changements seront effectués dans les prochains temps mais chacun sera averti en temps et heure personnellement. Quoi qu'il en soit, nul d'entre vous n'a à s'inquiéter de son avenir, la Parole des Noirs est unique et sera respectée. Jusqu'à ce que le dernier pas de la Danse que mène mon père soit accompli, ses souhaits et directives restent d'actualité. Après quoi je prendrai mon Nom Dragonnique, et je vous entraînerai dans une nouvelle Danse, qui je l'espère nous permettra de préserver notre place dans la tourmente des temps prochains. Amis, je vous invite maintenant au festin et aux réjouissances d'usage, que les Feux Premiers vous gardent!

Lentement, la nef se vide, tandis que chacun s'en va profiter des mets rares et des vins fins offerts à profusion, et bien sûr commenter jusqu'à la fin de la nuit les événements. Les lourdes portes claquent sourdement en se refermant, puis le silence revient et s'installe en maître, troublé seulement de manière très discrète par le souffle de Larme, plongé dans une profonde réflexion sur son nouveau trône. La voix grave de son père, sortant des ombres, le fait légèrement sursauter:

-Tu t'es bien débrouillé, je suis fier de toi.

-Oh, tu es là...

-Oui, encore quelques instants, parce qu'il doit en être ainsi.

-C'est bien, oui. Hum...prends place, fais comme chez toi, fit Larme, un sourire aux lèvres.

-Inutile, nous n'en avons pas pour long. Je suis resté pour te dire adieu. Sois digne, de notre lignage, mais surtout, de tes rêves, ne les trahis jamais. Ne cède pas à la bassesse même quand elle te blesse, même quand elle te semble profitable, indispensable. Ce n'est qu'illusion, mensonge. Chéris ta femme et tes amis, protège celui qui fait appel pour une juste raison à ton aide, et brise sans pitié tes ennemis! La pitié est une faiblesse, la compassion une force quand elle n'aveugle pas. Sois vigilant, notre Destin en dépend, mon Fils.

-Mais...et mes Soeurs?

-Bonne question. Les Dragonnes mènent leurs propres Danses, qui parfois rejoignent les nôtres. Apprécie ces instants précieux à leur juste valeur, accepte leur amour, leur aide, leurs demandes, mais tu auras sans doute à tracer plus ou moins seul la Destinée des Noirs. Je ne vois pas l'avenir, je conçois une multitude de possibles, peut-être en sera-t'il autrement, je ne sais pas, c'est ta route, la mienne quitte cette dimension. Fais tes choix, et donne-toi les moyens de les assumer, de les réaliser. Maintenant, adieu, Larme.

-Adieu, Père...

Une brève et maladroite étreinte, puis l'Aîné quitte la salle d'une pensée, regagnant ses quartiers du tournoi. Cela l'amuse de parcourir les quartiers provisoires entourant inévitablement un tel événement, il se souvient d'une jeunesse lointaine, alors que, simple humain mercenaire, il tentait de gagner quelques pièces par son habileté aux armes. Il avait participé à quelques combats dans les arènes, puis y avait renoncé. L'ivresse procurée par des milliers de gorges hurlantes, par l'odeur du sang âpre et trop généreusement répandu sur le sable brûlant ou glacial, lui avaient montré le danger bien réel d'en venir à aimer tuer. Et si tuer pour sa survie était une science qu'il maitrisait déjà assez bien à l'époque, il n'avait jamais aimé dispenser la mort, il le faisait par nécessité. Cette pensée arrache un rire doucement sardonique au Dragon Noir qu'il est devenu, la nécessité était un concept bien discutable, selon le point de vue que l'on avait sur la situation. Toutefois, cela n'a plus d'importance, et Noir-Feu se sent plus léger, plus libre qu'il ne l'a été depuis des éons. Le sourire aux lèvres, il entre dans ses appartements provisoires, et se sert une eau de feu après s'être débarrassé de ses maigres affaires. Serein, il s'installe dans un fauteuil rudimentaire alors que, déjà, enfin, ses pensées s'éloignent vers Elle.

Edité par Noir-feu le 19/12/11 à 15:49

Roxar Le Guerrier | 20/12/11 16:58

* Pose un genou à terre sans un bruit *

Roxar, humble guerrier nain.
Un guerrier sans seigneur ne sert à rien, mais un seigneur sans guerrier ?

Vormonta | 20/12/11 17:55

[Très très haut niveau, bravo ! :) Et Orféor dans tout ça ? :( ]

Gzor | 20/12/11 22:28

[Que dire... toujours aussi excellent dans la plume et l'écriture ? :)]

*prends acte de la passation de pouvoir. Lance une procédure d'urgence. Commence immédiatement la rédaction d'une énième version des plans prévoyant des contacts approfondis, en bien comme en mal, avec les Dragons, désormais dirigés par un nouveau meneur.*

Gzor.
Iä, Iä, Cthulhu fhtagn ! Ph'nglui mglw'nfah Cthulhu R'lyeh wgah'nagl fhtagn !

Noir-feu | 21/12/11 13:01

[Vormonta> Ainsi qu'il est dit dans le troisième chapitre de *La Danse des Trois Noires* [Lien HTTP]

Orféor le Noir finit par mourir, nous donnant une chance de franchir Num, de nous rapprocher enfin de la source de cette haine qui l'avait consumé, de mettre un terme à la malédiction du Cercle.

Cela se passait un peu avant la lune 600.]

(Et merci encore et toujours pour les commentaires, me voilà aussi rouge qu'un Dragon de même teinte, quelle aventure pour un Noir.:D ;))

Edité par Noir-feu le 21/12/11 à 13:05

Vormonta | 21/12/11 13:12

[J'avais loupé ce passage, désolé pour ma question à deux euros ! :D ]

Noir-feu | 21/12/11 13:29

(D'un autre côté il faudrait avoir une sacrée mémoire, et une belle couche, pour se rappeler de tout, vu le temps écoulé et la pléthore d'élucubrations qui l'ont jalonné.:D;))

Neige II | 28/12/11 07:36

(tres jolie :) )

cher Larme,vous pouvez comptez sur moi et sur mon clan en cas de besoin ;)

votre père va me manquer :(

Neige II ,Prince De La Couronne Des Spliffs Sacrés De Gitanie

Hans Echnabo | 30/12/11 14:54

magnifique!!!!je suis honoré d'avoir été son ami et mes armes seront toujours à votre service

Que la hache de mon ancêtre pourfende mes ennemis!!!

Index des forums > Rôle Play