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Carlyle | 03/11/07 11:53
« Parmi les très nombreux ouvrages rédigés par mes confrères -et néanmoins amis - à propos des dimensions interstitielles, de la théorie du multivers, des couches de réalité ainsi que des Entités qui les habitent - je salue notre maître à tous, Olaus Wormius, dont les oeuvres constituent un trésor de documentation, de trouvailles, d'analyses, sans lesquelles notre science n'en serait resté qu'à ses balbutiements - je me suis aperçu qu'aucun ne traitait des sujets mineurs. De facto, mes confrères considèrent de façon quasiment exclusive les pouvoirs les plus grands, les Entités les plus puissantes, et, de modo, les inquiétudes les plus justifiées. Aussi, par souci d'exactitude et d'exhaustivité, j'ai décidé de porter mon regard sur la multitude de créatures mineures qui hantent les franges des mondes. Du moins, telle était mon intention première. Cependant, après avoir balayé l'innombrable liste de ces dernières, il m'a fallu me rendre à l'évidence : une vie n'y suffirait pas, et surtout, n'allouerait pas assez de temps pour réunir en un seul opuscule l'infinité de bribes d'informations pullulant à leur sujet, et de les vérifier. Dès lors, la réduction nécessaire de mon champ d'investigation s'est imposée à moi très clairement, tout naturellement. Ne voulant néanmoins pas - par pur orgueil je le confesse - produire un grimoire inutile comme il en existe tant sur les étagères des écoles, j'ai cherché, au milieu de mes objets d'étude, celui qui me ferait allier intérêt scientifique et utilité communautaire. Un temps, je penchais pour le Détenteur, entité opaque aux buts inconnus. Sa disparition précoce m'empêcha de m'y atteler sérieusement(1). Frustré, doublement, les encouragements de maître Wormius qui me fit l'honneur de citer mes travaux d'étudiants lors d'un colloque tenu à Lacore(2) il y a trois ans, me furent précieux. Je sélectionnai un nouvel objet d'investigations et m'intéressai à une Entité dite « mineure » : Elandel. La relative clarté des informations le concernant, l'absence d'ouvrage sur sa (non-)personne, et sa stabilité(3) ont été déterminantes dans mon choix : il semblait ne pas vouloir se dérober à mon examen à l'impromptu. Je présente donc à la communauté des chercheurs - et non sans une certaine fierté et quelque orgueil - ce que je sais être le premier ouvrage d'envergure sur Elandel, qui comporte également mes articles parus au cours de l'année écoulée dans le cadre de mes recherches dans la Revue des Trois Mondes(4) ainsi que la première étude d'un essai à paraître aux Presses du Donjon(5). Je prie donc l'ensemble des lecteurs, qu'ils soient chercheurs, étudiants, professeurs ou autre de bien vouloir accepter cet opuscule comme ce qu'il prétend être : un travail de débroussaillement sur un sujet inconnu jusqu'alors. En conséquence, si d'aventure ils venaient à découvrir que les informations que j'annonce comme exactes se révèlent erronées ou déficientes, je les conjure de bien vouloir me laisser le bénéfice du doute en cas de flottement douteux, et de me signaler leurs réflexions. Cet opus est un ouvrage en cours, et des rééditions fréquentes et augmentées pallieront mes erreurs. »
Hocvoft P. Lewhip
Introduction de la première édition du «De osbcure : sapientia e oblivium », Coll. Privée.
Carlyle | 03/11/07 11:54
(1) : A ce sujet, lire le très excellent « Chroniques des Disparitions : les Entités meurent également » de Théodric Lunar.
(2) : Textes des conférences disponibles aux Editions de l'Invisible : « Septième Colloque de Lacore : Du Visible à l'Invisible : Avons-nous prise sur nos réalités ? »
(3) : Question cruciale que celle-ci : les Entités ne semblent pas stables, non plus que les mondes qu'elles hantent, cf « Voyages oniriques en terres inconnues » et « Vacillement d'une étoile » respectivement de Gustav Friedrich et de Christopher Meister.
(4) : I.e. : « Elandel : Entité Mineure ? », « Une origine originale », « Des caractéristiques étrangères », « Des pouvoirs, un pouvoir : une hiérarchie ? ».
(5) : « Inquiètudes : la fin des innocents ».
Carlyle | 03/11/07 11:56
« [...] Les entités affectionnent des apparences distordues et étranges (citons, de mémoire, le Millesprit par exemple, et l'horreur qu'il suscite rien qu'en gravure), ou bien n'apparaissent point, et demeurent dans leur plan. Dès lors, la question de leurs agissements et de leur dissimulation au sein de notre monde se pose. Il ne m'appartient pas d'y répondre ici, ce sujet nécessitant plus de force que j'en dispose(1). Le cas Elandel n'amène pas de telles problématiques, tout en restant, cependant, très complexe. De fait, s'il se trouvait dans la pièce, en ce moment, avec vous, vous ne pourriez sans doute pas le reconnaître. Il est effectivement représenté la plupart du temps(2) sous la forme d'un être humain. Cela ne signifie en rien qu'il bride son pouvoir sous une apparence qui ne lui sied guère. En effet, les gravures, si elles s'accordent sur ses caractéristiques (il est indéniablement de forme humaine), elles sont en conflit sur plus de précisions. Il dispose de deux bras, deux jambes, un torse, une tête, cela peut être tenu pour certain. Mais sa taille, sa couleur de peau, son sexe, bref, tout ce qui différencie les êtres humains les uns des autres n'est pas fixe chez lui. Il peut se présenter à vous sous la figure d'une jeune fille de trois ans, comme sous celle d'un vieillard ou d'une femme dans la force de l'âge(3). [...]
[...] le pensent la plupart de mes confrères, j'ai longtemps considéré comme « mineure » la caste des Homoncules(4). Effectivement, le fait qu'ils ne revêtent pas une apparence plus « divine » est, convenons-en, dépréciatif, du moins, à nos yeux. Dès lors qu'ils ne nous apparaissent pas comme « terribles », ils ne le sont pas. Du moins le croyais-je jusqu'à très récemment encore. Les homoncules sont aussi terribles que leurs alliés sous tout autre forme. La différence n'est que visuelle : ils ne brident pas leur pouvoir en [...]
Extrait du chapitre premier : "Apparences et signification".
Carlyle | 03/11/07 11:58
(1) : Consulter « Elles sont parmi nous » de Dietrich Vincente, qui, malgré quelques invraisemblables hypothèses, dresse le meilleur résumé des exactions des Entités et explore leur méthode.
(2) : Je n'ai trouvé qu'une gravure qui le représentât sous une autre forme, in : « Les images pieuses, démons et folies », gravure numéro cinquante deux.
(3) : Il semble pourtant avoir une prédilection pour une figure mâle, d'environ une quarantaine d'années. Sept occurrences dans les gravures, sur un total observé de deux cent vingt et trois gravures.
(4) : Définie ainsi que les autres par Theodri Lunar dans son exceptionnel manifeste : « Pour une systématisation de la hiérarchisation des Entités », que je reprends en partie ici et dans « Des pouvoirs, un pouvoir : une hiérarchie ? »
Carlyle | 03/11/07 12:00
« Les pouvoirs des Entités nous sont très obscurs. Nous ne savon rien d'elles, à proprement parler. Sont-elles des mages, des sorciers, des titans ? Il est clair que même après une observation approfondie elles nous échappent, et ne sont pour nos esprits que des gouffres insondables qui nous conduisent plus ou moins irrémédiablement vers la folie(1). Aussi pendant toute la durée de mon étude demandai-je à des confrères et des amis de me surveiller étroitement et, si jamais le besoin s'en faisait sentir, m'interrompre, et me sevrer de mon travail. Il n'en fut pas besoin. Elandel diffère des Entités jusque dans ce point. Après des investigations minutieuses, après avoir dévoré des incunables les plus sacrés des bibliothèques des universités et des temples(2), j'ose affirmer avec force : Elandel est inoffensif ! Il ne peut agir sur notre dimension, du moins, pas directement. Et même le levier qu'utilisent les Entités pour égarer les mortels, i.e. les rêves, ne lui est pas accessible. Nul prophète ne parla jamais en son nom, nul empire ne se réclama de lui, nul malédiction ne lui est due, et - j'en reste encore abasourdi - nul culte ne lui est rendu. D'une certaine manière, pour nous autres simples mortels, Elandel n'existe pas, ne peut pas exister [...]
[...] existent, évidemment. Cela tient tout particulièrement, ai-je pu comprendre au cours de mes recherches, au statut et à la place très particulière qu'occupe cette entité. Nous avons vu plus tôt(3) qu'Elandel se limite à une apparence humanoïde, apparence et occurrences de celle-ci que nous avons détaillé au mieux. Ce cantonnement résulte à la fois d'un choix conscient de l'Entité, mais également d'une limitation. En effet, si l'apparence d'une Entité ne modifie en rien son pouvoir, elle peut en être une indication - plus ou moins fiable - précieuse. Ainsi, le Millesprit, qui dispose d'une puissance incommensurable revêt le visage d'une bête aux milles visages, aux milles tours, qui se trouve partout et nulle part en même temps. Des récits nous sont parvenus d'Entités occupant des pans d'univers entiers. Que cela représente une débauche de pouvoir, ou bien un équilibre, je ne sais, et peu importe d'une certaine manière, puisque la vérité de cette apparence est que le rapport puissance/taille est strictement indépassable. Les Entités ne sont pas des baudruches pleines d'air. Aussi comprend-on le peu de pouvoirs qu'Elandel possède. [...]
Extrait du chapitre cinquième : "Pouvoir d'Elandel."
Carlyle | 03/11/07 12:00
(1) : Citons par exemple le cas de Dietrich Vincente qui sombra dans la paranoïa la plus complète, ou encore celui de Abraham Sleir, qui finit par se suicider, de même que les éminents et regrettés profésseurs Fléance McTul, Ramis Cletus ou encore, pour ne pas prolonger la liste outre mesure, Sarah Shynt.
(2) : Je tiens à remercier tout particulièrement l'Université de Mysk Aton pour m'avoir laissé accéder librement aux ouvrages suivants : « Dieux, Entités, et autres Billevesées » qui passe pour avoir été écrit par Khornus le Rouge, éminent touche-à-tout ; « Confessions d'une Déesse égarée » qui serait les mémoires d'une Entité écrite de la main du prêtre qui les recueilli. De même que je remercie les temples de Bapho et de Musa, pour, respectivement : « Tenabrae major » du prêtre fou Inn Yusah et « Mémoire d'un guerrier » par le stratège Asamune Sanzo.
(3) : Cf Chapitre I : "Apparences et signification", pp 23 et sq.
Carlyle | 03/11/07 12:02
« [...] qui me lance.
Effectivement, et je choisi précisément cet ultime chapitre pour en faire part à mon lecteur, je ne suis pas sans inquiétude. L'objet des chapitres précédents a été de définir, de faire sortir Elandel de l'ombre, et autant qu'il me le fut, qu'il me l'est possible, je pense l'avoir fait. Sauf manquement de ma part, jamais Entité ne fut aussi bien cernée. Cependant il reste de l'ombre.
Ou plutôt, une absence d'ombre. Les Entités n'ayant pas de prise directe sur notre réalité s'arrange pour disposer d'une « force de frappe », d'une équipe. Quelle soit nombreuse (comme l'on soupçonne celle du Millesprit de l'être), strictement réduite (citons Dismei Greensmoke, au sujet de laquelle les informations sont tout particulièrement parcellaires), elle existe(1). Or, je n'en ai trouvé nulle trace pour Elandel. Des rumeurs, un peu partout, des légendes, qui parleraient d'un homme, vieux comme le temps, venant d'ailleurs, d'un village, d'un ordre religieux étrangement ambigu... Mais rien de tangible : de la fumée dispersée par un vent.
Mais, nous tenons pour certain que les Entités veulent a tous prix entrer dans notre monde(2) et il est clair qu'Elandel n'échappe pas à la règle. [...]
[...] J'émets alors ici une hypothèse. S'il faut tenir la genèse(3) d'Elandel pour sûre (ce que je n'ose faire qu'à titre hypothétique) nous pouvons nous permettre alors de subodorer quelques événements. De fait, la guerre opposant les Entités(4) s'est arrêtée de manière brutale, pour des raisons inconnues de tous. [...] Si une Entité avait osé tenter le coup, avait osé confier ses pouvoirs, l'intégralité, à un homme, pour prévoir la fin des événements ? [...]
[...] J'admets, cela semble totalement fou qu'un dieu puisse se débarrasser comme de rien de son essence pour la donner à un autre. Mais, supposons-le un instant sans sourire, et nous obtenons un humain dont la pensée n'est pas limitée par le temps, qui ne compte pas en mois, en jours ou en années, mais en siècles, capable d'attendre pour mener à bien son plan des éons complets... Supposons-le un instant, et nous obtenons la pire menace jamais observé : car le plan nous dépasse, nous, limité par nos jours...
Ce n'est évidemment qu'une hypothèse... Mais des recherches en ce sens ne pourraient qu'être bénéfiques. »
Extrait du dernier chapitre : "Rumeurs inquiètantes."
Carlyle | 03/11/07 12:03
(1) : Cela a été brillamment démontré par Maître Wormius, alors qu'il revenait d'une expédition particulièrement dangereuse. Le texte de la conférence n'est pas disponible, mais je crois que les notes du Doyen de l'Université de Lacore sont encore compulsables sur demande.
(2) : Cette information est tellement criante de vérité que je m'aperçois à l'heure où j'écris ces lignes que personne n'a entrepris de rédiger d'études à son propos. Seul un chapitre : "Volonté, but, objectif" du « Des Entités » de Parfisal Lambar propose une explication et une justification de cette thèse. Tout, cependant, reste à écrire.
(3) : Telle qu'elle a été décrite dans le chapitre IV "Origine du mal."
(4) : Voir Horatio d'Elseneur : « More things in Heaven and Earth than dreamt off in our philosophy ? »
Carlyle | 03/11/07 12:07
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Suite de :
1) Monologue oublié : [Lien HTTP]
2) Fragments epars : [Lien HTTP]
3) Séance inamicale : [Lien HTTP]
4) Eva : [Lien HTTP]
5) Vol de nuit : [Lien HTTP]
6) Les Minutes de la Confrérie Blanche : [Lien HTTP]
7) Orchestral manoeuvre in the dark : [Lien HTTP]
8 ) Echange et mots couverts : [Lien HTTP]
9) Le Chant des anges : [Lien HTTP]
10) Les terres perdues : [Lien HTTP]
11) Temps clair : [Lien HTTP]
12) Ouverture, mouvement final : [Lien HTTP]
13) Paix et furie : [Lien HTTP]
14) Départ : [Lien HTTP]
15) Une fin : [Lien HTTP]
J'espère que la lecture vous est toujours agréable.
La suite, à venir.